Journal C'est à Dire 137 - Novembre 2008

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D O S S I E R

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“Il est important que les partisans des accords bilatéraux se mobilisent” Michel Charrat, le président du Groupement Transfrontalier Euro- péen, ne croit à une volte-face des Suisses dans les accords bilaté- raux. Il évoque aussi les problématiques transfrontalières qui peuvent peser sur les relations entre nos deux pays. Commentaire

C’ està dire:La Suissedoit cesser de reverser à l’U.N.E.D.I.C.lescotisa- tions chômage des frontaliers. Qu’en est-il decettemesure? Michel Charrat : Tout d’abord, je rappelle que cette mesure est sans conséquence pour les tra- vailleurs frontaliers.Ensuite,elle est le résultat de l’application du droit européen.Il était prévu que la rétrocession s’arrête le 1 er juin 2009. Je ne peux pas l’accepter. En 2007, ce sont un peu plus de 144 millions de francs suisses qui ont été reversés par la Suisse à l’U.N.E.D.I.C.française. C’est une question d’éthique et de solida- rité vis-à-vis des Français. Il ne serait pas normal que demain les frontaliers puissent bénéficier d’un système auquel ils ne coti- seraient plus. Cela faitquatreansque j’aienga- gé une action auprès des parle- mentaires pour qu’ils agissent avec le gouvernement au niveau européenafinque laSuisseconti- nue de verser ces cotisations. L’Italie, qui est dans la même situation que la France,en a fait de même. Aujourd’hui, l’Europe est de notre côté et la balle est dans le camp de Berne.En fonc- tion de ce que les Suisses déci- deront, nous verrons comment nous agirons. Càd : Observez-vous un ralen- tissement de l’économie suis- se qui pourrait conduire à des

suppressions d’emplois ? M.C. : Pour moi, il n’y a pas de signes alarmants.En règle géné- rale, l’économie suisse se com- porte plutôt mieux que celle des autres pays européens. Dans l’immédiat, il n’y a pas de pro- blème particulier, mais person- ne ne peut dire si la Suisse est à l’abri de la crise. Càd : En février prochain, les Suisses devront se prononcer sur la reconduite ou non des accords bilatéraux. Faut-il redouter que la dégradation de la conjoncture internatio- nale donne du crédit à ceux qui s’opposent à ces accords ? M.C. : Ce serait une folie pour la Suisse et son économie si les sept accords bilatéraux n’étaient pas reconduits.Il n’est pas exclu que la crise pèse sur le référendum. Il peut y avoir un retournement. Mais selon moi, ce scénario est peu probable, car la Suisse a besoin de la libre circulation des personnes. Néanmoins, il est important que les partisans hel- vètes des accords bilatéraux se mobilisent.Le plus dangereux en ce moment,c’est que nous avons trop tendance à taper sur la Suis- se et son système fiscal.C’est une mauvaise stratégie qui peut conduire ce pays à se replier sur lui-même et à faire cavalier seul. Càd : Cette fiscalité avanta- geuse qui sert le dynamisme

de l’économie helvétique pro- vient notamment de l’arrêté Bonny. L’Europe demande à ce que sa suppression soit confirmée pour revenir à une situation fiscale plus équili- brée entre nos deux pays. Qu’en est-il vraiment ? M.C.: L’arrêtéBonnyesttoujours en discussion au niveau des ins- tances européennes. Mais, je le répète, ce n’est pas une bonne stratégie de se servir de la fis- calité pour critiquer la Suisse.Je crois au contraire que les dépar- tementsdoiventtrouver lemoyen de jouer gagnant-gagnant avec cepays.Quand jevoisqu’ilsecrée des chambres de commerce et de l’industrie transfrontalières,c’est la preuve qu’il est possible de construire ensemble. Càd :La Suisse resteunechan- ce pour les régions fronta- lières ? M.C. : Nous avons la chance d’avoir la Suisse qui tient enco- re bon. Nous sommes à un car- refour de l’Europe. C’est une richesse que nous devons faire fructifierpour lebien-êtredetous. L’emploi frontalier induit de l’emploi sur le territoire français. Il y a des retombées actives sur le territoire. Je suis navré par- fois d’entendre que dans cette région on préfère un Franc-Com- tois au chômage qu’un Franc- Comtois frontalier. Propos recueillis par T.C.

Michel Charrat : “Ce serait une folie pour la Suisse et son économie.”

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