Itinéraires mythiques en camping-car

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HORS SERIE COLLECTION

ITINÉRAIRES MYTHIQUES EN CAMPING-CAR NATIONALE 7, ROUTE NAPOLÉON, GRANDES ALPES, GRAND TOUR DU LUBERON, ROUTE DES VINS D’ALSACE… DÉCOUVREZ LA FRANCE AUTREMENT

ITINÉRAIRES MYTHIQUES EN CAMPING - CAR - HORS - SĒRI E COLLECTION

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EDITO

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Dans les Alpes-de- Haute- Provence, le col de la Bonette (2 715 m d’altitude), relie la vallée de l’Ubaye à la vallée de la Tinée dans les Alpes- Maritimes. Il se situe entre la cime de la Bonette (2 860 m) et les Trois Serrières (2 753 m).

EN COUVERTURE Le col de l’Izoard, la cita- delle de Mont-Dauphin (05) : Bertrand Bodin / Onlyfrance.fr x 2. Le Mont-Saint-Michel, Alain Le Bot / Photononstop.

Bertrand Bodin/ Onlyfrance.fr

EN PASSANT PAR LA FRANCE

forment un réseau de près de 10000 kilomètres et les départementales tissent une toile de 380000 kilomètres. « Les petites routes secondaires, les plus belles du monde, celles qui suivent les sinuosités et parlent le langage précis du relief » , relevait l’historien Fernand Braudel ( L’Identité de la France ).

«Lorsque le désir résiste aux premières atteintes du bon sens, on lui cherche des raisons. Et on en trouve qui ne valent rien. La vérité, c’est qu’on ne sait com- ment nommer ce qui vous pousse. Quelque chose en vous grandit et détache les amarres, jusqu’au jour où, pas trop sûr de soi, on s’en va pour de bon. Un voyage se passe demotifs. Il ne tarde pas à prouver qu’il se suffit à lui-même. On croit que l’on va faire un voyage, mais bientôt c’est le voyage qui vous fait, ou vous défait. » Autant démarrer nos périples à travers l’Hexagone avec du lourd. La citation est extraite de L’Usage du monde , véritable vade-mecum des amoureux du voyage signé de l’écrivain-voyageur suisse Nicolas Bouvier. Ce dernier partit explorer, dans les années 1950, le vaste monde au volant d’une Fiat Topolino, alors que vous, vous grimperez dans de confortables camping-cars pour «tail- ler la route» en direction du Midi, pour rejoindre des finis terrae armoricains, à destination des cols des Grandes Alpes, des ballons vosgiens ou des volcans arvernes. Deux façons de «partir», mais pourquoi l’esprit d’aventure ne serait-il pas le même ? Car, à bord d’un camping-car, ne recherche-t-on pas à renouer avec une certaine idée du nomadisme, à trouver une liberté de mouvement, à concrétiser une forme d’évasion ? Et quel pays plus que la France permet de vivre un tel Road trip? Notre réseau routier est l’un des plus développés d’Europe. Nos routes nationales

Rien que pour la France, on dé- nombre plus de 350000 imma- triculations de camping-cars, dont tous les propriétaires ont adopté un vrai mode de vie. Un art de vivre ? N’en déplaisent à leurs détracteurs, oui! Le camping-car «polluerait» la vue ? Façon de concevoir les choses. Et même si la nuisance parfois est réalité, elle reste marginale. Les adeptes de ce mode de voyage ayant surtout envie de cultiver un art de se nicher dans le paysage, tout en respectant un code de conduite (utilisation d’aires de services, parcs de stationnement spécifiques…).

À BORD D’UN CAMPING-CAR, NE RECHERCHE-T-ON PAS À RENOUER AVEC UNE CERTAINE IDÉE DU NOMADISME, À TROUVER UNE LIBERTÉ DE MOUVEMENT, À CONCRÉTISER UNE FORME D’ÉVASION ?

L’été est installé. Quelles que soient vos envies de par- tance, il existe une route pour y répondre, un itinéraire à votre main, une échappée belle destination vacances.

D O M I N I Q U E R O G E R / R É D A C T E U R E N C H E F

www.detoursenfrance.fr / été 2016 / hors-série Les plus beaux itinéraires en camping-car

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SOMMAIRE DÉTOURS EN FRANCE / HORS-SÉRIE N° 32

ROAD TRIP SUR LA NATIONALE 7

P. 10

NORD UNE ODE À L’IODE SUD LA ROUTE DES GRANDES ALPES LA ROUTE NAPOLÉON

P. 30 P. 32

P. 40 LA ROUTE DES GRANDES ALPES

Bertrand Bodin / OnlyFrance.fr

P. 38 P. 40 P. 46 P. 54 P. 58 P. 50 P. 64 P. 68 P. 72 P. 76 P. 78 P. 84 P. 90 P. 92

Inratable. Au col de l’Izoard, une pause bien méritée est au menu. Entre grands sommets et route mythique, le refuge Napoléon, à 2300 mètres d’altitude, accueille tous les aventuriers de la route.

FOCUS : L’INVENTION DES PONTS LA ROUTE ROYALE NICE TURIN LA GRANDE TRAVERSÉE DU PAYS BASQUE L’ÂME CATALANE LE LUBERON FOCUS : L’AVENTURE MICHELIN EST AUTOUR DU MONT BLANC ROUTE DES GRANDS CRUS D’ALSACE FOCUS : SAINT CHRISTOPHE LA FRANCHE-COMTÉ CENTRE

P. 30 LE NORD

Loin des sentiers battus et des idées reçues, prenez le large en baie de Somme. Ici, à Cayeux-sur-Mer, cabines et galets vous invitent.

Olivier Leclercq / hemis.fr

P. 98

LES VOLCANS D’AUVERGNE LA ROUTE JACQUES-CŒUR OUEST UN ITINÉRAIRE LITTORAL LE FINISTÈRE POUR EN SAVOIR PLUS

P. 100 P. 106

P. 112 P. 114 P. 122

P. 128

LA CARTE DĒTACHABLE SPĒCIAL LES AIRES DE SERVICE POUR CAMPING-CAR

P. 114 UN ITINÉRAIRE LITTORAL

Jean-Daniel Sudres / Détours en France

De Saint-Malo au cap de La Hague, le Mont-Saint-Michel et sa Merveille font partie de la feuille de route.

Une partie de cette édition comprend : pour le kiosque et les abonnés, une carte Michelin spécial Les aires de service pour camping-car, insérée entre les pp. 130 et 131.

hors-série Les plus beaux itinéraires en camping-car / été 2016 / www.detoursenfrance.fr

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SUD

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La route du col de l’Izoard, dans le massif du Queyras (Hautes- Alpes),qui a mis bien des cyclistes au supplice, a ceci de réconfortant qu’elle passe par le refuge Napoléon (construit sous Napoléon III). Un site grandiose qui vous tend les bras.

hors-série camping car / Juin 2016 / www.detoursenfrance.fr

GRANDES ALPES

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www.detoursenfrance.fr / Juin 2016 / hors-série camping car

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BIO EXPRESS Né en 1960, Damien Chavanat est illustra- teur pour la presse ( Le Monde, Détours en France, Détours en Histoire, Pèlerin …), la publicité, l’édition (carnets de voyage, BD, romans…). Tout au long de notre périple, il a été à la fois mon copilote, l’œil aiguisé dans le choix de nos

roboratives haltes et le «croqueur» talentueux des rencontres peuplant notre Road trip. www.labonneminetoutelannee.com

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NATIONALE 7 L A R O U T E B U I S S O N N I È R E D E S G R A N D E S V A C A N C E S DE LA PORTE D’ITALIE AUX PORTES DE L’ITALIE, TELLE EST L’EXCITANTE AVENTURE QU’OFFRE LA LÉGENDA IRE NATIONALE 7. PENDANT CINQ JOURS, NOUS AVONS ROULÉ POUR RENCONTRER TOUTES SORTES DE GENS, V ISITER GRANDS MONUMENTS ET PETIT PATRIMOINE, DÉBUSQUER DES LIEUX INSOLITES, ÉCOUTER DES HISTOIRES AUSSI ORDINA IRES QUE MERVEILLEUSES. T E X T E D E D O M I N I Q U E R O G E R I L L U S T R A T I O N S D E D A M I E N C H A V A N A T

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L

’aventure commence à l’aurore/À l’aurore de mille chemins/L’aventure c’est le trésor/Que l’on découvre à chaque matin » ( L’Aventure , Jacques Brel), voilà une chanson aux paroles prémo-

nitoires crachotées par l’autoradio de notre véhicule. Et quel véhicule, au diapason de l’esprit de la N7. Un véhicule délicieusement vintage : un Volkswagen Combi T2, jaune sierra (même coloris que celui du film Little Miss Sunshine ), sorti des usines de Wolfsbourg, le fief Volskwagen, en 1979. Son aménagement inté- rieur, dit Westfalia Campmobile, permet de dor- mir à deux personnes grâce à un toit rehaussable, de faire son frichti (grâce à un réchaud à gaz et un petit réfrigérateur) et d’avoir une réserve d’eau pour une toilette de chat. Portières qui claquent, contact, première qui craque, et c’est parti. FONTAINEBLEAU, QUELLE HISTOIRE ! Les banlieues présentent, personne n’en doute, des charmes discrets, voire secrets, à découvrir. Néanmoins, des fourmis dans les jambes, nous mettons le cap sans nous retourner sur Fontainebleau (Seine-et-Marne). L’appel de la forêt, probablement. Non sans avoir fait une incursion dans le village de Barbizon. En lisière de forêt, Barbizon était un hameau de Chailly-en-Bière peuplé de fores- tiers, de carriers et de cultivateurs, lorsqu’au début des années 1820 débarquent des artistes peintres parisiens – Théodore Rousseau, Camille Corot, Narcisse Díaz de la Peña, Jean-François Millet – venus « surprendre la nature chez elle». Plus loin, Fontainebleau, cité royale, exige que l’on mette pied à terre. Inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco, comme son parc, le château de Fontainebleau est un concentré du « roman national ». Sur cinq hectares de bâti, 1 530 pièces et 40000 objets mobiliers recen- sés, le palais préféré de François I er et l’un des sièges du Premier Empire est une leçon d’histoire du Moyen Âge jusqu’à la fin du xix e siècle.

100 KILOMÈTRES AU COMPTEUR La N7 – pour l’heure D607 – file sur Nemours par deux très charmants villages, Bourron-Marlotte et Grez-sur-Loing. L’ancienne capitale du Gâtinais, qui s’est développée sur les rives du Loing au pied de son château du xii e siècle, distille déjà quelque chose de la douceur ligérienne. Victor Hugo y eut sûrement un coup de cœur pour écrire que « les rues, la place, les maisons […] ont conservé la disposition, la dimension, l’irrégularité et la gaîté du Moyen Âge » . Aux grandes heures de la N7, la traversée de Nemours formait le premier gros point noir : franchir le pont sur le Loing pouvait prendre une bonne heure ! Dordives marque notre passage dans le Loiret. Fontenay-sur-Loing, 100 kilomètres pile au compteur… >

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7, ET POURQUOI 7 ? Le 10 juillet 1824, les routes sont redevenues royales après la chute de l’Empire. Par un décret, les routes se voient attribuer une numérotation qui obéit à une classifica- tion en trois niveaux. Ainsi, l’actuelle Nationale 1 (et ses déclassements), qui conduit du Val-d’Oise à Dunkerque, est la descendante de la Voie Impériale1 instituée par Napoléon (qui lorgnait sur l’Angleterre). Quant à la RN7 ou N7, elle ne semble devoir son nom qu’à un choix tout technocratique. Suite à la réforme de 2005, la N7 a été démantelée, ne conservant sous son appellation que quatre sections de son parcours original.

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il en reste 900 sous nos roues. Arrêt à la petite chapelle Notre-Dame- de-la-Route, l’une des curiosités dont la N7 est généreuse. Le sanctuaire est l’œuvre du curé Georges Preux au début des années 1950. Le tracé routier de la nationale est reproduit sur les vitraux constellés des blasons de toutes les villes desser- vies. Jusqu’à Montargis et ses 4000 hectares de > forêt domaniale, le Combi progresse en ligne droite. Au lieu-dit Les Bézards (commune de Boismorand), tout près de L’Auberge des templiers (une étoile au Michelin pour la table et cinq étoiles pour l’hô- tel), une curieuse petite stèle ornée de quatre croix nous fait stopper net. Elle entretient le souvenir d’un terrible acci- dent qui, le 20 janvier 1949, coûta la vie à Jean-Luc Michelin, ses deux enfants et la gouvernante. De la carcasse de la Bugatti type 57, seule Madame Michelin sortira indemne. Entre la rive droite de la Loire et les rebords ouest de la Puisaye, terre agricole doucettement vallonnée si chère au cœur de l’écrivaine Colette, le château de La Bussière était à l’origine au xii e siècle une for- teresse ; elle fut transformée en demeure de plai-

sance au xviii e siècle. Environné d’un parc de 60 hectares (jardin à la française dessiné par Le Nôtre, vaste pota- ger à l’ancienne) et d’un immense étang, le château, dit aussi «château des pêcheurs» accueille… un musée de la Pêche. N’hésitez pas à rencontrer les propriétaires, Laure et Bertrand Bommelaer, leur passion est vite communicative. BRIARE, PONT-CANAL ET ÉMAUX D’eau, il est fortement question à Briare. La Loire, qua- torzepontsetpasserelles, unportfluvial, uncanal laté- ral à la Loire et un pont-canal qui fut jusqu’en 2003 le plus long dumonde. Conçu par les ingénieurs Mazoyer et Sigaud, réalisé par les ateliers de Gustave Eiffel et les ateliers Daydé et Pillé, l’ouvrage de 662 mètres de long pour 11,50 de large, inauguré le 16 septembre 1896, permettait aux péniches de gabarit Freycinet de franchir la Loire en passant 11 mètres au-dessus du fleuve pour rejoindre le canal latéral à la Loire. Ce canal latéral à la Loire fait désormais le bonheur des plaisanciers. Briare est également célébrée pour ses émaux. Fondée il y a un siècle et demi par Jean-Félix Bapterosses, la manufac- ture, qui fabriquait à l’origine des boutons de porcelaine, produit des mosaïques de grande qualité utilisées dans le monde entier tant par les architectes que les décorateurs et les artistes plasticiens. Un musée des Mosaïques et des Émaux se trouve au sein de l’usine.

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d’honneur de vénérables platanes. L’hôtel-restaurant très années 1960 n’a rien d’exceptionnel (même si ses chambres ouvrent sur le Grand Fleuve et sa table simple est généreuse), sauf que le relais est devenu le point de ralliement de tous les fondus de la 7. Les rallyes d’automobiles anciennes stoppent ici pour faire le plein de carburant aux pompes à essence Avia d’un autre âge. Sur le parking, le Combi retrouve de beaux châssis et de fringantesmécaniques de son âge : CitroënGS, Fiat 124, Simca 1100, Opel Kadett, Renault 16 et autres Ford Taunus, P60, 4 CV, Ami 6… >

UNE DÉGUSTATION À SANCERRE Notre Nationale plonge vers

le sud de concert avec la rive droite de la Loire et le canal latéral à la Loire. Bonny-sur-Loire, Neuvy-sur- Loire, la Celle-sur-Loire, Myennes semblent avoir arrêté leurs pendules à la fin des années 1960-1970. Après Cosne-sur-Loire, d’un preste coup de volant, nous filons de « l’autre côté de l’eau», sur la rive gauche du fleuve et du canal pour stationner au pied de Sancerre. Sur un promontoire rocheux, le village possède un ensemble de maisons anciennes bordant des rues étroites, notamment dans le quartier des vignerons. C’est du haut de la tour des Fiefs, vestige de l’ancien château féodal, que s’appréhende le mieux le vignoble du Sancerrois. Regarder, c’est bien, goûter au vin, c’est mieux. Nous nous rendons alors au domaine de Serge et Elisa Laporte et leur fils Guillaume, pour la dégustation promise. Ce sancerre blanc cuvée des M.a.g.e.s (pour Marylise, Alexandre, Guillaume, Élisabeth, Serge) millésime 2012, est une délicieuse affaire de famille. 200 BORNES ET UN RELAIS Mettre un peu d’eau dans notre vin nous fera grand bien. Damien et moi retraversons la Loire et retrou- vons la route. À Pouilly-sur-Loire, le relais Les 200 Bornes se dresse au bout d’une spectaculaire haie

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LA 7 EN CHIFFRES «Faire» la Nationale 7,

DE NEVERS À MOULINS, PATRIMOINE ET GOURMANDISE

et une architecture Renaissance dont le palais ducal, faisant face à la place de la République et fenêtre grande ouverte sur le fleuve, n’a rien à envier aux plus célèbres châteaux de la Loire. Avant de laisser la capitale niver- naise derrière vous, faites provision de négus de la maison Grelier & Lyron, une divine confiserie à base de chocolat et de caramel inventée au tout début du xx e siècle en l’honneur de la visite officielle en France de Ménélik II, Négus d’Abyssinie. Et surtout, effectuez un tout petit détour jusqu’au Guétin (commune de Marzy) pour admirer le panorama du Bec d’Allier, lieu de la confluence entre la Loire et l’Allier. Les villages traversés jusqu’à Moulins, premiers tours de roues en Auvergne, n’affichent pas un charme inoubliable. À voir défiler façades grises aux volets fermés et devantures des commerces ayant tiré rideau, il est bien difficile d’y trouver « l’amour joyeux […] qui fait risette » , clamé par le « fou chantant », en un temps que les moins de 50 ans ne peuvent pas connaître.

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c’est accomplir 995 kilomètres en parcourant 16 départements et 6 grandes régions, celles répertoriées avant la Nouvelle Organisation Territoriale de la République, (la NOTRe d’août 2015). C’est aussi traverser 180 communes, pousser les portes de 7 restaurants triplement étoilés au Guide Michelin .

La route épouse la rive droite de la Loire ménageant quelques points de vue paysagers sur le fleuve et le canal latéral à la Loire. La Charité-sur-Loire, cité monastique clunisienne, détient un splendide patrimoine notamment avec l’église Notre-Dame (aux origines des xi e -xii e siècles) inscrite par l’Unesco au patrimoine mon- dial de l’humanité au titre des chemins de Saint-Jacques- de-Compostelle en France. Cette ville d’Art et d’Histoire est aussi une Cité du Mot où un festival annuel donne la parole à l’écrit. Après Pougues-les-Eaux, porte d’en- trée du Morvan nivernais, Nevers est à notre botte ! Les plus anciens utilisateurs de la N7 se souviendront qu’elle amenait l’automobiliste au cœur de la cité. Ce n’est plus le cas. C’est donc en piéton que vous accéderez à un riche patrimoine où se croisent les témoignages médié- vaux (cathédrale Saint-Cyr-et-Sainte-Julitte, porte du Croux, chapelle Saint-Sylvain, abbaye Saint-Martin…),

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DE L’EAU, DE L’ART ET LA LOIRE Moulins, la bourbonnaise, l’ancienne capitale des ducs de Bourbon, se signale par les flèches de la cathédrale Notre-Dame et du Sacré-Cœur. Attablés au Grand Café, une institution à la mode Art déco où le tout-Moulins se fixe des rencards, nous grignotons quelque assiette de charcuterie et «pompe à la tartouffe» (pâté aux pommes de terre) arrosées d’un «grand cru» à boire sans modération, l’eau de Châteldon aux fines bulles. Pour l’anecdote, cette source d’eau minérale, bien que native du Puy-de-Dôme, se situe près d’une autre reine des eaux, Vichy. Ce qui n’empêche pas de

Près de Saint-Loup, le Relais de la Route Bleue tient encore le haut du pavé grâce à Danièle, la gérante, une belle personne qui est aux petits soins pour le voyageur. À Saint-Loup, Monsieur le maire a créé un minuscule et touchant musée de la N7 en collectant, au gré de ses chines, les vestiges de la « route des vacances » (musée sis en face des bâtiments abandonnés du Café hôtel de la Station). Nous arrivons à Lapalisse, le château fort des xi e - xiii e siècles, aux mains de la famille de Chabannes (Jacques II de Chabannes, seigneur de La Palice, fut

maréchal de François I er ) depuis le xv e siècle, domine la petite cité où se dresse un lieu des plus curieux : le musée d’Art brut appelé l’Art en marche. Si vous aimez Jean Dubuffet, le Facteur Cheval ou Gaston Chaissac, leurs « descen- dants » devraient vous séduire. Saint-Martin-d’Estréaux, et son garage Art déco sympa, marque l’en- trée dans le département de la Loire. À Roanne, nous retrouvons le fleuve

dire que la Châteldon est pleine- ment « vichyssoise » puisqu’elle doit sa notoriété commerciale à un certain Pierre Laval (né à Châteldon) qui acheta en 1930 la source thermale pour commercia- liser son eau. C’est ici, est-il permis de penser, que Gabrielle Chanel y aurait acquis le début de sa renom- mée et son sobriquet de «Coco». Un petit tour par le beffroi de l’hor- loge animé de son petit peuple

d’automates ; la tour de la Mal-Coiffée, vestige de l’ancien château médiéval ; la majestueuse église du Sacré-Cœur ou la cathédrale de Moulins et il est l’heure de tailler la route tout sud. En longeant la façade de l’Hôtel de Paris, impossible de ne pas avoir une pensée pour Charles Trénet ou Jacques Brel qui aimaient y poser leurs malles ou havre- sacs. La nostalgie n’est plus ce qu’elle était…

Loire qui coule sur fond des monts de La Madeleine d’un côté, et des monts du Lyonnais et du Haut-Beaujolais, de l’autre. Si la Loire met de l’eau dans ses vins, chez les Troisgros, noble maison bardée d’étoiles sise juste en face de la gare depuis 1930, ce serait sacrilège de mélanger les deux liquides ! Le chassagne-montrachet au service des écrevisses au poivre, c’est réellement le bonheur. >

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SAINT-ÉTIENNE : À REDÉCOUVRIR Si jamais vous imaginiez que cette ville était «moche commeunerogne», parcequ’industrielle, industrieuse, vous ratezquelquechose. Oui, les silhouettes massives des terrils Couriot, le musée de la Mine, la cité du Design, la manufacture royale d’Armes, les forges, le quartier Manufacture (qui vaut à la cité d’être la première ville française membre du réseau des Villes créatives design Unesco), les technopôles et autre pôles d’excellence signent son identité urbaine profonde. Mais, Saint- Étienne est aussi une ville verte, très écolo, avec plus de 700 hectares de parcs et jardins (parc forestier de la Perrotière, jardin du musée d’Art et d’Industrie, la mon- tée du Crêt de Roch…). Et qui ne s’est pas retrouvé au coude-à-coude avec les supporters de l’équipe de foot au cœur du Chaudron (le stade Geoffroy-Guichard) ne saisira pas ce qu’est être stéphanois. Dès la sortie sud de Saint-Étienne, le Combi doit affronter de rudes pentes. Ça « baronte », ça « jabiasse » du côté des pistons ! Pour gagner le col de la République – le premier col à plus de 1 000 mètres franchi par le Tour de France cycliste le 5 juillet 1903 – à 1 161 mètres d’altitude avec un dénivelé frôlant souvent les 10%, notre « voiture du peuple » renâcle. Mais l’effort est payant. Pour la vue : un pano- ramique sur la montagne du Pilat et ses coulées rocail- leuses (les chirats), ourlant le Rhône sur sa rive occidentale ; la vallée du Rhône ; le plateau

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Après une nuit réparatrice, on se retrouve face à un sacré dilemme : soit pour- suivre notre ruban estampillé N7, des- servant Lyon et Vienne par le col du Pin-Bouchain niché à 759 mètres d’altitude dans les monts du Lyonnais, ou se laisser glisser via la «Route bleue » jusqu’à Saint-Étienne… Nous roulons, en surplomb des gorges de la Loire, jusqu’à

L’Hôpital-sur-Rhins, lieu de la grande décision. Allez les Verts ! On fonce finalement sur la N82, la Route bleue . Les paysages du parc naturel du Pilat sont ennoyés dans une purée de pois à donner « le babaud» (le cafard), comme on dirait par ici en gaga, ce parler populaire stéphanois troussé à partir de l’arpitan. Ici,

«on n’est pas d’un pays mais on est d’une ville» , fait remarquer dans une chanson devenue hymne le Stéphanois Bernard Oulion, plus connu sous le nom de Bernard Lavilliers.

du Grand-Bois. Et pour la gourmandise car, à propos de Grand-Bois, c’est à l’auberge du même nomque nous reprenons un peu de force tandis que le Combi, capot ouvert, reprend son souffle.

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VITE, FUYONS LA PLUIE ! L’Ardèche, que nous abordons à l’approche d’An- nonay, ne nous laisse malheureusement pas un souvenir indestructible. De véritables trombes d’eau, pluies dites cévenoles particulièrement violentes, nous refilent la désagréable sensation de godiller au milieu de nulle part plutôt que de progresser sur la Route bleue. Des accès sont barrés, chaussées totalement inondées avec éboulis de pierres en prime. Longs détours obligés. Où te caches-tu, Bison Futé ? Bref, on rejoint notre bien-aimée N7 à Tain-l’Hermitage. L’escapade mouvementée a déposé sur nos visages quelques marques. «Qu’est-ce que la

UN DÉJEUNER À PONT-DE-L’ISÈRE Œufs en meurette, andouillettes frites, escalope nor- mande, bavetteà l’échalote, îleflottante… les Routiers sont vraiment sympas mais nos estomacs se rebellent contre les « 12,50 € service et vin compris » à l’approche de Pont-de-l’Isère, kilomètre 561, à la confluence du Rhône et de l’Isère. Et pourquoi ? Parce que l’on arrive chez Michel Chabran ! La couleur de notre carrosse se fond presque avec l’éclatant ocre orangé de la façade de l’établissement. Pour avoir épinglé une belle étoile à sa mai- son, le grand chef, chantre des traditions culi- naires dauphinoise et provençale, conserve

santé ? C’est du chocolat ! » , clamait le très épi- curien Brillat-Savarin. Alors, ni une ni deux, on effectue une entrée déterminée chez Valrhona et sa cité du chocolat. En guise de promenade digestive, nous descendons sur les berges du Rhône,

l’esprit du caboulot familial créé en 1935 par ses grands-parents. Après nous avoir servi un médaillon de filet de bœuf au vieil hermitage et sa purée de pommes de terre rattes aux truffes, accompagné d’un cornas de 1998 (ndlr : j’entends déjà mon directeur de rédaction à l’heure de lui remettre ma note de frais), le chef aban- donne ses pianos pour faire le tour de notre Combi. Car l’autre passion de Michel Chabran est l’automobile.

quai de la Libération et rejoignons le château de Tournon via la passerelle piétonnière Marc-Seguin. Ce petit-neveu des frères Montgolfier, ingénieur génial, est à l’origine de nos ponts suspendus grâce auxquels enjamber de larges fleuves n’est plus qu’une formalité.

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ENTRE PÔLE NORD ET ÉQUATEUR Sieste obligatoire et nous voilà repartis en direction de Valence, non sans avoir cherché avant le pont sur l’Isère un insolitemonument : «Latitude 45» qui nous indique que nous sommes àmi-chemin entre le PôleNord et l’Équateur. «Nationale 7 […]/C’est une route qui fait recette/ Routedes vacances/Qui traverse laBourgogneet laProvence/ Qui fait d’Paris un p’tit faubourg d’Valence/Et la banlieue d’Saint-Paul-de-Vence» :qu’est-ce que Charles Trénet, qui composa ce tube en 1955, penserait aujourd’hui de cette belle à la splendeur (souvent) fanée… Comme partout sur notre territoire, les périphéries des villes offrent de déso- lants paysages urbains standardisés et d’une laideur affligeante. Les zones d’activités, les «pôles d’attrac- tivités commerciales», les enseignes de la grande distribution ont non seulement défiguré les abords des villes mais ont également créé au cœur des cités des déserts commerciaux. À LA PORTE… DE LA PROVENCE Gardons le moral, Valence, c’est bel et bien, comme l’annoncelapancarte,la«portedelaProvence». Que ceux qui en douteraient prêtent l’oreille

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pittoresques sont dénommés «côtes». Entièrement réservé aux promeneurs, le vieux Valence se parcourt à l’ombre des platanes des places des Clercs (qui conserve le souvenir de l’exécution du bandit de grand chemin Louis Mandrin roué vif en 1755) et de la Pierre, jalonnées de terrasses de cafés et de restaurants, des places Belat et Saint-Jean peuplées de commerces, sans oublier la cathédrale Saint-Apollinaire, les halles métalliques, le parc Jouvet (sous la terrasse du Champ-de-Mars) et, bien sûr, le kiosque à musique du Champ-de-Mars rendu célèbre par Raymond Peynet et ses Amoureux. Midi sonne et nos estomacs crient famine! Si les bonnes tables ne manquent guère, nous nous décidons pour le restaurant André d’Anne-Sophie Pic, la seule femme arborant trois étoiles à sa toque. Élément du patrimoine culturel et gastronomique valen- tinois, la dynastie Pic, est présente aux fourneaux depuis 125ans. La N7 n’aime rien tant que la douceur. Ah! le nou- gat de Montélimar. De nos jours, le tracé de la natio- nale évite soigneusement le centre de la ville, autrefois point noir routier redouté des vacanciers. Ce qui ne nous empêche pas d’aller droit au palais des Bonbons et du Nougat.

au chant des cigales ! Pour visiter Valence, commençons par les bords du fleuve : port de plaisance et base nautique de l’Épervier, voies vertes pour les vélos et vue d’en- semble sur la ville qui occupe trois étages de terrasses. Pour atteindre son cœur, on se hisse littéralement vers la ville haute en empruntant une enfilade de venelles pentues, parsemées d’escaliers ; ces passages étroits

Et de repartir en ayant fait pro- vision, à lamaison Soubeyran, de cette fameuse confise- rie ancestrale (l’un des treize desserts de Noël) emballée dans une repro- duction d’une borne kilo- métrique frappée d’un N7.

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(son inventeur en 1947) que la mésaventure amuse. Que nous ne soyons pas très «manuels» est une chose, que les géniaux ingénieurs de «das Auto» aient un jour songé à mettre leur mécanisme en pratique semble en être une toute autre ! Une heure montre en main et notre Combi remet les gaz, respectant une vitesse de croisière bien pépère de 70 km/h, comme le préconise le panneau routier. LA MÉMOIRE DES JOURS HEUREUX Et notre descente se poursuit. À Mornas, une pause s’impose, le tempsdegrimper enhaut de la forteresse médiévale d’où se déploie un grand spectacle : mont Ventoux, Dentelles de Montmirail, vallée du Rhône. Quatre kilomètres plus loin, nouvel arrêt à Piolenc. Ce village est le fief d’une des plus nobles familles du cirque : les Grüss qui ont leur château (et le parc Alexis-Grüss). Mais l’inté- rêt majeur du village, pour tout forçat de la N7, se nomme musée de la Nationale 7. Ici, la nostalgie n’engendre aucune >

L’un des marchés les plus animés de la Drôme provençale nous procure également à la régalade olives de Nyons, picaoudou (picodon AOP, affinéméthode Dieulefit s’il vous plaît !), caillettes, huile de truffe de Tricastin. Au kilomètre 645 ou quelque chose d’approchant, le Combi tangue du train arrière. Arrêt d’urgence. Et, sur cette belle route droite comme un i, bordée au cordeau de majestueux platanes, cela n’a rien d’une sinécure. PNEU CREVÉ : UNE HEURE D’ARRÊT On parvient à se faufiler entre deux centenaires – le troncde l’und’euxarboreunbouquetdefleursenplas- tique poussiéreuses et un petit nounours tout délavé, touchant cénotaphe improviséensouvenird’undrame de la route – et à garer notre véhicule de guingois sur un mini-terre-plein. Diagnostic évident : crevaison. Il n’y a bien qu’en jouant au Mille Bornes de Monsieur Dujardin

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PAR LES SEPT PORTES D’AVIGNON De culture et de festivals, il est évidemment ques- tion lorsque nous pénétrons dans la cité des Papes d’Avignon. À la confluence du Rhône et de la Durance, Avignon est enfermée dans sa gangue de remparts du xiv e siècle, sauvés d’une inexorable décrépi- tude par Viollet-le-Duc. Il suffit, non de franchir le pont, mais de pénétrer dans l’enceinte par l’une des sept portes amenant à un ensemble architectu- ral monumental, inscrit au patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco : le palais des Papes, siège de la papauté de 1309 à 1418, et plus grande construction gothique au Moyen Âge. Pour découvrir les coulisses du palais, sa légende noire, nous optons pour une visite privée, en marge des hordes de touristes (réserva- tion auprès du palais des Papes). La place du Palais et la cour d’honneur du palais épiscopal se transforment chaque été, depuis la création du festival par Jean Vilar en 1947, en une agora et scène ouverte. Tout autour, les ruelles sont bor- dées d’hôtels particuliers, de placettes ombragées, de venelles parcourues par les eaux du canal de Vaucluse. De l’autre côté du célèbre pont Saint-Bénézet (1185), la Barthelasse est la plus grande île fluviale d’Europe. Au

mélancolie. Créée par Henri Gleize (lire son bel ouvrage Ma Nationale 7 ) pour perpétuer la mémoire des jours heureux de la 7, l’association regroupe de «vrais dingues» de belles carrosseries, de documents et d’objets d’époque et de virées en voitures anciennes. Et merci à Christian Corsini, cheville ouvrière dumusée, de nous avoir fait découvrir la cuvée Bonne conduite (jus de raisin titrant zérodegré d’alcool) produite par la famille Serguier. À boire sans modéra- tion. Vigneron, Jean-Pierre Serguier, chantre de l’agri- culture biodynamique, élève et met en bouteilles au château Simian trois appellations : châteauneuf- du-pape, côtes-du-rhône, massif d’uchaux villages. Amoureux de la Nationale, il a créé un espace d’exposition sur ce thème (prenez le temps de visionner La Nationale 7, quarante ans après , un filmde FabriceMaze) et une cuvée Retro7, décli- née en blanc, rosé, rouge. Du rouge, on passe à Orange. Une longue halte est nécessaire pour découvrir l’arc de triomphe romain (26-27 ap. J.-C.) et le théâtre antique (inscrit au patrimoinemondial de l’Unesco). Bâti sur la colline d’Eutrope, il est le seul théâtre romain d’Europe à avoir conservé sonmur de scène. Ses pierres datant de l’ère chrétienne accueillent depuis 1860 des spectacles, et depuis les années 1970 les Chorégies, l’un des plus prestigieux festivals d’opéra du monde.

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gré des caprices du fleuve, un bon millier de riverains y vivent, dont deux familles d’agriculteurs aux fermes atypiques. Passé la Durance, la route tire tout droit au milieu d’un paysage agreste alternant cyprès et vergers. Le Combi semble glisser entre les platanes qui laissent de temps à autre surgir des villages : Saint-Andiol (voir la maison de famille de Jean Moulin et le circuit du che- min de la Liberté), Lambesc où nous délaissons la N7 pour musarder, via la superbe D67A, jusqu’à La Roque- d’Anthéron et l’abbaye de Silvacane, chef-d’œuvre de l’art cistercien provençal. Le mistral déboule sans crier gare sur le museau du Combi, nous offrant la sensation de rouler en marche arrière ! Heureusement, Aix-en- Provence se profile. AIX-EN-PROVENCE, VILLE LUMINEUSE L’ancienne capitale de la Provence est un Janus. De ses deux visages, le premier, sûrement le plus connu, est tourné vers le passé : le cours Mirabeau, les fontaines, les façades richement sculptées des hôtels particuliers des xvii e et xviii e siècles, l’ancien palais de l’archevê- ché, les places, la brasserie des Deux Garçons (l’une des plus anciennes de France)…Et puis, de l’autre côté de la fontaine de la Rotonde, il existe un cœur battant plus contemporain où se dresse, dans le Forum culturel, le Pavillon noir conçu par Rudy Ricciotti (père également du MuCEM de Marseille) ; le conservatoire de musique et de danse Darius-Milhaud à l’acoustique parfaite ; le mur d’eau géant du pont-rail (le plus grand d’Europe) ; le Grand Théâtre de Provence ou encore la bibliothèque

Méjanes où, dans un décor industriel de briques, de poutrelles métalliques, de carreaux de faïence, sont conservés des milliers d’ouvrages dont, notamment, les archives personnelles d’Albert Camus. Ville lumineuse, Aix ne peut être séparée de Paul Cézanne. Du circuit balisé de clous gravés de la lettre C, au Jas de Bouffan, l’atelier des Lauves, le musée Granet, les carrières de Bibémus, le château du Tholonet ou les pentes de la montagne Sainte-Victoire – «montagne sacrée » qui illumine les collections du monde entier – l’artiste guide les pas du voyageur. LA GRANDE BLEUE APPROCHE… La N7, rebaptisée D7N, s’allonge au pied de ce colosse de lumièreetdecalcaire.Nousdégustonsunepoignée de calissons de chez Béchard. Un must ! Après Trets, on laisse >

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derrière nous le Vaucluse pour arriver dans le Var. Sous le regard d’Aurélien – le mont Aurélien qui doit son nom à la voie Aurelia, ancêtre romaine de notre N7 – le camping-car se gare à Saint-Maximin-la-Sainte- Baume. Pour nos dévotions à sainte Marie-Madeleine, nous nous contentons de voir ses reliques conservées à la basilique. L’ascension jusqu’à son ermitage enchâssé dans une grotte du massif de la Sainte-Baume sera pour une autre fois… Nous ne voulions pas éviter de traverser Tourves, ça tombe bien, le bourg réputé pour ses méga-embouteillages estivaux d’autrefois se rejoue la scène avec équipages des années 1950-1960et bénédiction par monsieur le curé ! L’ambiance Nationale 7 n’est pas morte ! Brignoles, Le Cannet-des-Maures, Vidauban, Le Muy… là, il suffirait de faire une embardée plein sud pour traverser le très sauvage massif des Maures et rejoindre le golfe de Saint-Tropez. Plutôt que céder tout de suite au mirage de la Grande Bleue, on préfère se rafraîchir dans les piscines et vasques naturelles que réservent les gorges de l’Argens. C’est fait ! À Fréjus, nous faisons enfin la jonction avec cette Méditerranée si fantasmée. >

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Ruines des arènes, villa Aurelia, aqueduc, théâtre antique, pas de doute, une colonie romaine de la Gaule Narbonnaise avait bien établi ici même son plus important port militaire. Mais l’attrait principal de la station balnéaire de Fréjus réside en ses plages qui déroulent leur doux tapis de sable blond sur près de 7 kilomètres. Ignorant du regard la plage réservée aux naturistes, nous voilà prêts pour un premier bain depuis la plage des Sablettes. DE LA CORNICHE D’OR À LA CROISETTE Fidèles à notre 7 porte-bonheur, nous devons à notre grand dam ignorer la belle route de la corniche de l’Esterel (la N98, surnommée «route de la Corniche d’Or») qui se tortille, entre les roches rouges dumas- sif et l’azur de la Méditerranée, jusqu’à Cannes et La Napoule. La Nationale grimpe en effet par les crêtes du massif de l’Esterel et le piémont du mont Vinaigre (614 m). Un tracé qui correspond à celui de l’ancienne voie romaine Julia-Augusta, prolongement de la via Aurelia par l’empereur Auguste (-13 av. J.-C.). Magnifique itinéraire à travers une végétation où alternent maquis, forêt de chênes-lièges et de pins, mais la route serpen- tine se déroule tout en virages à donner le tournis (on en répertorie 183…) et de franchissement de cols (de l’Au- riasque, du Testanier, du Logis de Paris). Pour détendre nos jambes et nos nerfs – et laisser le Combi reprendre son souffle de plus en plus asthmatique – nous escala- dons le versant nord du mont Vinaigre. Vue imprenable sur la Corniche d’Or du cap Camarat à Nice ; les îles de Lérins ; les sommets des Alpes ; le Mercantour. Au terme d’une longue descente, notre équipage débarque sur la Croisette. Cannes, ses palaces qui façonnent le front de mer – Le Carlton, le Martinez, le Majestic…–, son décorum bling-bling, ses yachts grands comme des porte-avions, le casino du Palm Beach. Cette légende cannoise débute en pleines Années folles. La fréquentation de la Riviera vous changeant, paraît-il, un >

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bonhomme, nous décidons de sacrifier au cérémonial de la montée des marches du palais des Festivals pour une visite guidée des coulisses d’un mythe. Sans le moelleux tapis rouge, sans les crépitements frénétiques des flashs des paparazzis, sans les starlettes, on vous le confirme, c’est vraiment moins bien. Jusqu’à Nice, il n’est pas aisé, même carte Michelin en main, de suivre le tracé de la N7 qui perd parfois son nom. Golfe-Juan, Juan-les-Pins, Antibes, Cagnes-sur-Mer… nous flânons au fil de la Baie des Anges jusqu’à Nice. Je fredonne du Nougaro : «Nice very nice disent les vagues aux galets/En glissant le long d’la prom’nade des Anglais…» Laissons la promenade

des Anglais aux joggeurs, aux élégantes mamies aux petits chiens (qui irritaient le célèbre romancier d’origine russe Joseph Kessel) et autres badauds pour s’enfon- cer dans le Vieux-Nice, labyrinthe de ruelles issues du Moyen Âge à l’air génois : cours Saleya (ne ratez pas l’une des ambassadrices de la cuisine nissarde, la socca de la famille Pisano, livrée toute chaude de l’atelier voisin, rue Place-Vieille) ; place Rossetti veillée par la cathédrale Sainte-Réparate ; rue Droite et le palais Lascaris… Si un Niçois vous invite « au Château », vous ne trouverez en lieu et place qu’une colline plantée de pins, de chênes verts, de cyprès.

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NICE, UNE PASSION RUSSE Donc, de fortin point, mais un panorama sur : port Lympia où Apollinaire allait fumer l’opium en com- pagnie de Louise de Coligny-Châtillon qu’il a rencon- trée dans un restaurant de Nice ; les cascades de toits ocre orangé de la vieille ville ; les collines, dont celle de Cimiez, qui ceignent la fondation grecque de Nikaïa. Cette harmonieuse virgule verte qui griffe Nice en deux est la promenade du Paillon, sorte de jardin-fleuve. Le Paillon était un petit fleuve côtier, autrefois, avant d’être recouvert et canalisé, bien indiscipliné. Enfant élevé dans ce quartier populaire, l’écrivain niçois Louis Nucéra en fit l’un de ses personnages principaux dans certains de ses romans. Aujourd’hui, cette coulée verte de 12 hectares, reliant le Théâtre national de Nice à la mer, accueille

également des œuvres monumentales d’artistes contemporains (Bernar Venet, Sacha Sosno…). La cathé- drale orthodoxe Saint-Nicolas, le château Valrose ou l’ancien palais de la princesse Kotchoubey (actuel musée des Beaux-Arts) racontent l’histoire de l’engouement des Russes, après la « colonisation » anglaise, pour la Côte d’Azur. Tout commence avec l’impératrice Alexandra Feodorovna, l’épouse du tsar Nicolas I er , qui entraîne dans son sillage les grandes familles de l’aristocratie ébahies par ce climat enchanté. Nombre de « Russes blancs » y trouveront aussi une terre promise. Deux des piliers de la littérature, Anton Tchekhov et Nicolas Gogol, y trouveront l’inspiration créatrice. De nos jours, la French Riviera est toujours courtisée par les Russes, principalement des oligarques capables de dépenser des dizaines de millions d’euros pour s’offrir un pré carré bien gardé sur la « presqu’île des milliardaires », Saint- Jean-Cap-Ferrat. Autre temps, autres mœurs… DE VERTIGINEUX POINTS DE VUE À la sortie de Nice, nous cherchons un peu notre chemin. Une fois de plus, la N7 est débaptisée. Il faut suivre la D2564 qui se love autour du mont Gros et se déploie sur les crêtes à plus de 500 mètres d’altitude. De la Grande Corniche, redescendons d’un cran sur la Moyenne Corniche au tracé virevoltant. À chaque virage, sa surprise : de vertigineux points de vue sur la rade et le port de Villefranche-sur-Mer, la citadelle de Saint-Elme, le mont Boron. Èze, où les souvenirs de Friedrich Nietzsche (qui s’y promenait lors de sa convalescence) et de Francis >

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Blanche (l’acteur habitait la plus haute maison du village) se mêlent, est un nid d’aigle tout en rampes tortueuses, passages voûtés, ruelles en escargot enveloppées dans une gangue d’agaves, d’aloès, de cactées. Monaco, nous voilà : on hésite, le palais princier, le jardin exotique, le casino de Monte-Carlo ? Vu l’accueil chaleureux réservé aux camping-caristes que nous sommes, nous obtempé- rons au « circulez, il n’y a rien à voir » . MENTON, CLAP DE FIN Nous n’irons pas non plus à La Turbie voir le Trophée des Alpes en l’honneur d’Auguste l’unificateur de l’Empire, au sommet de la Grande Corniche et de la voie romaine Julia-Augusta. Beausoleil, Roquebrune,

puis Cap Martin nous amènent en Italie… enfin, à Menton. L’avenue de la Madone longe la promenade du Soleil jusqu’aux pieds de la vieille ville. De cette pro- menade au très huppé quartier de Garavan, le front de mer offre une physionomie d’exception sur cette portion de la Côte d’Azur : elle ignore ce bétonnage mercantile qui a définitivement dénaturé un littoral paradisiaque. Menton, un petit plus de 1 000 kilomètres au compteur si l’on prend en compte toutes les échappées belles effec- tuées en lisière de la Nationale. Menton, la plongée dans la Grande Bleue. Les odeurs de citronniers, bougainvilliers, mimosas, pins parasols, figuiers… Les couleurs, les murs illuminés de pastel, d’ocre, d’orangés, le Vieux-Menton est enroulé dans le dédale de ses ruelles, rampes et volées

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