Journal C'est à Dire 137 - Novembre 2008

S O C I É T É

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“La mort est un business” Depuis 16 ans, l’Association Française d’Information Funéraire (A.F.I.F.) lutte contre les abus de certains professionnels du funéraire et informe gratuitement les familles sur les pièges à éviter et les démarches à effectuer. Les abus existent jusque dans la tombe. Toussaint

C’est à dire : Michel Kawnick, pourquoi avoir créé l’A.F.I.F. ? N’est-ce pas un peu lugubre ? Michel Kawnick : Nous sommes six, en aucun cas des professionnels du funéraire et en 1992, nous avons décidé de nous lancer pour dénoncer cer- tains scandales dont personne ne parle et permettre à tout un chacun d’avoir connaissance de la législation, des pratiques et tarifs. Nous sommes totalement indépendants. Concrètement, on propose une permanence télé- phonique 24 heures sur 24 et toutes les infos (jusqu’aux for- mulaires-types à envoyer aux différents organismes suite à pas par goût du morbide que nous existons mais pour per- mettre aux familles d’obtenir aide et information.Après cha- cun fait comme il veut ! Càd : De vrais pièges exis- tent-ils dans le domaine du funéraire et des obsèques ? M.K. : Absolument. Les prix peuvent varier de 1 à 3. Il est essentiel de demander des devis aux entreprises de pompes funèbres. Il y a trois questions très simples à poser : le prix d’une inhumation ou d’une cré- un décès) sont dispo- nibles gratuitement sur notre site Internet. Nous enregistrons 4 000 connexions par jour dont 50 % de France. Ce n’est

mation, celui du cercueil et le coût du corbillard et des por- teurs. Si on refuse de vous répondre, raccrochez. Il est pré- férable d’opter pour une socié- té qui accepte la transparence de ses prix.Avant qu’une famil- le se déplace, elle doit avoir en poche au moins deux devis écrits. Nous pouvons contrôler s’ils sont conformes et ne contiennent pas de prestations abusives. Nous examinons les documents et ne voulons jamais connaître le nom de l’entreprise. Càd : Vous êtes également très attentifs aux éventuelles ententes entre les centres de soins et les sociétés de pompes funèbres ? l’urgence alors qu’il n’y en a pas. La loi prévoit la gratuité de l’hébergement du corps dans un centre de soins pendant trois jours, qu’il ait ou non une chambre mortuaire. Or, dans beaucoup d’établissements, on appelle la famille pour qu’elle effectue le transfert au plus vite. Résultat, le centre de soins fait des économies de locaux,de sala- riés et de matériel, la société de pompes funèbres s’enrichit tan- dis que la famille doit faire face à un surcoût. Des condamna- tions font aujourd’hui juris- M.K. : Elles sont en effet très courantes. On joue la carte de

prudence.

Càd : Comment êtes-vous per- çu ? M.K. : On est très apprécié des familles et organismes de défen- se des consommateurs. Beau- coup de S.M.U.R. et de S.A.M.U. donnent aujourd’hui nos coor- données aux familles. La dépen- se funéraire est le troisième pos- te budgétaire d’une famille après l’habitat et la voiture. Si on peut éviter des prestations inutiles et permettre des économies, tant mieux. Les professionnels en revanche nous détestent. Sur le site, on peut voir que beaucoup ne communiquent pas leurs tarifs. Càd : Vous affichez claire- ment votre volonté de taper du poing sur la table en matière d’économie mais aus- si d’écologie ? M.K. : On dénonce et on sen- sibilise. Ainsi, alors que depuis 1998 le cercueil en carton (moins cher et plus écologique) est agréé et fabriqué en Suisse et en Alle- magne, il est introuvable en France. On vous dit qu’il est inconnu ou indisponible tout simplement parce que les pompes funèbres se sont enten- dues pour ne pas qu’on en par- le ! L’autre grand dossier concer- ne la pollution engendrée par les crématoriums. En France, aucune législation n’existe. Sans

Réaction L’U.F.C.-Que Choisir dénonce L’association de défense des consommateurs réagit contre l’explosion des coûts du “marché de la mort”. Le coût des obsèques est aujourd’hui de 3 900 euros en moyen- ne, soit 35 % de plus qu’il y a dix ans ! Cette augmentation ne serait pas justifiée par les règles de marché, mais par une absence de concurrence entre les opérateurs funéraires. L’enquête menée par l’U.F.C.-Que Choisir et ses associations locales dans plus de 80 départements révèle ainsi qu’il est impossible de comparer les services fournis par les entreprises de pompes funèbres tant les pratiques abusives sont nom- breuses et indécelables pour les familles endeuillées. Les opérateurs funéraires refusent d’établir un devis confor- me à la loi dans un cas sur trois, les prestations proposées man- quent de précisions (prestations facultatives ou obligatoires, nombre de porteurs, qualité du cercueil…), ce qui permet des écarts de prix allant jusqu’à 1 100 % pour des hono- raires de représentation ! Enfin, le mode de gestion des chambres funéraires, dernier lieu de recueillement des familles, donne lieu à de nombreux abus de position dominante par les opérateurs funéraires sans que les sanctions du conseil de la concurrence soient réelle- ment dissuasives.

Michel Kawnick préside une association indépendante, pas vraiment appréciée des sociétés de pompes funèbres.

“On dénonce et on sensibilise.”

filtre à dioxine, métaux lourds ou mercure, les crématoriums sont responsables d’un empoi- sonnement légal. Aujourd’hui, grâce à la mobilisation des habi- tants et associations, les nou- veaux crématoriums sont équi- pés. C’est important de respec- ter la planète et les vivants.

Propos recueillis par A.B.

www.afif.asso.fr 01 45 44 90 03

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