Journal C'est à dire 210 - Mai 2015

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D O S S I E R

Débat

Les communes menacées ? 36 000 communes. Un chiffre et une fragmentation du territoire national qui font débat depuis des décen- nies en France. Beaucoup de tentatives de fusion ont été menées. Sans succès jusqu’à aujourd’hui. Et voilà qu’une nouvelle loi remet le dossier sur la table…

communes. Il s’est même trouvé des députés pour soutenir l’abandon de bâtiments com- munaux. Tout un symbole. Notre pays se portera-t-il mieux avec l’application de cette loi ? Le citoyen y verra-t-il plus clair ? Fera-t-on des économies ? Je ne le crois pas et c’est la raison pour laquelle, comme moi, le groupe U.M.P. votera résolument contre son adoption.” Le débat est lancé entre les par- tisans des 36 000 communes, élus ruraux dans leur grande majorité, et les autres…

“N ous contestons que la commune soit dissoute à terme dans l’intercommunalité.” Pour l’association des maires ruraux, la question est tranchée, très attachés que sont ces élus à cet échelon de proximité qu’est la commune “souvent l’ultime ser- vice public de nos villages.” Pré- sident national des maires ruraux, Vanik Berbérian pour- suit : “Chacun voit bien que la volonté politique est d’installer dans le paysage territorial des collectivités locales qui dépassent et se substituent aux communes.” Point de vue également défen- du par Annie Genevard, dépu- tée et vice-présidente de l’association des maires de Fran- ce qui s’est exprimée ainsi à la tribune de l’assemblée nationale au sujet de la contestée loi N.O.T.R.E. (Nouvelle Organisa-

tion Territoriale de la Répu- blique) : “L’aspect le plus contestable de votre loi, c’est le pas fatal que vous faites sur le chemin de la disparition des communes… affaiblies par la baisse des dota- tions qui n’a pas fini de produire ses effets ravageurs sur l’économie locale, les communes sortent exsangues. Et la goutte qui a fait déborder le vase, c'est l’élection ra désormais l’intercommunalité, dont vous changez la nature. Avec une fiscalité propre, une cir- conscription électorale, le suf- frage universel direct et des com- pétences renforcées. Ce sera une collectivité de plus dans un pay- sage que l’on voulait simplifier, et au passage, vous organisez sans le dire la disparition des au suffrage universel direct des conseillers communautaires à horizon 2017. Dites- nous ce qui distingue-

Disparition des services Adieu mon Trésor… Au service des contribuables, les agents du Trésor Public sont aussi des alliés importants des collectivités pour qui ils travaillent dans l’ombre en assurant de l’encaissement des recettes via les différentes taxes et impôts locaux ou encore en payant les entreprises qui agissent pour leur compte.

Une loi qui inquiète les élus ruraux.

A u cœur de l’actualité, il y a deux ans, la trésorerie du Russey n’est pas enco- re sauvée. “Nous l’avons appris par la presse à l’occasion d’une alerte lancée par les organisa- tions syndicales” expliquait à l’époque le maire Gilles Robert. Un rendez-vous auprès de la direction régionale des finances publiques avait été obtenu, admi- nistration qui s’était d’emblée

nel compétent, à l’écoute et qui a une lourde charge de travail” constate le maire qui espère que le bon fonctionnement général de la Maison des Services sera un atout pour y conserver long- temps encore la trésorerie. Plus bas dans le Pays Horloger, à Saint-Hippolyte, l’inquiétude se trouve renforcée par le récent départ en retraite d’un agent de cette administration qui n’a pas

Le bon fonctionnement de la maison des services du Russey convaincra-t-il la direction des finances publiques d’y maintenir ses services comme l’espère le maire ?

montrée relativement rassurante. “Pas de fer- meture pour l’instant, néanmoins, un problè- me de fonctionnement

été remplacé. Souvent un mauvais présage qui devient prétexte. “C’est le suivi des usa- gers contribuables qui

centre et Jean-Jacques Vendit- ti, président de la communau- té de communes. Car au-delà du service aux habitants, il ne faut pas oublier que ces fonction- naires assurent le paiement des factures des collectivités et l’encaissement aussi. Un servi- ce de proximité qui, s’il dispa- raît, peut devenir moins effica- ce et mettre à mal la trésorerie au sens comptable des collec- tivités comme des entreprises

prestataires. Des arguments selon eux à prendre en consi- dération, loin de tout raisonne- ment en termes de rentabilité “qui n’est pas approprié à la mis- sion d’un service public.” Et les deux élus de conclure : “On a un vrai sentiment d’abandon quand on est élu rural. Mais notre rôle est de nous battre au quotidien pour nos concitoyens qui méri- tent les mêmes services qu’en vil- le.”

Des départs non remplacés…

est posé. Notre démarche est exploratoire mais il n’y a aucun projet.” Deux années ont pas- sé et l’inquiétude demeure pour ce service qui fonctionne au Rus- sey avec un chef de centre par- tagé avec le bureau de Morteau et un autre agent. “Un person-

est en question mais aussi la ges- tion de nos collectivités avec par exemple des répercussions sur les délais de paiement des dépenses publiques ou le recou- vrement pour les communes” expliquent Serge Cagnon, mai- re et conseiller général du bourg-

La mairie est souvent le dernier service public de proximité pour les habitants des villages.

Réaction

“On doit soit se débrouiller seul” Quatre questions à Daniel Cassard, président de l’association des maires ruraux (A.M.R.) du Doubs.

au privé et le prix n’est plus le même… Quant à l’urbanisme, la loi oblige certaines commu- nautés de communes à prendre cette compétence, donc à créer un service spécifique qui lui aus- si a un coût ! Càd : Globalement, comment un maire rural peut agir pour maintenir des services acceptables ? D.C. : Avec l’A.M.R., on se bat depuis des années pour instal- ler des points visio-publics pour que les habitants aient accès à des administrations comme la Sécurité sociale ou Pôle Emploi. Certes c’est virtuel, mais on a quand même quelqu’un en face de soi via l’écran. Un équipe- ment très développé enAuvergne par exemple mais on note ici une certaine frilosité des adminis- trations. C’est nouveau, une autre façon de travailler qui doit s’imposer. Recueilli par D.A.

C’ est à dire : Rappelez- nous ce qu’est l’A.M.R. et quel est son rôle ? Daniel Cassard : L’Association des Maires Ruraux de France fédère, informe et représente les maires des communes de moins de 3 500 habitants partout en France. L’association s’engage au quotidien au niveau local comme national pour défendre et promouvoir les enjeux spécifiques de la ruralité. C’est un repré- sentant incontournable du monde rural auprès des pouvoirs publics et des grands opérateurs nationaux. Càd : Quels sont les princi- paux dossiers qui vous ont occupés ces derniers mois ? D.C. : Encore et toujours La Pos- te avec qui nous ne cessons de

discuter pour trouver des solu- tions acceptables pour les habi- tants de nos communes face à la baisse évidente de fréquen- tation des bureaux. Quant aux risques pesant sur certaines gen- darmeries, tout en restant vigi- lants, on note que des renforts

arrivent ici ou là… Une nécessité quand on sait que la délinquance exis- te aussi en milieu rural. Càd : L’élu que vous êtes déplore aussi la fin de certains autres services ?

“On se bat depuis des années pour installer des points visio- publics.”

D.C. : Oui, je pense notamment à l’aide à la maîtrise d’ouvrage dont nous bénéficions sur de petits chantiers par les services de l’État pour une participation financière modique. Aujourd’hui c’est fini, on doit soit se débrouiller seul ou faire appel

Daniel Cassard représente les maires ruraux du Département (photo archive Càd).

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