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LA VIANDE DE BROUSSE
Le trafic de viande de brousse est l’une des principales causes du
déclin des populations de gorilles. Si les gorilles sont parfois les
cibles de choix des chasseurs de viande de brousse, ils représentent
aussi parfois simplement un grand animal commode à chasser, ou
les victimes involontaires de pièges visant d’autres animaux tels
que les antilopes ou les buffles.
Au Congo, dans les années 1980, la chasse destinée à nourrir les
ouvriers travaillant dans les camps de bûcherons était considérée
comme la principale cause du problème. Selon le Département
des forêts, on dénombrait alors 500 chasseurs, chacun ayant la re-
sponsabilité de nourrir dix personnes. Par conséquent, la chasse
de la faune sauvage faisait vivre 5’000 travailleurs des zones
d’exploitation forestière. Dans certaines régions du Congo, il a été
rapporté que les gens préféraient la viande de gorille à toute autre
viande et que s’ils le pouvaient, ils ne mangeraient « que des go-
rilles, allant même jusqu’à tuer dix gorilles par battue » (rapporté
par Redmond, 1989).
La viande de gorille a toujours fait partie du régime alimentaire
de nombreuses tribus partageant la forêt avec les grands singes.
Par exemple, la tribu Fang, en Guinée-Équatoriale, mange de nom-
breux grands primates (Sabater Pi et Groves, 1972) et cela semble
être le cas de la plupart des peuples habitant les forêts et vivant
de chasse. Les coutumes traditionnelles des populations à faible
densité ne débouchent habituellement pas sur des problèmes de
conservation. De fait, le nombre de primates décline lorsque leurs
populations sont fragmentées du fait du défrichement des forêts
et du développement, et quand la chasse devient une activité com-
merciale visant à livrer des produits (habituellement la viande)
aux principales zones d’habitation humaine, accédant ainsi à un
marché pratiquement illimité. Au Gabon, où on mange aussi de
la viande de gorille, les ouvriers d’une petite mine de fer de Bel-
inga auraient consommé 24 tonnes de viande provenant des forêts
chaque année (Harcourt et Stewart, 1980). Ce chiffre paraissait im-
portant à l’époque, mais depuis ces premières études, la quantité
de viande de brousse enregistrée dans les marchés urbains le long
du bassin du Congo a atteint des niveaux stupéfiants ; en effet, des
chercheurs ont estimé que plus de cinq millions de tonnes de vi-
ande de brousse sont vendues chaque année (Wilkie et Carpenter,
1999; Fa et al., 2002). De nombreux facteurs ont une influence
sur le trafic de la viande de brousse, parmi lesquels la topographie,
les infrastructures, l’accès au marché, les tabous, les religions, la
facilité d’accès aux armes et les saisons de chasse (Bowen-Jones &
Pendry, 1999).
BRACONNAGE ET TRAFIC
DE VIANDE DE BROUSSE