La Presse Bisontine 87 - Avril 2008

ÉCONOMIE

38

La Presse Bisontine n° 87 - Avril 2008

EN BREF

MODÈLE

Peu développé en Franche-Comté

À l’exception du monde agricole, le modèle coopératif est peu présent dans les autres pans de l’économie locale. Pourtant, cette façon de fonctionner présente un certain nombre d’avantages. Un système marginal mais qui fonctionne COOPÉRATIVES : LA SOLIDARITÉ AU CŒUR DE L’ENTREPRISE

Philo Folies’ Les Philo folies’, c’est une entrée inédite dans la philosophie, par le rire, la joie et la poésie. C’est le pari d’Yves Cusset que de mettre l’humour au service de l’étonnement philosophique et de faire du rire l’arme de la pensée. À voir au Gymnase, “Le Remplaçant” et au théâtre Bacchus “Rien ne sert d’exister” et “L’abécédaire philosophique”. Renseignements au 03 81 65 71 65 et au 03 81 82 22 48. Théâtre L’atelier théâtre du centre diocésain de Besançon présente “La vie qui va… De Mauriac à Trénet”, un spectacle théâtral et musical conçu par Pierre Louis à partir des chroniques (1948- 1955) de François Mauriac et des chansons de Charles Trénet. Au centre diocésain jeudi 17, vendredi 18 et samedi 19 avril à 20 h 30. Renseignements au 03 81 65 17 17.

B anque, assurance, agriculture, bâtiment, indus- trie, imprimerie, commerce, paramédical, dans tous ces secteurs économiques on trou- ve des entreprises coopératives. Les plus emblématiques d’entre elles sont par exemple le Groupe Crédit Agricole, les établissements E.Leclerc, le groupe Intersport ou encore Promafrance (Big Mat). Malgré ces références, le mode coopératif a du mal à trouver sa place en Franche-Comté contrairement aux régions Rhône-Alpes, Bretagne ou Bourgogne. Rares sont les créateurs d’entreprises à se tourner vers ce modèle estimé trop proche pour certains d’une idéo- logie communiste. C’est une évidence, quelle que soit la forme juridique qu’il prenne, le système coopératif repose sur un grand principe : “Une personne = une voix.” Cela signifie que les acteurs d’une entreprise en sont non seulement les salariés mais ils peuvent aussi en être actionnaires (comme dans une société coopérative). Le destin de la structure n’est donc plus entre les mains d’une seule personne mais de plusieurs. La principale critique qui est faite à cette manière de fonctionner est justement l’absence d’un patron déci-

sionnaire, réactif, qui définit une stratégie. La multi- plication des voix autorisées à se prononcer dans une coopérative peut entraîner son immobilisme en cas de divergences de points de vue. Un argument que réfute Grégory Myotte-Duquet qui avec sept autres partenaires vient de créer une coopérative d’artisans pour construire des maisons ossature bois. “La coopé- rative fonctionne à partir du moment où il y a un bon

marché. Ce qu’elle rejette c’est l’économie financiarisée, opaque où l’argent va à l’argent” observe François Baulard, délégué général de la chambre régio- nale de l’économie sociale et solidai- re (C.R.E.S.S.). Les premiers à bénéficier des profits de la société sont les salariés et les salariés associés. “Dans 98 % des Scop, 45 % des bénéfices sont redistribués aux salariés et 10 % aux salariés qui sont associés à la société. 16 % sont systématiquement provisionnés. Cette réserve n’est pas partageable. Si l’entreprise s’effondre, ce capital repar- tira à d’autres Scop” poursuit Domi- nique Foncelle. Cette réserve obliga-

François Baulard, délégué général de la chambre régionale de l’économie

chef de file. Il y a un gérant qui déci- de des orientations à prendre au quo- tidien. Seules les grandes décisions qui impliquent des investissements lourds sont prises en assemblée géné- rale” explique-t-il. Le leader a donc sa place pour condui- re un projet collectif qui profite à chacun. “La difficulté est souvent de trouver le bon dirigeant. Si effecti- vement la politique de celui-ci ne vous convient pas, vous pouvez la remettre en cause. La place de responsable est difficile à tenir car on peut toujours vous demander des comptes” remarque Dominique Foncelle, direc- trice de l’Union régionale des socié- tés coopératives de production (U.R.S.C.O.P.). Fonctionner en coopérative n’interdit pas d’être compétitif et de réaliser des profits, au contraire. “C’est le principe démocratique qui guide la société. L’argent est perçu comme un moyen pour la faire fonctionner. L’économie sociale, au service de l’homme, revendique l’économie de

“45 % des bénéfices sont redistribués aux salariés.”

sociale et solidaire.

toire de 16 % exonère en revanche les sociétés coopératives de production de taxe professionnelle. Ce modèle n’empêche pas non plus qu’il y ait des écarts de salaire dans l’entreprise en fonction des respon- sabilités de chacun. Les promoteurs du principe coopératif estiment aus- si qu’il est lemieux adapté à la transmission d’entreprise. Contrairement à une société qui s’écroule quand son fondateur s’en va, la coopérative perdure du fait de l’implication de chaque salarié qui a intérêt à voir se pérenniser l’activité. T.C.

Besançon

Il choisit le modèle Scop sans hésiter En choisissant de se mettre à leur compte dans le domaine de la couver- ture-zinguerie, Fabrice Daval et sa partenaire Anne Fontaine ont choisi de s’associer sous le modèle de la société coopérative de production.

“J e travaille à la hauteur de ce que je suis payé.” Désabusés, des ouvriers du bâtiment se livrent parfois à cette confidence. Cer- tains s’interrogent sur l’intérêt de se déme- ner pour l’entreprise qui les emploie en n’ayant en retour qu’un salaire moyen. C’est cette usure, ce doute qui conduit pro- gressivement à la démotivation du salarié que Fabrice Daval veut éviter en se mettant à son compte dans le secteur de la couver- ture-zinguerie. Il a donc créé “La Bisontine de couverture” avec son associée Anne Fon- taine sous le statut de Scop (société coopé- rative de production). Le choix de cette for- me juridique ne faisait aucun doute dans l’esprit des deux entrepreneurs. “Il me semble que si quelqu’un veut vraiment s’investir dans une société, il faut qu’il puisse en retirer les fruits” remarque Fabrice Daval, gérant de la Scop. Cette conception du travail qui repose sur un partage des richesses n’est pas “archaïque” selon lui, contrairement à ce que quelques- uns lui ont laissé entendre avant qu’il se lan- ce dans cette aventure. “Au contraire, ce qui est séduisant dans ce système, c’est que cha- cun est rémunéré pour le travail qu’il effec- tue. Les profits sont redistribués à l’ensemble des salariés. Il n’y a plus d’un côté un chef d’entreprise qui récupère les dividendes et de

l’autre des employés. C’est une autre maniè- re d’appréhender la société.” Tous les acteurs de la Scop ont donc intérêt à pagayer dans le même sens pour faire avancer le navire. Les statuts de La Bisontine de couverture sont à peine déposés que déjà Fabrice Daval et sa partenaire envisagent d’intégrer une troisième personne dans la structure. Toute la difficulté dans le recrutement est d’éviter l’erreur de casting, car le nouveau collabo- rateur devient un associé s’il l’accepte. À partir du moment où dans ce modèle éco- nomique une voix égal une personne, “il vaut mieux partir avec des gens en qui on a confian- ce.” Car en cas demésentente dans l’association parfaite, le développement de l’entreprise peut s’en trouver contrarié faute de pouvoir prendre des décisions. “Quand on va se déve-

lopper, chaque personne qu’on va intégrer dans la Scop devra savoir à quels avantages elle a droit. Elle devra comprendre aussi quel intérêt elle a à s’investir.” Fabrice Daval a confiance en ce mode de fonctionnement qui a fait ses preuves. Il entend ins- crire l’entreprise dans la péren- nité et faciliter sa transmission grâce à au statut même de la société coopérative. n

“C’est une autre manière d’appréhen der la société.”

Made with FlippingBook - Online Brochure Maker