La Presse Bisontine 47 - Septembre 2004
L’ INTERVI EW DU MOIS
2
Éditorial
O.G.M. La mobilisation se renforce
François Dufour : “Tout est fait pour poursuivre le processus de monoculture et d’industrialisation de l’agriculture”
Hommage Le regard de ces hommes et de ces femmes suffit, les images parlent d’elles- mêmes. L’allégresse est parfois teintée d’incrédulité. ÀBesançon comme dans toutes les autres villes françaises prises sous le joug allemand, l’explosion de joie des habitants à la vue des blindés américains et alliés est à la mesure de tout ce que la population avait subi depuis plus de 4 ans. Terreur et crain- te de l’occupant, angoisses des familles qui avaient un fils à la guerre, humilia- tions et débordements macabres ont fait place, soudainement, à l’expres- sion brutale d’une joie intense mêlée d’insouciance. Si Besançon n’a pas été autant martyrisée que d’autres villes françaises pilonnées de toutes parts, la capitale franc-comtoise n’a pas été épargnée des drames associés à cet- te sale guerre. Les 80 soldats améri- cains tués ou disparus les 7 et 8 sep- tembre, les 40 F.F.I. et la cinquantaine de civils fauchés à quelques heures du soulagement final, sans parler des résis- tants fusillés par les Allemands au pied de la Citadelle, tous ces hommes et femmes sont les héros de l’histoire bisontine. Ces photos en noir et blanc, publiés dans notre édition, sont les rares témoignages d’une époque trouble dont il ne reste aujourd’hui que si peu de témoins directs mais dont le souvenir encore brûlant nous rappelle que cet- te période douloureuse fait partie d’un passé finalement assez proche. Ces héros bisontins, dont quelques plaques de rues et une stèle rappellent certains d’entre eux à notre mémoire, sont nos sauveurs. Pour lamajorité d’entre nous, ces images paraissent lointaines. La commémoration du 60 ème anniversaire de la Libération de Besançon les 7 et 8 septembre honorera la mémoire de ces grandes figures dont la plupart nous sont inconnues. 60 ans après, ces faits d’armes semblent totalement révolus. La construction européenne est pas- sée par là, heureuse initiative ne serait- ce que pour cette finalité de paix. Mais la folie guerrière ne prévient pas. Dans un contexte international actuel totale- ment différent, le risque d’un conflit majeur n’est pas totalement à exclure. En ce cas, comment chacun de nous réagirait ?Cela vaut la peine de se poser uneminute la question pour mesurer le courage et l’abnégation des héros qui ont rendu sa liberté à Besançon il y a 60 ans tout juste. Cet événement reten- tissant valait bien l’hommage préparé par la municipalité d’aujourd’hui. ! Jean-François Hauser
François Dufour, vice-président d’ATTAC et responsable des questions sanitaires à la confédération paysanne revient sur la question des O.G.M. (Organismes Génétiquement Modifiés).
L aPresseBisontine :L’arrachage de plants transgéniques a fait à nouveau la une de l’actua- lité cet été ? François Dufour : Cest un col- lectif de faucheurs volontaires qui viennent dhorizons divers qui se sont engagés à titre individuel dans ces actions. Onne voulait pas que desmou- vements comme la Confédé- ration Paysanne soit déman- telée par des actions de justice, on sengage à titre individuel et on assume toutes les consé- quences de nos actes. Trois personnes qui ont conduit des actions sur Verdun-sur-Garon- ne, Noël Mamère, Claude Onesta et José Bové sont convoquées au tribunal le 16 septembre et 2 autres le sont pour les actions menées dans le Puy-de-Dôme. L.P.B. : Vous avez contesté la der- nière décision de la commission européenne sur la levée partiel- le du moratoire sur les O.G.M. ? F.D. : La position de la com- mission européenne est double. LEurope se dit se doter de clauses juridiques permettant
maïs, et elle a été stoppée fau- te de moyens financiers et de volonté pour ne pas aller plus loin dans les analyses et le débat. Ça prouve bien quil y a un couvercle sur la marmi- te. L.P.B. : Les défenseurs des O.G.M. avancent l’argument de la dimi- nution des pesticides et herbi- cides ? F.D. : Comme on fait de la monoculture, on a de plus de plus de difficultés avec les désherbants actuels pour détruire les éléments nuisibles en culture, et il faut un maïs génétiquement modifié pour y parvenir. Tout est fait pour poursuivre le processus de monoculture et dindus- trialisation de lagriculture. On voit par exemple auxÉtats- Unis comme au Canada quil y a une levée de boucliers car dans les zones où lutilisation des O.G.M. a été faite depuis 4 ans sur les terres, on a recours beaucoup plus aux herbicides et insecticides quavant. Le sol shabitue aux molécules utilisées dans les herbicides et les mauvaises herbes résistent. Le proces- sus est le même quavec lac- coutumance au traitement des antibiotiques, qui perdent de leur efficacité avec un usage répété. On perd complètement le bon sens paysan dans le traitement des sols et lon perd toute relation avec le vivant et la vie microbienne du sol pour aller vers des systèmes de fabrication de standard dans lagriculture. L.P.B. : Plus de 2 000 mairies ont pris des délibérations pour se prononcer contre la culture d’O.G.M. sur leurs communes, suivies par des collectivités ter- ritoriales dont le conseil régio- nal de Franche-Comté, quel poids à ce mouvement ? F.D. : Cest un courage politique fort de la part du maire et du conseil municipal. Cest une désobéissance civile face à des lois censées protéger le consom- mateur comme on la vu pré- cédemment avec létiquetage. Ce sont des élus qui appliquent
ment le conseil des Ministres de lagriculture européenne laisse ce type de choix poli- tique à la commission par manque de courage, cest vrai- ment scandaleux. L.P.B. : Pourquoi contestez-vous la culture plein champ des O.G.M. ? F.D. : Nous y sommes farou- chement opposés, car lobjec- tif recherché est de polluer lensemble des maïs et des plantes avec notamment les transferts de pollen. On nous dira alors quil est impossible de faire marche arrière, car lensemble des cultures en sont pourvues. La solution que proposeront les multina- tionales sera alors de légali- ser la culture dO.G.M. Par ailleurs, les études de plein champ sont obligatoires pour homologuer au niveau inter- national le droit dun pays ou dune région à semer des graines transgéniques. L.P.B. : Un rapport de l’I.N.R.A. ne relève “ a priori aucun risque de toxicité potentielle des pro- duits animaux issus de volailles,
François Dufour, spécialiste des questions sanitaires à la Confédération Paysanne.
mettez dans un autre, ça devient une invention et vous pouvez le breveter. Et de plus, on assiste à la confiscation des espèces naturelles et riches dAfrique par des multinatio- nales à des fins mercantiles. Or, la biodiversité doit être contrôlée par la population car elle appartient à tout le monde. L.P.B. : Autre point d’actualité la baisse des cours du prix du lait ? F.D. : Linterprofession laitiè- re qui fixe le prix du lait et qui rassemble lensemble des interlocuteurs na pas trouvé daccord avant de définir le prix du lait au producteur. On retrouve un prix quasiment uniforme des entreprises, donc on estime quil y a eu enten- te illicite pour baisser le prix du lait bien au-delà de ce que le marché les autorise selon un accord de 1997. Nous allons contester juridiquement cet- te situation. Pour vous don- ner lampleur de la baisse, on a touché un prix du lait en juillet 2004, équivalent à juillet 1989 alors que laug- mentation des prix depuis 16 ans est de lordre de 2 %. !
le principe de précaution. Face à un recours de lÉtat au tri- bunal administratif de Tou- louse contre un arrêté "pré- ventif" pris par le maire de Bax enHaute-Garonne, le tri- bunal a donné raison au mai- re et insiste sur les dangers que pouvait représenter la coexistencedes culturesO.G.M. et de cultures biologiques ou conventionnelles sur un ter- ritoire donné. Pour les collec- tivités, nous en sommes à 12 régions qui ont pris des déli- bérations dans ce sens et cela renforce notre combat contre les O.G.M. et dautres régions en Europe vont dans ce sens. L.P.B. : Vous semblez dénoncer la biotechnologie, mais par exemple dans le traitement des eaux usées industrielles, on y a recours ? F.D. : Cela na rien à voir car dans le cas des O.G.M., on tra- vaille sur du vivant, on prend un gène sur une espèce vivan- te pour le transférer sur une autre espèce vivante avec toutes les conséquences que cela peut avoir. Ensuite, le deuxième choc est dans la nature avec le transfert de pollen. De plus, derrière les O.G.M., se pose la question des brevets. À partir du moment où lon prend un gène dun produit et que vous le
porcs ou bovins pour le consommateur lorsque les animaux ont reçu des aliments provenant des plantes transgé- niques” Où en est-on sur cette question sanitaire et des risques pour le consommateur ?
un étiquetage pour informer le consom- mateur et de normes à ne pas dépasser quand on intègre des ali- ments dans des pro- duits à vocation ali- mentaire et en même temps, elle lève partiellement
“La position de la commission européenne est double.”
F.D. : Que demande la confé- dération paysanne depuis 1998, quil y ait des moyens financiers importants dans la recherche publique à travers le suivi de troupeaux qui consomment du maïs trans- génique pour évaluer les consé- quences sur la viande et sur le lait et ce sur plusieurs années. Cest la raison pour laquelle la Confédération pay- sanne demandait à lépoque unmoratoire sur 10 ans. Une étude a commencé dans une ferme expérimentale, cest-à- dire une école dagriculture publique en Maine-et-Loire. Cette étude a porté sur 3 à 4 mois de consommation de
le moratoire autorisant lim- portation dun maïs transgé- nique destiné à lalimentation animale. Mais létiquetage ne concerne pas les produits asso- ciés cest-à-dire les composi- tions de produits, par exemple mélanger plusieurs types de végétaux pour en faire un gra- nulé, même si ceux-ci sont issus de produits génétique- ment modifiés. On se moque de nous et de linformation du consommateur. La commis- sion européenne dit vouloir protéger le consommateur pour mieux céder aux pres- sions des multinationales et ouvrir ainsi la boîte de Pan- dore. On voit également com-
B est éditée par “Les Éditions de la Presse Bisontine”- 5 bis, Grande Rue - BP 83 143 - 25503 MORTEAU CEDEX - Tél. : 03 81 67 90 80 - Fax : 03 81 67 90 81
Propos recueillis par E.C.
E-mail : publipresse@wanadoo.fr Directeur de la publication : Éric TOURNOUX Directeur de la rédaction : Jean-François HAUSER Directeur artistique : Olivier CHEVALIER Rédaction : Thomas Comte, Gilliane Courtois,
GAGNEZ 80 PLACES AU CINÉMA MARCHÉ-BEAUX ARTS Les 80 premiers coupons se verront offrir 1 place de cinéma Merci de renvoyer votre coupon-réponse accompagné d’une enveloppe timbrée à l’adresse du journal La Presse Bisontine :
COUPON - RÉPONSE
Nom Prénom N°/Rue
Jean-François Hauser. Régie publicitaire : Besançon Médias Diffusion - Tél. : 03 81 67 90 80
Imprimé à I.P.S. - ISSN : 1623-7641 Dépôt légal : Août 2004 Commission paritaire : 1102I80130
Code
Ville
“La Presse Bisontine” 5 bis, Grande Rue - BP 83 143 - 25503 MORTEAU CEDEX
Crédits photos : La Presse Bisontine, Comité d’anim. Mamirolle, Confédération paysanne, Hom’art, Michel Marlin, La Missive, Syndicat Saône et Doubs, U.S.S.V.
Made with FlippingBook HTML5