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Les gorilles figurent en Annexe I de la Convention sur le commerce
international des espèces de faune et de flore sauvages menacées
d’extinction (CITES). Il en découle que le trafic international de
gorilles à des fins commerciales est totalement interdit. CITES est
une convention liée au commerce, et en conséquence, n’aborde
pas les nombreux dangers auxquels fait face cette espèce comme
la perte d’habitat, les maladies, les conflits avec les hommes ou
encore la consommation de leur viande. Le rôle principal que
joue la CITES en faveur de la conservation des gorilles se situe au
niveau de la lutte contre les mouvements transfrontaliers illégaux
d’animaux vivants, de certaines parties de leur corps, ou de produ-
its dérivés. Bien qu’on soupçonne l’existence d’un trafic interna-
tional de viande et de morceaux de gorille, il semble très limité
et cantonné aux Etats limitrophes de ceux où vivent des gorilles.
Le gorille n’est donc pas victime du trafic intercontinental comme
c’est le cas pour de nombreuses espèces listées auprès de la CITES.
LE TRAFIC ILLÉGAL ORGANISÉ
DE GORILLES VIVANTS
Au niveau international, le commerce de gorilles est principale-
ment tiré par les zoos ou les installations se décrivant elles-mêmes
comme telles et par les personnes possédant des collections
privées d’espèces rares. L’Asie du Sud-Est et le Moyen Orient font
partie des destinations favorites de ce type de commerce. La con-
trebande de gorilles, du fait de leur taille, de leur poids et de leur
violence face aux hommes, est difficile à mettre en place. Ainsi, la
contrebande concerne le plus souvent des juvéniles. Cependant,
retirer de jeunes gorilles de la nature nécessite invariablement le
massacre de leurs mères, et parfois même d’autres membres du
groupe familial. C’est donc un acte particulièrement destructeur
pour l’espèce dans son ensemble. Par exemple, plusieurs jeunes
gorilles de plaine, non originaires des Virunga, ont été retirés de
leur population locale et retenus dans un sanctuaire d’urgence
construit au siège du parc national des Volcans, laissant à penser
que ce trafic est bien réel. Malheureusement, certains des cas de
contrebande de gorilles qui ont attiré l’attention du public impli-
quent le contournement délibéré des contrôles de la CITES par les
instituts zoologiques et la corruption des fonctionnaires nationaux
de la CITES ; c’est-à-dire les institutions et personnes mêmes qui
devraient au contraire travailler à la protection de ces animaux.
Fin 2006, la CITES a créé le « Great Ape Enforcement Task Force »
(Groupe de travail pour la répression concernant les grands singes)
de la CITES. Elle réunit les représentants des Etats d’Afrique et
d’Asie où vivent les gorilles, des secrétariats du GRASP et de la
CITES, INTERPOL, du Groupe de travail sur l’Accord de Lusaka et
de l’Organisation mondiale des douanes (OMD). Le Groupe de tra-
vail a échangé des informations sur le trafic illégal et s’est engagé
à en obtenir davantage.
À la suite de recoupement d’informations relatives au commerce
illicite de grands singes, le secrétariat de la CITES a consacré l’une
de ses alertes à cette problématique. Les alertes de la CITES sont
distribuées à travers la communauté du maintien de l’ordre et
fournissent des renseignements afin d’aider à cibler les contre-
bandiers. Elles fournissent aussi des informations concernant les
techniques de dissimulation, les routes de contrebande, les négo-
ciants illégaux, etc. Le Groupe de Travail a reconnu que, dès lors
que la possession de primates comme animal de compagnie est as-
sez répandue dans certaines régions du monde, les grands singes
Un grand nombre de primates capturés pour alimenter le trafic
meurent, même s’ils sont remis en liberté. Les estimations sug-
gèrent que pour chaque chimpanzé, gorille ou bonobo entrant
sur le marché des animaux de compagnie, 10 à 50 d’entre eux
auront préalablement péri dans les camps de chasse ou sur le
chemin des villes (IFAW & BCTF, 2003).
Redmond (2002a) utilise un multiplicateur de 15 gorilles arra-
chés à leur population pour chaque jeune gorille qui arrive à un
endroit où on peut le traiter convenablement, en se basant sur
les 80% de mortalité des jeunes gorilles arrivant à l’orphelinat
pour gorilles de Brazzaville avant 1989, lorsque de nouvelles
techniques vétérinaires abaissèrent ce taux à deux adultes par
jeune gorille. Ce qui donne : (1 jeune gorille + 2 adultes) x 5 = 15
gorilles, un vivant et 14 morts. Cela signifie que les six gorilles
qui, selon des informations rapportées, ont été détenus au zoo
d’Ibadan avant leur chargement sur le Taiping Four représen-
taient probablement 84 gorilles morts et 90 perdus pour la
population sauvage (Ape Alliance, SMPA, 2006.)