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10 FAÇONS DE

NOTRE EXPERT

DÉJOUER LES MANIPULATEURS Qui n’a jamais été infléchi par un ami, un chef, un commerçant, à des fins plus ou moins honnêtes ? Si l’influence peut faire progresser, à l’extrême, elle peut soumettre et obliger à agir contre son gré. Voici comment y parer avec fermeté. Marie-Madeleine Sève

Frédéric Fanget médecin psychiatre, psychothérapeute

1 Neutraliser Le manipulateur utilise à une fréquence élevée des termes définitifs et toxiques. “Toujours”, “jamais”, “oui mais”, “en général”. Par exemple : “Tu présentes toujours les choses de travers” ou “Oui mais pour un commercial, ce n’est pas génial !”. Ces mots font mal à la relation, ils blessent. Car le malveillant zoome sur le détail qui pêche, minimisant la réussite. Il personnalise le discours avec des “tu” ou “vous”. En attaquant le moi profond de son interlocuteur, il le désarme, le déstabilise. Illustration : vous refusez à votre collègue Léa de décaler vos congés pour l’arranger, et elle réplique aussitôt, affligée : “C’est honteux ce refus ! Bien sûr, tu ne peux pas me comprendre, toi, tu n’as pas d’enfant !” Pour contrer Léa sereinement, accusez réception du message officiel “C’est vrai, je n’ai pas d’enfant”, ou bien employez les “mots magiques” qui renvoient l’autre face à lui-même : “Pourquoi ?”, “Qu’est-ce que ?”, “Qu’est-ce qui ?”, “Comment ?”, “C’est ton opinion”, “Et alors ?”. les réflexions cinglantes

3 Revenir sur La colère peut être manipulatoire, les enfants le savent bien lorsqu’ils trépignent pour arracher quelque chose à leurs parents. Pas question toutefois de se laisser entraîner dans un conflit, avec escalade de reproches, d’attaques et contre-attaques. À l’instar d’un couple sous tension, chacun dévalorisant l’autre un maximum pour lui faire mal et avoir le dessus, en vue de brimer sa liberté, notamment. En ce cas, Frédéric Fanget préconise la méthode PPR. « Il faut se centrer sur le problème initial (1 er P), les faits, sans se laisser juger, déprécier, mépriser. Sinon, vous serez une proie facile ! Ensuite, il s’agit de respecter la personne (2 e P), sans l’accuser, puis de préserver la relation (R), en se gardant de parler de séparation. » Un exercice difficile qui exige de prendre du recul. Entraînez-vous, sur des situations similaires du passé : qu’auriez- vous pu dire à l’époque ? Comment ? Sur quels éléments factuels ? « On peut remettre en cause un comportement, mais pas une valeur personnelle », insiste le praticien. les faits litigieux et y rester

2 Clarifier

le flou qui entoure une

demande suspecte L’idée est de relever des indices pour cerner ce que l’autre attend de vous, quand il vous pousse à bousculer vos plans ou à renier un engagement, ceci sous la menace de ne pas obtenir la promotion espérée, ou de ne plus être aimé. Souligné d’un insidieux “C’est toi qui vois !”. Dès lors, obligez la personne à se démasquer, grâce un questionnement progressif à la Colombo nommé par Frédéric Fanget, « enquête négative ». Ainsi, votre amie et voisine vous dissuade d’aller à votre dîner du 15 janvier avec vos copines de gym, à cause d’une “réunion importante avec les voisins”. Faites-lui en préciser le motif par des questions ouvertes, auxquelles on ne peut répondre ni par “oui” ni par “non”, et qui nécessitent des développements. “De quelle réunion s’agit-il ?”, “Pourquoi le 15 janvier, et pas le 16 ou le 17 ?”, “Quels sujets seront abordés ?”, “En quoi les problèmes dans l’immeuble sont- ils urgents ?”... Vous décèlerez si votre amie vous intimide dans son propre intérêt.

129 SANTÉ MAGAZINE I janvier 2019

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