La Presse Bisontine 79 - Juillet-Août 2007

CUSSEY-SUR-L’OGNON Architecte de métier Michèle Bourgeois retourne vers le futur LE PORTRAIT Elle défend avec conviction une perception de l’habitat qui commence à faire son chemin à une époque où l’on parle de développement durable. Une conception où l’homme et l’environnement sont au cœur d’un projet de construction. Son point de vue, elle le détaille dans un livre qu’elle écrit. La Presse Bisontine n°79 - Juillet-août 2007

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Michèle Bourgeois : “Il y a d’autres choses plus subtiles que seul l’homme peut mesurer.”

M ichèle Bourgeois est prévenue. Avec le livre qu’elle prépare, soit “vous décrochez le prix Nobel, soit vous passez sur le bûcher car vous serez considérée com- me une sorcière” lui a lancé tout de go un éditeur intéressé par son projet. Si l’homme de lettres force à ce point le trait, c’est qu’en effet le contenu de l’ou- vrage que rédige en cemoment l’auteur est déroutant. Il pourrait bien cham- bouler en profondeur notre culture de l’habitat tournée vers le principe de la

de métiers derrière elle, Michèle Bour- geois estime avoir atteint “l’âge auquel on peut dire les choses.” Énergique et passionnée par le sujet, elle n’est de tou- te façon pas du genre àmanier la langue de bois dès qu’on lui parle de construc- tion. “Bâtir, c’est savoir observer, s’in- terroger et deviner.” C’est presque une philosophie qui oblige celui qui l’applique à prendre le temps nécessaire à la réflexionavant d’occuper un espace. Une maison n’est pas un produit de grande consommation, “c’est la deuxième peau de l’homme” insiste Michèle Bourgeois. D’où l’importance de peaufiner sa coquille pour s’y sentir bien. C’est trop facile de planter quatre murs et un toit sur un terrain pour espérer créer les conditions d’une vie sereine. L’investigation mérite d’être poussée davantage pour mettre en harmonie l’homme, sonhabitation et la nature qui l’entoure. Il ne s’agit pas d’une tocade d’écolo, mais de bon sens comme en fai- saientpreuvenosancêtres.Ànotreépoque, le propos paraît presque décalé. Une des pistes que l’architecte explore pour son livre est la géobiologie qui étu-

die l’ensemble des influences de l’envi- ronnement (champ magnétique, cours d’eau souterrain…) sur l’homme. Le côté irrationnel de ce domaine de recherche le soumet aux plus vives critiques. En s’y engageant sans complexes, mais avec intérêt, Michèle Bourgeois, raisonnable pourtant, sait qu’elle risque de s’expo- ser aux reproches. Cette femme qui a toujours voulu “faire de la recherche dans le bâtiment” ne redoute pas de se faire chahuter. Qu’importe, elle est convaincue du bien- fondé de la géobiologie, un domaine pour lequel elle suit une formation. Le concept a d’ailleurs cheminé en Suisse et en Allemagne, alors qu’il reste à la marge en France. Selon elle, le monde est parcouru par un ensemble d’éner- gies. L’être humain peut en ressentir les effets. “On peut appréhender beau- coup de choses avec un appareil demesu- re. Mais il y en a d’autres plus subtiles

défendu l’utilisation du bois dans la construction - elle est restée un an dans les pays nordiques pendant ses études - a trouvé une écoute qui l’encourage dans ses choix. GérardMoyse, construc- teur demaisons individuelles, s’est rap- proché d’elle pour qu’ils travaillent ensemble à la création d’une maison bioclimatique aux performances éner- gétiques exceptionnelles. “C’est une démarche exemplaire. Nous avons mis nos compétences en commun.” Résultat, la maison qu’ils ont créé ensemble a déjà remporté trois prix. La perception qu’élaboreMichèle Bour- geois depuis toutes ces années chemi- ne. À une époque où le développement durable est dans l’air du temps, c’est le signe que l’on commence à se poser les bonnes questions sur l’homme, l’habi- tat et l’environnement. Et le bouquin ? Il devrait être bouclé en septembre. T.C.

que seul l’homme peut mesurer. Ça fonc- tionne bien quand il y a un équilibre énergétique” dit-elle. Son état de santé la conforte dans cet- te théorie. Michèle Bourgeois est attein- te d’une étonnante allergie au froid dont elle souffre depuis deux ans et pour laquelle les médecins ont dumal à don- ner une explication scientifique. Et si tout était question de vibration ? L’ar- chitecte s’interroge et veut comprendre ! En tout cas, à partir de ce principe, tout a son importance dans l’habitat : le choix de l’emplacement, de l’exposition, jus- qu’à celui des couleurs. Et voilà comment elle s’est lancée dans la construction de maisons bioclima- tiques, un concept qui tend à trouver cet équilibre entre l’homme, les maté- riaux qui composent l’enveloppe et de l’environnement dont onpeut tirer l’éner- gie nécessaire au confort avant même de songer à la technologie. Celle qui a

productivité et de la ren- tabilité. L’urbanisation galope, les lotissements foisonnent, l’habitat est devenu un business dans lequel ona presque oublié l’essentiel : la place de l’homme et de l’environ- nement. Ces deux thèmes sont des piliers de la recherche engagéepar cet architecte installé à Cussey-sur- l’Ognon. À bientôt cin- quante ans et des années

Son état de santé la conforte dans cette théorie.

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