La Presse Bisontine 78 - Juin 2007

BESANÇON

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La Presse Bisontine n°78 - Juin 2007

SANTÉ PUBLIQUE Toujours pas de réponse Le mystère des œufs contaminés n’est pas résolu Il y a un an, le professeur du C.H.U. bisontin Jean-François Viel mettait en évidence une présence anormalement élevée de dioxines dans des œufs prélevés vers l’incinérateur de Besançon. Malgré tous ses messages d’alerte, c’est le silence radio du côté des autorités.

Boudés ici, les travaux du professeur Jean-François Viel ont été repris par

L e 15 juin dernier, le pro- fesseur de santé publique Jean-François Viel ren- dait publique une étude qu’il avait menée quelques mois auparavant concernant la teneur en dioxines trouvée dans des œufs de poule prélevés dans un élevage familial de Besan- çon. Stupeur à la lecture des résultats : les œufs en question contiennent des taux de dioxines “très nettement supérieurs à la teneur maximale autorisée” selon le professeur Viel. Le chiffre est de 43 pg/g alors que la réglementation européenne fixe une teneur maximale tolé- rée à 3 pg/g. Ces inquiétantes découvertes mises au jour par le scientifique bisontin auraient dû alerter les autorités sanitaires. La direc- tion des services vétérinaires, saisie du dossier par le préfet au moment de la publication des études du chercheur, n’a toujours pas réagi, près d’un an

après la publication de ces résul- tats alarmants. “Je leur ai envoyé une lettre recommandée fin avril, je n’ai toujours pas de réponse” déplore M. Viel. Pourtant, cette étude a de quoi interpeller. “La principale sour- ce connue d’exposition des

conduire sans délai à une éva- luation du risque sanitaire.” Or, un an après, le professeur attend toujours cette évalua- tion. “Ils m’ont demandé des centaines de données que je leur ai fournies. Je n’ai jamais eu de nouvelles. Je déplore un défi- cit de connaissances sur ce sujet. Il faudrait doser plus d’œufs pour avoir des informations plus systématiques. Mais ces pre- miers résultats n’ont l’air de déranger personne” regrette Jean-François Viel. Apparemment, pour la direc- tion des services vétérinaires, l’affaire est entendue. “Nous avons fait notre enquête suite aux résultats du professeur Viel et constaté ce que l’on savait déjà et que l’A.F.S.S.A. avait déjà dit : en milieu urbain, les poulaillers sont susceptibles d’être contaminés en dioxine. Les personnes qui élèvent des poules ont été mises en garde, nous avons fait ce que nous

l’institut national de veille

sanitaire. Nul n’est prophète en son pays.

volailles aux dioxines, sauf contamination accidentelle de l’alimentation, est l’ingestion de terre contami- née” ajoute le scientifique. Et “en raison des risques poten- tiels qui pour- raient être liés à une forte consommation des œufs pro- duits locale- ment, le niveau de contamina- tion élevé doit

La dioxine a la particularité de se concentrer

devions faire” répondent les ser- vices de la D.S.V. La dioxine produite par les fumées d’incinération des ordures ménagères a la parti- cularité de se concentrer dans les graisses : œufs, lait de vache et viande bovine. C’est parce que seuls des élevages de poules étaient situés dans le proche périmètre de l’usine d’inciné- ration de Planoise que le pro- fesseur bisontin a choisi ce mode de mesure. Et même si aujour- d’hui, l’usine est aux normes, les rejets sont certes moindres, mais identiques. Or, il faut,

selon différentes estimations, entre 10 et 50 ans pour que les taux de dioxines présents dans la terre soient divisés de moi- tié. C’est ce même professeur Viel qui avait confirmé il y a quelques années l’hypothèse d’une asso- ciation entre l’exposition envi- ronnementale à la dioxine émi- se par l’usine d’incinération (avant sa remise aux normes) et la survenue d’une forme de cancer du système lymphatique. C’est pour tester l’éventuelle voie de contamination par la consommation de denrées ali-

mentaires que M. Viel a enga- gé cette étude sur les œufs de poule. Les résultats connus, il a l’amer sentiment de prêcher dans le désert. Pas complète- ment tout de même car l’idée d’un deuxième four souhaité par le syndicat de traitement des ordures du Grand Besan- çon (Sybert) est fortement remi- se en cause aujourd’hui, y com- pris par le maire de Besançon qui semble de plus en plus réti- cent à ce mode d’élimination des déchets.

dans les graisses.

J.-F.H.

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