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Dossier Santé

Connaître son patrimoine médical génétique permettrait de devenir un acteur plus autonome de sa santé, de pouvoir changer ou adapter nos modes de vie en fonction de nos risques individuels : tels sont les arguments avancés par les sociétés qui commercialisent ces tests. Mais ces promesses sont-elles réalistes ? CES TESTS VENDUS SUR INTERNET SONT-ILS FIABLES ?

quelques-uns des paramètres qui entrent en ligne de compte dans bon nombre de maladies que ces tests recherchent. Cela dit, est-ce utile ou pas d’avoir un panorama de nos prédispositions génétiques alors qu’on est en bonne santé ? Éléments de réponses, illustrés par des exemples concrets. CANCERS DU SEIN ET DE L’OVAIRE HÉRÉDITAIRES Tous les tests ne sont pas équivalents Celui de 23andMe, par exemple, ne cible que trois mutations pathogènes sur les gènes BRCA 1 et BRCA 2, mais surtout fréquentes dans la population juive ashkénaze. D’où une utilité discutable du test si l’on n’est pas dans ce cas. Celui de Color, qui promet de séquencer plus de 2 000 mutations sur ces mêmes gènes, semble a priori plus intéressant. « Toutefois, il va beaucoup moins loin que les tests proposés en France dans un cadre médical qui réétudient ces gènes de façon plus approfondie et en incluent d’autres, également impliqués dans ces cancers », nuance Antoine de Pauw, conseiller génétique à l’Institut Curie, à Paris. D’où un risque de mauvaise interprétation du résultat. Quel conseil alors ? Mieux vaut être accompagné par un spécialiste au moment où on découvre le résultat. « Un test positif peut induire une fausse angoisse car la mutation trouvée n’est peut-être pas délétère ou son implication est inconnue, explique le Pr Dominique

Les gènes étudiés sont répertoriés dans les études et les bases de données officielles.

NOS EXPERTS

C es tests utilisent notre salive pour décoder partiellement notre ADN, et cela ne pose pas problème puisqu’elle contient les mêmes informations que le sang. Le choix des gènes n’est pas non plus le fait du hasard, ceux étudiés étant répertoriés dans les études et les bases de données officielles comme associés à la ou aux maladies recherchées. Et les entreprises ne lésinent pas sur le nombre de mutations investiguées : plus de 500 000 toutes maladies confondues pour 23andMe, plus de 70 000 pour Atlas... De quoi être impressionné ! « Le problème est

Antoine de Pauw conseiller en génétique, Institut Curie

qu’à l’inverse des tests que l’on réalise dans un cadre médical, qui recherchent des gènes et des mutations bien précis selon le contexte personnel et médical, ceux que l’on achète sur internet cherchent un peu partout, à l’aveugle, souligne le Dr Catherine Bourgain, généticienne. Or, les risques calculés sur la seule information génétique ont une utilité clinique très discutable dans la mesure où tous les facteurs de risque ne sont pas pris en compte. » L’âge, l’hérédité, l’alimentation, l’activité physique, l’exposition ou non à des toxiques (tabac, pollution, pesticides...), les facteurs sociaux, le lieu d’habitation... sont en effet

Pr Dominique Stoppa- Lyonnet professeur de génétique à l’université Paris Descartes, responsable du service de génétique de l’Institut Curie

TEK IMAGE / SCIENCE PHOTO LIBRARY , T. FLASH / GETTYIMAGES - U. CHANTRAINE, P. LOMBARDI / INSTITUT CURIE (2) - A. BROOKES / NATIONAL PHYSICAL LABORATORY / SPL / PHANIE

44 SANTÉ MAGAZINE I janvier 2019

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