Cliff_30_ans

INVESTISSEURS L’existence d’une tribu Homo investisoris est attestée dès le Moyen Âge. Ce cousin évolué de l’ Homo sapiens se prête volontiers à la mise en commun de capitaux dès lors qu’il souhaite entreprendre un projet d’envergure. À l’époque Moderne, il délaisse le troc de poteries pour la Bourse, et son ambition consiste généralement à choisir le bon cheval pour terminer l’année sur un podium. Le « bon cheval » est une espèce animale assez communément répandue, mais qui vivait en semi-liberté jusque dans les années 1990 du XX e siècle. Le Grand Ordonnateur Euronext a alors organisé de grands rassemblements prononcés « wrodchow » pour favoriser la domestication. Avant la Grande Année du Chaos 1987, nul TPI n’identifiait les propriétaires des bêtes, la société fonctionnait sur un mode artisanal. Le marquage des détenteurs s’est sophistiqué peu à peu. Depuis ces temps anciens, la nature méfiante de l’ Homo investisoris le conduit à multiplier les rencontres avec les « bons chevaux » pour réunir son équipe idéale. Il observe alors les spécimens à sa portée selon des critères qui lui sont propres. L’ Homo investisoris UK fait galoper le bon cheval sur de très courtes distances, à fond de train. Son collègue US l’évalue parmi ses pairs, observe s’il atteint l’abreuvoir avant les autres et comment il s’y prend. Les profils d’ Homo investisoris français sont si variés qu’il est difficile pour le bon cheval d’anticiper sur les conditions de son recrutement dans l’équipe. Dans toutes les tribus, l’ Homo investisoris cherche à cerner les lignes de force et les zones de fragilité du bon cheval. Pour cela, il dialogue avec sa tête, pourvue de grandes oreilles sensibles : comment gère-t-elle ce si grand corps ? Rêve-t-elle du paddock, du poteau d’arrivée, de saut d’obstacle ? Parvient-elle à coordonner les pattes avant et arrière ? Les bons chevaux ont été domestiqués dans les premiers âges du marché, et l’entente est généralement cordiale avec les Homo investisoris . Néanmoins, il arrive à certaines de ces bêtes à concours d’imaginer une prairie de rêve, où l’herbe serait naturellement abondante, sans avoir à forcer l’allure pour séduire leurs partenaires de toujours…

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