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Les résultats de l’expérience des Virunga sont largement positifs
comme le démontre l’augmentation du nombre de gorilles de
montagne au cours des quinze dernières années, malgré la guerre
civile qui touche la région, et alors que les populations d’autres
mammifères ont diminué. Ce succès peut être attribué en partie
à la collaboration transfrontalière renforcée mise en place par les
trois pays et le potentiel des gorilles comme source de revenus
pour la région (Lanjouw et. al 2001, Plumptre, 2007). Mais cette
coopération a d’autres retombées positives : lorsque les relations
politiques entre les trois pays étaient difficiles, la coopération tech-
nique entre les trois autorités de la zone protégée ne s’est pas ar-
rêtée. En fait, en parvenant à faire collaborer des Etats dont les rela-
tions sont difficiles, la conservation des gorilles fait souvent office
d’objectif commun de coopération et de consolidation de la paix
sur lequel il est plus facile de s’accorder. En 2002, l’éruption du
volcan Nyiragongo, situé près de Goma en République Démocra-
tique du Congo, nous en fournit un autre exemple. Lorsqu’une
grande partie de la ville de Goma fut détruite par la lave, la collabo-
ration entre les différents partenaires de conservation à l’intérieur
et à l’extérieur de la RDC contribua à diffuser rapidement l’aide
humanitaire.
L’expérience satisfaisante du travail transfrontalier effectué dans
les Virunga encouragea les trois gouvernements à étendre leur col-
laboration dans le domaine de la conservation des gorilles de mon-
tagne à toute la région des Virunga, incluant un certain nombre de
parcs nationaux et de réserves dans les trois pays. Afin de faciliter
la mise en œuvre du plan transfrontalier, y compris la création
d’un réseau transfrontalier de zones protégées, un Secrétariat fut
établi à Kigali, Rwanda, en 2008.
Le Paysage trinational de la Sangha est un autre exemple de pre-
mier plan de collaboration transfrontalière et est tout aussi impor-
tant pour la conservation des gorilles. Ce paysage comprend trois
parcs nationaux : Lobéké au Cameroun, Dzanga Ndoki en Répub-
lique Centrafricaine et Nouabalé Ndoki en République du Congo.
Le Paysage trinational de la Sangha a été formalisé en 2000 lorsque
les trois gouvernements s’accordèrent pour gérer ensemble le pay-
sage. En y incluant les zones tampons environnantes, ce paysage
accueille les plus importantes populations d’éléphants de forêt et
de gorilles d’Afrique. Lors du Sommet des chefs d’Etat organisé
à Brazzaville en février 2005, les trois gouvernements sont par-
venus à un accord visant à faciliter les opérations transfrontières
de lutte contre le braconnage. En mars 2007, une nouvelle étape
a été franchie avec la constitution d’un fonds d’affectation spécial
destiné à assurer le financement des activités de conservation sur
le long terme.
Le Paysage trinational de Dja-Minkebe-Odzala (TRIDOM) com-
prend quatre parcs nationaux, une réserve de faune et un parc na-
tional en instance d’officialisation. Les quatre parcs nationaux sont
le parc national de Minkebe, le parc national de l’Ivindo et le parc
national de Mwagna situés au Gabon et le parc national d’Odzala-
Kokoua au Congo, la réserve de faune du Dja et le parc national en
instance d’officialisation de Boumba Bek-Nki se trouvant quant à
eux au Cameroun. La région accueille de nombreuses espèces de
grands mammifères parmi lesquelles l’éléphant de forêt d’Afrique,
le gorille des plaines de l’ouest et le chimpanzé. En 2005, un ac-
cord de coopération transfrontalière TRIDOM a été finalisé entre
le Cameroun, le Gabon et la République du Congo.
Le gorille de Cross River est la sous-espèce de gorille la plus
menacée. La création du parc national de Takamanda au Camer-
oun représente l’aboutissement de nombreuses années de travail
mené par la Société de Conservation de la Faune et de la Flore et le
Ministère des Forêts et de la Faune camerounais. Le nouveau parc
forme ainsi une importante zone transfrontalière protégée avec le
parc national de la rivière Cross au Nigéria, protégeant ainsi en-
LA COLLABORATION TRANSFRONTALIÈRE: UN
OUTIL DE CONSERVATION DE LA BIODIVERSITÉ
ET DE PROMOTION DE LA PAIX ?