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M I C H E L H E R V Y : « T R O M P E - L A - M O R T »

Trompe-la-Mort ? C’est le surnom donné à Michel Hervy pendant quarante années. « Parce que j’aimais sortir par gros temps… à condition de rapporter de la pêche ! », sourit l’ancien caseyeur du Croisic, pas frileux quand il fallait affronter l’océan par 40 nœuds de vent. Cela en valait la peine, le métier était lucratif. « Une veille de Noël, j’ai vendu des crustacés à plus de 300 francs (46 €), le kilo », se souvient-il. On comprend mieux qu’il n’ait pas suivi son père comme apprenti dans l’entreprise de peinture. « À 13 ans, j’ai embarqué comme mousse. J’ai

tout de suite adoré ! » Devenu patron, il traque homards, crabes et crevettes roses le long des côtes. Souvent rentré chez lui tard le soir, il dit toutefois : « Avec cette pêche, une vie de famille est possible. » Mais pas sans péril : « La crevette, par gros temps, c’est dangereux. On navigue près des rochers, on peut chavirer à tout moment. » À croire qu’il a transmis le gène de la témérité : ses deux fils ont repris la Cassiopée, le caseyeur sur lequel il a longtemps navigué.

Les plages, elles, abritent encore des cabines façon années 1950. Au Croisic, les anonymes ont remplacé Honoré de Balzac et Alfred de Musset, qui y venaient en villégiature. « Après la créa- tion de La Baule, la ville est passée d’un tourisme aristocratique à une fréquen- tation familiale et médicale », éclaire Laurent Delpire. L’été, la population est multipliée par six. Certains échappent à la foule en embarquant par le bac vers Pen Bron, isthme sableux entre terre et océan. Mais le regroupement semble la règle dans ces villages, où les mêmes se retrouvent d’une année sur l’autre. C’est le cas à Piriac-sur-Mer, adorable bourg au bout de la Côte d’Amour. Des

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venelles bordées de maisons chaulées ou en granit – voir la splendide ruelle des Mouettes! -, des hortensias, un port de plaisance, des restaurants…, il règne un entre-soi secret, avec des vacanciers de bonne compagnie. Reste la pêche. Plus discrète, elle raconte une autre histoire. Au Croisic, la sardine, évanouie dans les années 1960, a fait place à la coque. C’est le premier

centre d’élevage en France. S’y ajoute de la pêche côtière : crevettes roses, homards, crabes… La Turballe, 8 e port de pêche français, est plus éclectique. Les 50 bateaux (chaluts pélagiques, de fond, palangres) capturent sar- dines (1 er port de France), thons blancs, anchois, merlus… Une « enclave » populaire et bretonnante comme le témoignage ultime de ce littoral pluriel.

Maisons anciennes, ruelles pavées, et placette arborée disent toute la délicatesse de Piriac- sur-Mer, labellisé « Petite Cité de caractère »

206 / Mars 2018 / www.detoursenfrance.fr

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