Savitri - Book One - Canto 3

B OOK O NE – C ANTO 3 – T HE Y OGA OF THE K ING : T HE Y OGA OF THE S OUL ' S R ELEASE L IVRE U N – C HANTE 3 – L E Y OGA DU R OI : L E Y OGA DE LA D ELIVRANCE DE L ’A ME

SAVITRI S RI A UROBINDO

French translation by: Divakar Jeanson www.divakar-publications.com

LIVRE UN – Le Livre des Commencements

ISBOOK ONE - The Book of Beginnings

Canto Three - The Yoga of the King: The Yoga of the Soul's Release

Chant Trois – Le Yoga du Roi: Le Yoga de la Délivrance de l’Ame

A world's desire compelled her mortal birth. One in the front of the immemorial quest, Protagonist of the mysterious play In which the Unknown pursues himself through forms And limits his eternity by the hours And the blind Void struggles to live and see, A thinker and toiler in the ideal's air, Brought down to earth's dumb need her radiant power. His was a spirit that stooped from larger spheres Into our province of ephemeral sight, A colonist from immortality. A pointing beam on earth's uncertain roads, His birth held up a symbol and a sign; His human self like a translucent cloak Covered the All-Wise who leads the unseeing world. Affiliated to cosmic Space and Time And paying here God's debt to earth and man

Un désir du monde la contraignit à naître. Un avant-coureur de la quête immémoriale, Protagoniste du drame mystérieux Où l’Inconnu se poursuit lui-même dans les formes Et limite son éternité par les heures, Et le Vide aveugle tente de vivre et de voir, Un penseur et travailleur dans l’air de l’idéal, Fit descendre à la terre son radieux pouvoir. Son esprit se penchait de plus larges sphères Jusqu’en notre province de vue éphémère, Un colon venu de l’immortalité. Un rayon sur les chemins incertains de la terre, Sa propre naissance fut un symbole et un signe ; Son soi humain tel un manteau translucide Couvrait la Sagesse qui conduit le monde. Affilié à l’Espace et au Temps cosmiques Et payant la dette de Dieu à la Terre, Une parenté plus haute était son droit divin. Bien qu’il consentît à l’ignorance mortelle, Sa connaissance partageait la Lumière. Une énergie de la Permanence originelle Entravée dans le moment et son flot, Il gardait la vision des Vastes cachés : Un pouvoir était en lui de l’Inconnaissable. Un archiviste des symboles de l’Au delà, Un trésorier de rêves surhumains, Il portait l’empreinte de puissantes mémoires

A greater sonship was his divine right. Although consenting to mortal ignorance, His knowledge shared the Light ineffable. A strength of the original Permanence Entangled in the moment and its flow, He kept the vision of the Vasts behind: A power was in him from the Unknowable. An archivist of the symbols of the Beyond, A treasurer of superhuman dreams, He bore the stamp of mighty memories

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And shed their grandiose ray on human life. His days were a long growth to the Supreme. A skyward being nourishing its roots On sustenance from occult spiritual founts Climbed through white rays to meet an unseen Sun. His soul lived as eternity's delegate, His mind was like a fire assailing heaven, His will a hunter in the trails of light. An ocean impulse lifted every breath; Each action left the footprints of a god, Each moment was a beat of puissant wings. The little plot of our mortality Touched by this tenant from the heights became A playground of the living Infinite. This bodily appearance is not all; The form deceives, the person is a mask; Hid deep in man celestial powers can dwell. His fragile ship conveys through the sea of years An incognito of the Imperishable. A spirit that is a flame of God abides, This sculptor of the forms of the Infinite, This screened unrecognised Inhabitant, Initiate of his own veiled mysteries, Hides in a small dumb seed his cosmic thought. In the mute strength of the occult Idea Determining predestined shape and act, Passenger from life to life, from scale to scale, Changing his imaged self from form to form, A fiery portion of the Wonderful, Artist of his own beauty and delight, Immortal in our mortal poverty.

Et versait leur clarté sur la vie de l’homme. Ses jours étaient une croissance au Suprême. Tourné vers le ciel et nourrissant ses racines Aux énergies de sources spirituelles occultes, Il montait les rayons blancs d’un Soleil invisible. Son vouloir un chasseur sur les traces du jour. Une impulsion océane portait chaque souffle, Chaque action laissait les empreintes d’un dieu, Chaque instant était un battement d’ailes puissantes. Le petit arpent de notre mortalité, Son âme était une déléguée de l’éternel, Son mental était un feu assaillant le ciel, Cette apparence corporelle n’est pas tout ; La forme trompe, la personne est un masque ; Cachés dans l’homme des pouvoirs célestes résident. Son frêle vaisseau porte sur la mer des années Un incognito de l’Impérissable. Un esprit demeure, qui est une flamme de Dieu, Une portion ardente du Prodigieux, Artiste de sa propre joie et beauté, Immortel en notre mortelle pauvreté. Ce sculpteur des formes de l’Infini, Cet Habitant méconnu dissimulé, Initié de ses propres mystères voilés, Cache dans une graine sa pensée cosmique. Dans l’énergie muette de l’Idée occulte Déterminant la forme et l’acte prédestinés, Passager de vie en vie, de palier en palier, Changeant l’image de son soi de corps en corps, Touché par cet hôte venu des cimes, devint Un terrain de jeux pour le vivant Infini.

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He regards the icon growing by his gaze And in the worm foresees the coming god.

Il regarde l’icône que ses yeux font grandir Et dans le ver prévoit le dieu qui doit venir.

At last the traveller in the paths of Time Arrives on the frontiers of eternity. In the transient symbol of humanity draped, He feels his substance of undying self And loses his kinship to mortality.

Enfin le voyageur dans les chemins du Temps Arrive aux frontières de l’éternité. Drapé dans le symbole transitoire de l’homme, Il perçoit la substance de son être sans mort Et se défait de ses liens à la mortalité. Un rayon de l’Eternel vient frapper son cœur, Sa pensée s’étend dans l’infinitude ; Tout en lui se tourne aux vastes de l’esprit. Son âme jaillit se joindre à l’Ame supérieure Et sa vie s’immerge dans cette vie plus grande. Il a bu aux seins de la Mère des mondes ; Une Supranature envahit sa structure : Elle adopte le terrain constant de son esprit Comme la sécurité de son monde changeant

A beam of the Eternal smites his heart, His thought stretches into infinitude; All in him turns to spirit vastnesses. His soul breaks out to join the Oversoul, His life is oceaned by that superlife. He has drunk from the breasts of the Mother of the worlds; A topless Supernature fills his frame: She adopts his spirit's everlasting ground As the security of her changing world And shapes the figure of her unborn mights. Immortally she conceives herself in him, In the creature the unveiled Creatrix works: Her face is seen through his face, her eyes through his eyes;

Et forme la figure de ses forces futures. Immortellement elle se conçoit en lui ; En lui dévoilée, la Créatrice travaille : Sa face est perçue dans la sienne, ses yeux dans les siens ; Par une vaste identité son être est le sien. Alors se manifeste en l’homme le Divin. Une Unité statique et un Pouvoir dynamique Descendent, les sceaux de la Divinité intégrale ; Son âme et son corps en prennent la marque splendide. La vie de l’homme est une longue préparation, Un cercle de peine et d’espoir, de guerre et de paix Tracé par la Vie sur l’obscur terrain matériel. Dans son ascension d’une cime jamais gravie, Il cherche dans une pénombre moirée de flamme

Her being is his through a vast identity. Then is revealed in man the overt Divine. A static Oneness and dynamic Power Descend in him, the integral Godhead's seals; His soul and body take that splendid stamp. A long dim preparation is man's life, A circle of toil and hope and war and peace Tracked out by Life on Matter's obscure ground. In his climb to a peak no feet have ever trod, He seeks through a penumbra shot with flame

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A veiled reality half-known, ever missed, A search for something or someone never found, Cult of an ideal never made real here, An endless spiral of ascent and fall Until at last is reached the giant point Through which his Glory shines for whom we were made And we break into the infinity of God. Across our nature's border line we escape Into Supernature's arc of living light. This now was witnessed in that son of Force; In him that high transition laid its base. Original and supernal Immanence Of which all Nature's process is the art, The cosmic Worker set his secret hand To turn this frail mud-engine to heaven-use. A Presence wrought behind the ambiguous screen: It beat his soil to bear a Titan's weight, Refining half-hewn blocks of natural strength It built his soul into a statued god. In the wide workshop of the wonderful world, Modelled in inward Time his rhythmic parts. Then came the abrupt transcendent miracle: The masked immaculate Grandeur could outline, At travail in the occult womb of life, His dreamed magnificence of things to be. A crown of the architecture of the worlds, A mystery of married Earth and Heaven Annexed divinity to the mortal scheme. The Craftsman of the magic stuff of self Who labours at his high and difficult plan

Une réalité devinée, toujours manquée, Quête d’un état ou d’un être jamais trouvé Ou culte d’un idéal jamais réalisé, Une spirale sans fin de montée et de chute Jusqu’à ce que le point géant soit atteint D’où brille Sa Gloire pour qui nous fûmes créés Et nous surgissions dans l’infinité du Divin. Nous franchissons la lisière et nous évadons Dans l’arche de lumière de la Supranature. Dont tout le procédé de la Nature est l’art, L’Ouvrier cosmique, de sa main secrète, Mit cet engin de glaise à l’usage du ciel. Une Présence oeuvra derrière le voile : Martelant son sol à porter le poids d’un Titan, Affinant les blocs de sa vigueur naturelle, Elle édifia son âme en un dieu statuesque. L’Artisan de la substance magique de l’être Qui travaille à son plan difficile et sublime Dans le vaste atelier de ce monde prodigieux, Modela ses parts au rythme d’un Temps intérieur. Alors vint, abrupt, le miracle transcendant : La Grandeur immaculée put ébaucher, Concentrée dans la matrice occulte de la vie, Sa magnificence rêvée des choses futures. Une couronne de l’architecture des mondes, Un mystère de la Terre et du Ciel épousés Annexa la divinité à l’ordre mortel. Ceci même arriva en ce fils de la Force ; En lui cette haute transition posa sa base. Originelle et divine Immanence

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A Seer was born, a shining Guest of Time. For him mind's limiting firmament ceased above. In the griffin forefront of the Night and Day A gap was rent in the all-concealing vault; The conscious ends of being went rolling back: The landmarks of the little person fell, The island ego joined its continent. Overpassed was this world of rigid limiting forms: Life's barriers opened into the Unknown. Abolished were conception's covenants And, striking off subjection's rigorous clause, Annulled the soul's treaty with Nature's nescience. All the grey inhibitions were torn off And broken the intellect's hard and lustrous lid; Truth unpartitioned found immense sky-room; An empyrean vision saw and knew; The bounded mind became a boundless light, The finite self mated with infinity. His march now soared into an eagle's flight. Out of apprenticeship to Ignorance Wisdom upraised him to her master craft And made him an archmason of the soul, A builder of the Immortal's secret house, An aspirant to supernal Timelessness: Freedom and empire called to him from on high; Above mind's twilight and life's star-led night There gleamed the dawn of a spiritual day. As so he grew into his larger self, Humanity framed his movements less and less; A greater being saw a greater world. A fearless will for knowledge dared to erase

Un Voyant naquit, un Hôte radieux des années. Pour lui cessa le firmament clos du mental. Au premier plan griffon de la Nuit et du Jour Une brèche fut trouée dans l’écran de la voûte ; Les limites de l’être roulèrent en arrière : La petite personne perdit ses repères Et l’île de l’ego rejoignit son continent. Surpassé ce monde de formes rigides, Les barrières s’ouvrirent dans l’Inconnu. Les tables de la conception furent abolies, Et la clause rigoureuse de la sujétion, Et le traité de l’âme avec la nescience. Les grises inhibitions furent arrachées Et brisé le luisant couvercle de l’intellect ; Sans cloisons la Vérité trouva l’immensité, Une vision empyréenne vit et connut ; Le mental devint une lumière illimitée, L’être fini s’accoupla à l’infinité. Sa marche alors prit l’essor d’un vol d’aigle. De son apprentissage auprès de l’Ignorance La Sagesse l’éleva à son maître métier Et le fit un archi maçon pour l’oeuvre de l’âme, Un bâtisseur de la demeure du Sans-Mort, Un aspirant à l’état hors du Temps : Empire et liberté l’appelaient et, par-delà Le demi-jour du mental et la nuit étoilée De la vie, luisait l’aurore d’un jour spirituel. Alors qu’il devenait ainsi son être plus vaste, De moins en moins l’humain dictait ses mouvements ; Un plus grand être voyait un monde plus grand. Une soif intrépide de connaissance osait

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The lines of safety Reason draws that bar Mind's soar, soul's dive into the Infinite. Even his first steps broke our small earth-bounds And loitered in a vaster freer air. In hands sustained by a transfiguring Might He caught up lightly like a giant's bow Left slumbering in a sealed and secret cave The powers that sleep unused in man within. He made of miracle a normal act And turned to a common part of divine works, Magnificently natural at this height, Efforts that would shatter the strength of mortal hearts, Pursued in a royalty of mighty ease Aims too sublime for Nature's daily will: The gifts of the spirit crowding came to him; They were his life's pattern and his privilege. A pure perception lent its lucent joy: Its intimate vision waited not to think; It enveloped all Nature in a single glance, It looked into the very self of things; Deceived no more by form he saw the soul. In beings it knew what lurked to them unknown; It seized the idea in mind, the wish in the heart; It plucked out from grey folds of secrecy The motives which from their own sight men hide. He felt the beating life in other men Invade him with their happiness and their grief; Their love, their anger, their unspoken hopes Entered in currents or in pouring waves Into the immobile ocean of his calm. He heard the inspired sound of his own thoughts Re-echoed in the vault of other minds;

Effacer les lignes de la Raison qui barrent L’essor du mental, le saut de l’âme en l’Infini. Ses tout premiers pas brisèrent nos bornes terrestres Pour visiter un air plus ample et plus libre.

De ses mains nourries et transfigurées Il se saisit légèrement, comme de l’arc

D’un géant assoupi dans sa caverne secrète, Des pouvoirs qui gisent au-dedans de l’homme. Faisant du miracle un acte normal, Et une part ordinaire des oeuvres divines, Magnifiquement naturels à cette altitude, Des efforts qui détruiraient des coeurs mortels, Il poursuivait avec une aise royale Des buts trop sublimes pour le vouloir habituel : Les dons de l’esprit affluaient à lui ; Ils étaient son privilège et son thème de vie. Une pure perception lui prêtait sa joie, Dont l’intime vision n’attendait pas de penser, Mais enveloppait la Nature d’un seul regard Qui pénétrait dans le soi même des choses ; Il n’était plus trompé par la forme : il voyait l’âme. Il savait ainsi ce qui se terrait dans les êtres, Captait l’idée dans le mental, le souhait dans le cœur, Et cueillait dans les gris replis du secret Les mobiles qu’à leur propre vue les hommes cèlent. La pulsation de la vie dans les autres L’envahissait de leur bonheur et leur peine ; Leur amour, leur colère, leurs espoirs informulés Entraient en ondes ou en vagues déferlantes

Dans l’océan immobile de son calme. Il entendait le son de ses propres pensées Faire écho en d’autres voûtes mentales ;

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The world's thought-streams travelled into his ken; His inner self grew near to others' selves And bore a kinship's weight, a common tie, Yet stood untouched, king of itself, alone. A magical accord quickened and attuned To ethereal symphonies the old earthy strings; It raised the servitors of mind and life To be happy partners in the soul's response, Tissue and nerve were turned to sensitive chords, Records of lustre and ecstasy; it made The body's means the spirit's acolytes. A heavenlier function with a finer mode Lit with its grace man's outward earthliness; The soul's experience of its deeper sheaths No more slept drugged by Matter's dominance. In the dead wall closing us from wider self, Into a secrecy of apparent sleep, The mystic tract beyond our waking thoughts, A door parted, built in by Matter's force, Releasing things unseized by earthly sense: A world unseen, unknown by outward mind Appeared in the silent spaces of the soul. He sat in secret chambers looking out Into the luminous countries of the unborn Where all things dreamed by the mind are seen and true And all that the life longs for is drawn close. He saw the Perfect in their starry homes Wearing the glory of a deathless form, Lain in the arms of the Eternal's peace, Rapt in the heart-beats of God-ecstasy. He lived in the mystic space where thought is born

Il voyait les pensées du monde entier circuler ; Son être intérieur devenait proche des autres, Eprouvait le poids d’une commune parenté, Et pourtant demeurait seul et roi de lui-même. Un accord magique avivait et mariait Aux symphonies de l’éther les cordes terrestres, Développait les serviteurs de l’être extérieur En d’heureux partenaires dans le répons de l’âme, Et les tissus et les nerfs en gammes sensitives Enregistrant l’éclat et l’extase, - et changeait Les moyens du corps en acolytes de l’esprit. Une fonction plus céleste au mode plus subtil, Eclairait de sa grâce la nature de l’homme ; L’expérience qu’a l’âme de ses gangues profondes N’était plus droguée par l’ascendant de la Matière. Dans la paroi inerte nous séparant du soi, Sur le secret d’un sommeil apparent, l’étendue Mystique par-delà nos pensées de veille, s’ouvrit Une porte érigée par la force matérielle, Délivrant des choses qui échappent à nos sens : Invisible, inconnu du mental extérieur, Un monde apparut dans les espaces de l’âme. Il s’assit en des chambres secrètes qui donnaient Sur les contrées lumineuses du sans-naissance Où tout ce que rêve le mental est véridique Et tout ce que cherche la vie devient concret. Il vit les Parfaits dans leurs demeures étoilées, Revêtant la gloire d’une forme sans mort, Etendus dans les bras de la Paix éternelle, Absorbés dans les battements de l’Extase. Il vécut dans l’air mystique où naît la pensée

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And will is nursed by an ethereal Power And fed on the white milk of the Eternal's strengths Till it grows into the likeness of a god. In the Witness's occult rooms with mind-built walls On hidden interiors, lurking passages Opened the windows of the inner sight. He owned the house of undivided Time. Lifting the heavy curtain of the flesh He stood upon a threshold serpent-watched, And peered into gleaming endless corridors, Silent and listening in the silent heart For the coming of the new and the unknown. He gazed across the empty stillnesses And heard the footsteps of the undreamed Idea In the far avenues of the Beyond. He heard the secret Voice, the Word that knows, And saw the secret face that is our own. The inner planes uncovered their crystal doors; Strange powers and influences touched his life. A vision came of higher realms than ours, A consciousness of brighter fields and skies, Of beings less circumscribed than brief-lived men And subtler bodies than these passing frames, And movements pushed by a superconscient force, And joys that never flowed through mortal limbs, And lovelier scenes than earth's and happier lives. A consciousness of beauty and of bliss, A knowledge which became what it perceived, Objects too fine for our material grasp, Acts vibrant with a superhuman light

Et une Force éthérée nourrit la volonté Au lait blanc des énergies du Suprême,

Pour qu’elle grandisse à la semblance d’un dieu. Dans les parois mentales des chambres du Témoin, Sur des lieux cachés, des passages dérobés, S’ouvrirent les croisées de la vision intérieure. Il possédait la demeure du Temps tout entier. Soulevant le lourd rideau de la chair Il se tint sur un seuil que gardait un serpent, Et scruta d’interminables couloirs luisants, Alerte et attentif dans le silence du cœur A la venue du nouveau et de l’inconnu. Son regard parcourut les espaces vacants, Il entendit les pas de l’Idée mystérieuse Dans les avenues lointaines de l’Au-delà. Il perçut la Voix secrète, la Parole qui sait, Et vit la face occulte qui est la nôtre. Par les portes de cristal des plans intérieurs D’étranges influences touchèrent sa vie. Une vision vint de domaines plus élevés, Une conscience de ciels et de champs plus ardents, D’êtres moins circonscrits que les hommes aux vies brèves Et de corps plus subtils que ces formes passagères, D’objets trop fins pour notre saisie matérielle, D’actes vibrants d’une clarté surhumaine Et mus par une force supraconsciente, De joies étrangères à des membres mortels, Et de scènes plus charmantes, et de vies plus heureuses. Une conscience d’harmonieuse félicité, Une connaissance qui est ce qu’elle perçoit,

Replaced the separated sense and heart And drew all Nature into its embrace.

Remplaça le sens et le cœur séparés Et réunit toute la Nature dans ses bras.

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The mind leaned out to meet the hidden worlds: Air glowed and teemed with marvellous shapes and hues, In the nostrils quivered celestial fragrances, On the tongue lingered the honey of paradise. A channel of universal harmony, Hearing was a stream of magic audience, A bed for occult sounds earth cannot hear. Out of a covert tract of slumber self The voice came of a truth submerged, unknown That flows beneath the cosmic surfaces, Only mid an omniscient silence heard, Held by intuitive heart and secret sense. It caught the burden of secrecies sealed and dumb, It voiced the unfulfilled demand of earth And the song of promise of unrealised heavens And all that hides in an omnipotent Sleep. In the unceasing drama carried by Time On its long listening flood that bears the world's Insoluble doubt on a pilgrimage without goal, A laughter of sleepless pleasure foamed and spumed And murmurings of desire that cannot die: A cry came of the world's delight to be, The grandeur and greatness of its will to live, Recall of the soul's adventure into space, A traveller through the magic centuries And being's labour in Matter's universe, Its search for the mystic meaning of its birth And joy of high spiritual response, Its throb of satisfaction and content In all the sweetness of the gifts of life, Its large breath and pulse and thrill of hope and fear,

Le mental se pencha vers les mondes cachés : L’air brasillait d’aspects et de tons merveilleux, Aux narines frémissaient de célestes senteurs, Le miel du paradis s’attardait sur la langue. Un chenal pour l’harmonie universelle, L’ouïe était un courant d’audience magique, Un lit pour des sons inconnus de la terre. De l’étendue occulte d’un état de sommeil Monta la voix d’une vérité submergée Qui coule au-dessous des surfaces cosmiques, Perçue seulement dans un silence omniscient, Tenue par le cœur intuitif et le sens profond. Elle captait le fardeau de mystères scellés, Exprimait le besoin insatisfait de la terre Et le chant de promesse de cieux inconquis Et tout ce que voile une Transe omnipotente. Dans le drame incessant charrié par le Temps Sur son lent flot attentif qui emporte du monde Le doute insoluble en un vain pèlerinage, Fusait l’écume d’un rire constant de plaisir, Le murmure d’un désir qui ne peut succomber : Un cri montait de la joie d’être du monde, La grande noblesse de sa volonté de vivre, Rappelant l’aventure de l’âme dans l’espace, Une voyageuse à travers les siècles magiques, Et l’effort de l’être dans l’univers matériel, Sa quête du sens mystique de sa naissance Et sa joie d’une haute réponse spirituelle, Le battement de son bien-être satisfait Dans toute la douceur des présents de la vie, Et son grand souffle d’émoi, d’espoir, et de peur,

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Its taste of pangs and tears and ecstasy, Its rapture's poignant beat of sudden bliss, The sob of its passion and unending pain.

Le goût de ses affres, ses pleurs et son extase, L’onde poignante de sa soudaine jouissance, Le sanglot de sa passion, de sa peine infinie. Le chuchotement des sons qui abondent Autour de nos cœurs mais ne trouvent d’issue Pour entrer, s’amplifia en un cantique

The murmur and whisper of the unheard sounds Which crowd around our hearts but find no window To enter, swelled into a canticle Of all that suffers to be still unknown And all that labours vainly to be born And all the sweetness none will ever taste And all the beauty that will never be. Inaudible to our deaf mortal ears The wide world-rhythms wove their stupendous chant To which life strives to fit our rhyme-beats here, Melting our limits in the illimitable, Tuning the finite to infinity. A low muttering rose from the subconscient caves, The stammer of the primal ignorance; Answer to that inarticulate questioning, There stooped with lightning neck and thunder's wings A radiant hymn to the Inexpressible And the anthem of the superconscient light. All was revealed there none can here express; Vision and dream were fables spoken by truth Or symbols more veridical than fact, Or were truths enforced by supernatural seals. Immortal eyes approached and looked in his, And beings of many kingdoms neared and spoke: The ever-living whom we name as dead Could leave their glory beyond death and birth To utter the wisdom which exceeds all phrase: The kings of evil and the kings of good,

De tout ce qui souffre d’être encore inconnu, De tout ce qui vainement s’efforce de naître, Toute la douceur que nul jamais ne goûtera Et la beauté qui ne pourra jamais exister. Inaudibles pour notre surdité de mortels, Les rythmes du monde tissaient leur chant formidable Auquel la vie s’efforce ici d’ajuster nos rimes, Dissolvant nos limites dans l’illimitable Et accordant le fini à l’infinité. Un grondement sourd monta des caves subconscientes, Le bégaiement de l’ignorance primordiale ; Réponse à ce questionnement inarticulé, Gorge de foudre, ailes de tonnerre, descendit Un hymne radieux à l’Inexprimable Et l’antienne de la lumière supraconsciente. Tout était révélé, que nul ici ne peut dire ; Vision et songe étaient des fables authentiques Ou des symboles plus véritables que les faits, Ou des vérités d’origine surnaturelle. Des yeux immortels venaient regarder dans les siens Et des êtres d’autres royaumes lui parler : Les toujours vivants que nous nommons défunts Laissaient leur gloire par-delà mort et naissance Pour dire la sagesse surpassant toute phrase ; Les monarques du mal et les monarques du bien,

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Appellants at the reason's judgment seat, Proclaimed the gospel of their opposites, And all believed themselves spokesmen of God: The gods of light and titans of the dark Battled for his soul as for a costly prize. In every hour loosed from the quiver of Time There rose a song of new discovery, A bow-twang's hum of young experiment. Each day was a spiritual romance, As if he was born into a bright new world; Adventure leaped an unexpected friend, And danger brought a keen sweet tang of joy; Each happening was a deep experience. There were high encounters, epic colloquies, And counsels came couched in celestial speech, And honeyed pleadings breathed from occult lips To help the heart to yield to rapture's call, And sweet temptations stole from beauty's realms And sudden ecstasies from a world of bliss. It was a region of wonder and delight. All now his bright clairaudience could receive; A contact thrilled of mighty unknown things. Awakened to new unearthly closenesses, The touch replied to subtle infinities, And with a silver cry of opening gates Sight's lightnings leaped into the invisible. Ever his consciousness and vision grew; They took an ampler sweep, a loftier flight; He passed the border marked for Matter's rule And passed the zone where thought replaces life. Out of this world of signs suddenly he came

Appelants au tribunal où siège la raison, Proclamaient l’évangile de leurs opposés, Et tous se croyaient les émissaires du Divin : Les dieux de lumière et les titans de l’obscur Se battaient pour la conquête de son âme. En chaque heure dardée de son carquois par le Temps S’élevait un chant de découverte nouvelle, Une corde vibrante de jeune tentative. Chaque jour était une romance spirituelle, Comme s’il naissait à un monde tout neuf ; D’aventure, inattendu, surgissait un ami, Le danger portait une vive, exquise saveur ; Chaque incident était une profonde expérience. Venaient de hautes rencontres, des colloques épiques, Des conseils délivrés dans un langage sublime, Ou des plaidoyers de miel de lèvres occultes Pour inciter le cœur à céder à l’ivresse, Et les contrées de la beauté venaient le tenter Et de soudaines extases de félicité. C’était une région de merveille et de joie. Sa clairaudience pouvait tout recevoir, Et vibrait au contact de choses inconnues. S’éveillant à d’autres présences dans l’univers, Le toucher répondait à de subtils infinis, Et, en un cri argenté de portes qui s’ouvrent, Les éclairs de la vue pénétraient l’invisible. Sa conscience et sa vision continuaient d’acquérir Une plus ample envergure et un vol plus altier ; Il franchit la frontière de la règle matérielle, Puis la zone où la pensée remplace la vie. De ce monde de signes il émergea soudain

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Into a silent self where world was not And looked beyond into a nameless vast. These symbol figures lost their right to live, All tokens dropped our sense can recognise; There the heart beat no more at body's touch, There the eyes gazed no more on beauty's shape. In rare and lucent intervals of hush Into a signless region he could soar Packed with the deep contents of formlessness Where world was into a single being rapt And all was known by the light of identity And Spirit was its own self-evidence. The Supreme's gaze looked out through human eyes And saw all things and creatures as itself And knew all thought and word as its own voice. There unity is too close for search and clasp And love is a yearning of the One for the One, And beauty is a sweet difference of the Same And oneness is the soul of multitude. There all the truths unite in a single Truth, And all ideas rejoin Reality. There knowing herself by her own termless self, Wisdom supernal, wordless, absolute Sat uncompanioned in the eternal Calm, All-seeing, motionless, sovereign and alone. There knowledge needs not words to embody Idea; Idea, seeking a house in boundlessness, Weary of its homeless immortality, Asks not in thought's carved brilliant cell to rest Whose single window's clipped outlook on things Sees only a little arc of God's vast sky. The boundless with the boundless there consorts;

En un soi silencieux où le monde n’était pas Et regarda au-delà en un vaste sans nom. Tous ces symboles perdirent leur droit de vivre, Tous les indices que reconnaissent nos sens ; Là, le cœur ne battait plus au contact du corps ; Là, les yeux ne voyaient plus la belle apparence. En de rares, brillants intervalles de calme Il put s’élancer dans une région sans signes Pleine du contenu profond du sans-forme Où le monde était en un seul être absorbé Et tout était connu par une même lumière Et l’Esprit était sa propre évidence. Le Suprême regardait par les yeux d’un homme Toutes choses, toutes créatures, comme soi-même, Et reconnaissait chaque pensée, chaque parole. Là, l’unité est trop proche pour l’étreinte Et l’amour est un élan de l’Un envers l’Un, La beauté une douce différence du Même Et l’union est l’âme de la multitude. Là, toutes les vérités deviennent une, Et toutes les idées rejoignent le Réel. Là, consciente d’elle-même en son être infini, La Sagesse supérieure, muette, absolue, Demeurait seule dans le Calme éternel, Omnivoyante, immobile, souveraine. Là, sans mots, la connaissance incarne l’Idée ; L’Idée, cherchant un foyer dans l’illimité, Lasse de son errance immortelle, ne cherche pas A se poser dans la cellule de la pensée Dont l’unique fenêtre étroite sur les choses Ne voit qu’un petit arc dans le vaste de Dieu. Là, les infinités sont des camarades ;

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While there, one can be wider than the world; While there, one is one's own infinity.

Séjournant là, l’on peut contenir l’univers ; Séjournant là, l’on est son propre infini.

His centre was no more in earthly mind; A power of seeing silence filled his limbs: Caught by a voiceless white epiphany

Son centre n’était plus dans le mental terrestre ; Un silence clairvoyant emplissait ses membres : Saisi par une épiphanie blanche et sans voix

Into a vision that surpasses forms, Into a living that surpasses life,

En une vision qui surpasse les formes, En une existence qui surpasse la vie,

He neared the still consciousness sustaining all. The voice that only by speech can move the mind Became a silent knowledge in the soul; The strength that only in action feels its truth Was lodged now in a mute omnipotent peace. A leisure in the labour of the worlds, A pause in the joy and anguish of the search Restored the stress of Nature to God's calm. A vast unanimity ended life's debate. The war of thoughts that fathers the universe, The clash of forces struggling to prevail In the tremendous shock that lights a star As in the building of a grain of dust, The grooves that turn their dumb ellipse in space Ploughed by the seeking of the world's desire, The long regurgitations of Time's flood, The torment edging the dire force of lust That wakes kinetic in earth's dullard slime And carves a personality out of mud, The sorrow by which Nature's hunger is fed, The oestrus which creates with fire of pain, The fate that punishes virtue with defeat, The tragedy that destroys long happiness, The weeping of Love, the quarrel of the Gods,

Il s’approcha de la conscience qui soutient tout. La voix qui ne meut le mental que par le langage Devint une connaissance directe dans l’âme ; La force qui ne sent sa vérité que dans l’acte Habitait maintenant une paix toute-puissante. Une aise dans le labeur des mondes, une pause

Dans la joie et l’angoisse de la quête, Restaurait la Nature au calme de Dieu. Une vaste unanimité apaisait la vie.

La guerre de pensées qui préside à l’univers, L’affrontement de forces cherchant à prévaloir Dans le choc formidable qui enflamme une étoile Comme dans la facture d’un grain de poussière, Les sillons qui tournent leur ellipse dans l’espace Creusés par le désir du monde dans sa poursuite, Les longues régurgitations du Temps diluvial, Le tourment qui aiguise la terrible luxure S’éveillant cinétique dans la vase terrestre Et taillant une personnalité dans la boue, Le chagrin dont la Nature affamée se nourrit, L’oestrus qui crée avec le feu de la douleur, Le destin qui punit la vertu par la défaite, La tragédie qui détruit un long bonheur, Les pleurs de l’Amour, la querelle des Dieux, -

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Ceased in a truth which lives in its own light. His soul stood free, a witness and a king.

Tout cessa, dans une lumière de vérité. Son âme était libre, un témoin et un roi.

Absorbed no more in the moment-ridden flux Where mind incessantly drifts as on a raft Hurried from phenomenon to phenomenon, He abode at rest in indivisible Time. As if a story long written but acted now, In his present he held his future and his past, Felt in the seconds the uncounted years And saw the hours like dots upon a page. An aspect of the unknown Reality Altered the meaning of the cosmic scene. This huge material universe became A small result of a stupendous force: Overtaking the moment the eternal Ray Illumined That which never yet was made. Thought lay down in a mighty voicelessness; The toiling Thinker widened and grew still, Wisdom transcendent touched his quivering heart: His soul could sail beyond thought's luminous bar; Mind screened no more the shoreless infinite. Across a void retreating sky he glimpsed Through a last glimmer and drift of vanishing stars The superconscient realms of motionless Peace Where judgment ceases and the word is mute And the Unconceived lies pathless and alone. There came not form or any mounting voice; There only were Silence and the Absolute.

Il n’était plus absorbé dans le flux des instants Où le mental dérive comme sur un radeau Précipité de phénomène en phénomène : Il demeurait au repos dans le Temps entier. Comme une histoire écrite depuis longtemps, Il tenait dans son présent avenir et passé, Dans les secondes sentait les années innombrables Et voyait chaque heure comme un point sur une page. Un aspect de la Réalité inconnue Altéra le sens de la scène cosmique. Cet énorme univers matériel devint Un petit résultat d’une force stupéfiante : Plus rapide que l’instant le Rayon éternel Illumina Cela qui jamais ne prit forme. La pensée s’étendit dans un silence puissant ; Le Penseur ouvrieux s’élargit et s’apaisa, La Sagesse transcendante toucha son cœur : Son âme put franchit la barre du mental Dont l’écran ne voilait plus l’infini sans rivages. A travers le retrait d’un ciel vide il aperçut, A une lueur ultime d’étoiles évanouies, Les domaines supraconscients de Paix immobile Où le jugement cesse et se tait la parole Et l’Inconçu gît, sans chemins, et seul. Nulle forme ne parvenait là, nulle voix : Il n’y avait là que le Silence, et l’Absolu.

Out of that stillness mind new-born arose

De ce silence, rené, le mental s’éveilla

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And woke to truths once inexpressible, And forms appeared, dumbly significant, A seeing thought, a self-revealing voice. He knew the source from which his spirit came: Movement was married to the immobile Vast; He plunged his roots into the Infinite, He based his life upon eternity. Only awhile at first these heavenlier states, These large wide-poised upliftings could endure. The high and luminous tension breaks too soon, The body's stone stillness and the life's hushed trance, The breathless might and calm of silent mind; Or slowly they fail as sets a golden day. The restless nether members tire of peace; A nostalgia of old little works and joys, A need to call back small familiar selves, To tread the accustomed and inferior way, The need to rest in a natural pose of fall, As a child who learns to walk can walk not long, Replace the titan will for ever to climb, On the heart's altar dim the sacred fire. An old pull of subconscious cords renews; It draws the unwilling spirit from the heights,

A des vérités jusqu’alors indicibles, Et des formes apparurent, pleines de sens, Une pensée voyante, une voix révélée. Il reconnut la source de son esprit : Le mouvement épousa le Vaste immobile, Il plongea ses racines dans l’Infini, Il fonda sa vie sur l’éternité. Mais ne pouvaient au début durer qu’un moment Ces états plus célestes, ces larges soulèvements. La haute et lumineuse tension se rompt trop vite, La transe pétrifiée du corps et de la vie, Le grand calme sans souffle du mental silencieux ; Ou lentement ils déclinent, comme un jour doré. Les membres turbulents se fatiguent de la paix ; Une nostalgie des petits travaux et plaisirs, Un besoin de rappeler ce qui est familier Et de fouler la voie coutumière inférieure, Retrouvant la pose naturelle de la chute, Comme un enfant ne marche d’abord que quelques pas, Remplacent l’élan titanique de s’élever, Sur l’autel du cœur obscurcissent le feu sacré. Une ancienne traction de cordes subconscientes Retire malgré lui l’esprit des hauteurs, Ou c’est une morne gravitation qui nous drague A l’inertie aveugle de notre base. Cela aussi le divin Diplomate utilise, Notre chute est le moyen d’un plus grand lever. Car, dans le champ tempétueux de la Nature Et le chaos à demi ordonné de la vie Le Pouvoir sans forme, le Soi de lumière éternelle,

Or a dull gravitation drags us down To the blind driven inertia of our base.

This too the supreme Diplomat can use, He makes our fall a means for greater rise. For into ignorant Nature's gusty field, Into the half-ordered chaos of mortal life The formless Power, the Self of eternal light

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Follow in the shadow of the spirit's descent; The twin duality for ever one Chooses its home mid the tumults of the sense. He comes unseen into our darker parts And, curtained by the darkness, does his work, A subtle and all-knowing guest and guide, Till they too feel the need and will to change. All here must learn to obey a higher law, Our body's cells must hold the Immortal's flame. Else would the spirit reach alone its source Leaving a half-saved world to its dubious fate. Nature would ever labour unredeemed; Our earth would ever spin unhelped in Space, And this immense creation's purpose fail Till at last the frustrate universe sank undone. Even his godlike strength to rise must fall: His greater consciousness withdrew behind; Dim and eclipsed, his human outside strove To feel again the old sublimities, Bring the high saving touch, the ethereal flame, Call back to its dire need the divine Force. Always the power poured back like sudden rain, Or slowly in his breast a presence grew; It clambered back to some remembered height Or soared above the peak from which it fell. Each time he rose there was a larger poise, A dwelling on a higher spirit plane; The Light remained in him a longer space. In this oscillation between earth and heaven, In this ineffable communion's climb There grew in him as grows a waxing moon

Suivent dans son ombre la descente de l’esprit ; La dualité jumelle à jamais une Choisit son foyer dans les tumultes des sens. Invisible Il vient dans nos parties les plus sombres Et, voilé par l’obscurité, fait son travail, Un hôte et un guide subtil et omniscient, Pour qu’elles aussi sentent le besoin de changer. Tous devront obéir à une loi supérieure, Nos cellules devront tenir la flamme immortelle. Sinon, l’esprit atteindrait seul sa source, Laissant un monde à moitié sauvé à son destin. La Nature inchangée continuerait son labeur ; Notre terre tournoierait à jamais dans l’Espace, L’objet échouerait de cette immense création Et sombrerait, inaccompli, l’univers frustré. Même sa force sublime, d’abord, devait échouer : Sa conscience plus grande recula en arrière ; Ternie, éclipsée, son humanité s’efforçait D’éprouver encore les perfections évanouies, Le toucher rédempteur, la flamme éthérée, De rappeler à son besoin la Force divine. Comme une pluie soudaine revenait le pouvoir, Ou lentement une présence grandissait en lui ; Elle retournait gravir des hauteurs souvenues Ou s’élançait par-delà les cimes connues. Chaque fois il y avait un plus grand équilibre, Un séjour sur un plus haut plan spirituel ; La Lumière demeurait en lui plus longtemps. Dans cette oscillation entre la terre et le ciel, Dans la montée de cette communion ineffable, Croissait en lui comme croît une lune

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The glory of the integer of his soul.

La gloire du nombre entier de son âme.

A union of the Real with the unique, A gaze of the Alone from every face, The presence of the Eternal in the hours

Une union du Réel et de l’unique, Un regard du Seul en chaque visage, La présence de l’Eternel dans les heures Elargissant la vue du mental mortel, En reliant la force de l’homme avec le Destin Accomplissait l’être fragmenté que nous sommes.

Widening the mortal mind's half-look on things, Bridging the gap between man's force and Fate Made whole the fragment-being we are here. At last was won a firm spiritual poise, A constant lodging in the Eternal's realm, A safety in the Silence and the Ray, A settlement in the Immutable. His heights of being lived in the still Self; His mind could rest on a supernal ground And look down on the magic and the play Where the God-child lies on the lap of Night and Dawn

Un ferme équilibre spirituel était acquis, Une résidence constante dans l’Immortel, Une sécurité dans le Silence et le Rai, Un établissement dans l’Immuable.

Ses hauteurs d’être habitaient le Soi immobile ; Son mental, s’appuyant sur un terrain supérieur, Pouvait regarder la magie et le jeu Où l’enfant Dieu est bercé par la Nuit et par l’Aube Et le Permanent revêt la guise du Temps. Aux calmes cimes comme aux fonds tourmentés Son vaste esprit consentait également : Une sérénité stable de calme vigueur, Un ample regard inébranlable sur les jours Paisiblement accueillaient toute expérience. Indifférent au plaisir comme au chagrin, La merveille ni l’appel ne pouvait le tenter : Immobile, contemplant le flux des choses, Calme et distant, soutenant tout ce qui est, Sa quiétude aidait le monde en travail. Inspirée par le silence et la vision interne, Sa force put agir avec un art nouveau Sur le matériau grossier dont tout est formé Et le refus de la masse de l’Inertie

And the Everlasting puts on Time's disguise. To the still heights and to the troubled depths His equal spirit gave its vast assent: A poised serenity of tranquil strength, A wide unshaken look on Time's unrest Faced all experience with unaltered peace. Indifferent to the sorrow and delight, Untempted by the marvel and the call, Immobile it beheld the flux of things, Calm and apart supported all that is: His spirit's stillness helped the toiling world. Inspired by silence and the closed eyes' sight His force could work with a new luminous art On the crude material from which all is made And the refusal of Inertia's mass

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And the grey front of the world's Ignorance And nescient Matter and the huge error of life. As a sculptor chisels a deity out of stone He slowly chipped off the dark envelope, Line of defence of Nature's ignorance, The illusion and mystery of the Inconscient In whose black pall the Eternal wraps his head That he may act unknown in cosmic Time. A splendour of self-creation from the peaks, A transfiguration in the mystic depths, A happier cosmic working could begin And fashion the world-shape in him anew, God found in Nature, Nature fulfilled in God. Already in him was seen that task of Power: Life made its home on the high tops of self; His soul, mind, heart became a single sun; Only life's lower reaches remained dim. But there too, in the uncertain shadow of life, There was a labour and a fiery breath; The ambiguous cowled celestial puissance worked Watched by the inner Witness's moveless peace. Even on the struggling Nature left below Strong periods of illumination came: Lightnings of glory after glory burned, Experience was a tale of blaze and fire, Air rippled round the argosies of the Gods, Strange riches sailed to him from the Unseen; Splendours of insight filled the blank of thought, Knowledge spoke to the inconscient stillnesses, Rivers poured down of bliss and luminous force,

Et la grisaille de l’Ignorance du monde Et la Matière nesciente et l’erreur de la vie. Tel un sculpteur ciselant un dieu dans la pierre, Lentement il effritait l’obscure enveloppe, Ligne de défense de la Nature ignorante, L’illusion et le mystère de l’Inconscient, - Ce noir linceul dont l’Eternel couvre sa tête Afin d’agir inconnu dans le Temps cosmique. Une splendeur de création venue d’en haut, Une transfiguration dans les fonds mystiques, Une action plus heureuse put commencer A refaçonner en lui la forme du monde, Dieu dans la Nature, la Nature accomplie en Dieu. Déjà paraissait en lui cet ouvrage : La vie prenait sa demeure sur les sommets, l’âme, Le mental et le cœur étaient un même soleil ; Seuls demeuraient obscurs les pays inférieurs. Mais là aussi, dans leur ombre incertaine, Il y avait un labeur et un souffle de feu ; Sous sa cagoule oeuvrait la puissance céleste, Veillée par la paix du Témoin intérieur. Même sur la Nature laissée au-dessous De fortes périodes venaient d’illumination : Des éclairs de gloire se suivaient l’un l’autre, L’expérience était un conte de flamme, L’air ondoyait autour des navires des Dieux, D’étranges richesses naviguaient jusqu’à lui ; Une perception radiante emplissait la pensée, La Connaissance parlait au silence inconscient, Des fleuves de bonheur et de force lumineuse,

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Visits of beauty, storm-sweeps of delight Rained from the all-powerful Mystery above.

Des visites de beauté, des rafales de joie Déferlaient du Mystère tout-puissant au-dessus.

Thence stooped the eagles of Omniscience. A dense veil was rent, a mighty whisper heard; Repeated in the privacy of his soul, A wisdom-cry from rapt transcendences Sang on the mountains of an unseen world; The voices that an inner listening hears Conveyed to him their prophet utterances, And flame-wrapped outbursts of the immortal Word And flashes of an occult revealing Light Approached him from the unreachable Secrecy. An inspired Knowledge sat enthroned within Whose seconds illumined more than reason's years: An ictus of revealing lustre fell As if a pointing accent upon Truth, And like a sky-flare showing all the ground A swift intuitive discernment shone. One glance could separate the true and false, Or raise its rapid torch-fire in the dark To check the claimants crowding through mind's gates Covered by the forged signatures of the gods, Detect the magic bride in her disguise Or scan the apparent face of thought and life. Oft inspiration with her lightning feet, A sudden messenger from the all-seeing tops, Traversed the soundless corridors of his mind Bringing her rhythmic sense of hidden things. A music spoke transcending mortal speech. As if from a golden phial of the All-Bliss,

De là chargèrent les aigles de l’Omniscience. Un écran fut déchiré dans un puissant murmure ; Se répétant dans l’intimité de son âme, Un cri de sagesse des transcendances heureuses Chantait sur les cimes d’un monde invisible ; Les voix qu’une ouïe intérieure peut entendre Lui transmettaient leurs paroles prophétiques ; Des éclosions flamboyantes du Verbe immortel, Des éclats révélateurs d’une Lumière occulte L’approchaient, de l’inaccessible Secret. Une Connaissance inspirée régnait au-dedans Dont les secondes éclairaient plus que les années De la raison : un ictus lumineux s’abattait Comme un accent désignant la Vérité Et, tel un feu d’artifice montrant tout le sol, Brillait un discernement intuitif et rapide. Un seul regard séparait le vrai du factice Ou pouvait, dressant son flambeau dans le noir, Arrêter les prétendants aux portes mentales Munis de forgeries des signatures des dieux, Détecter sous son costume l’épouse magique, Ou scruter la face apparente de la vie. Souvent l’inspiration, vive comme l’éclair, Messagère soudaine des sommets clairvoyants, Parcourant les couloirs silencieux de son mental, Apportait son sens rythmique des choses cachées. Sa musique transcendait le langage mortel. Comme d’un flacon d’or de la Félicité,

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