La Presse Bisontine 88 - Mai 2008

L’INTERVIEW DU MOIS

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La Presse Bisontine n°88 - Mai 2008

Poussif Le temps “béni” des usines qui embau- chaient à tour de bras est bel et bien révo- lu à Besançon. On nʼa pas su semer le terreau qui sonnerait la reconversion de lʼemploi local sur les ruines fumantes de la Rhodia et de Lip. Il a fallu plus de vingt ans dʼimmobilisme avant que lʼon pren- ne lamesure dʼun tel laisser-aller. Aujour- dʼhui, Besançon comme toutes les autres villes de sa dimension est entrée dans lʼère de la compétition entre les territoires. Et quoi quʼon dise sur lʼentente frater- nelle des anciens frères ennemis duNord Franche-Comté, de la proximité de pen- sée et dʼaction avec le voisin dijonnais (malgré la création récente dʼun réseau métropolitain de coopération), chacune de ces villes tire à soi le mieux quʼelle peut la couverture du développement économique. On est conscient que le dynamisme de lʼemploi ne peut plus pas- ser par lʼaccueil dʼun grand groupe, siè- ge dʼune entreprise internationale ou uni- tédeproductionpourvoyeusede centaines de postes de travail.Alors on compte les nouveaux emplois un à un. Le maire de Besançon se targue dʼavoir su créer les conditions de 2 000 créations dʼemplois entre 2001 et 2008, soit en moyenne un peu moins de 300 emplois par an. Mais dans ce calcul à lʼemporte-pièce, préci- se-t-on que sur ce lot dʼemplois, nom- breux sont ceux qui sont, soit des emplois “semi-publics”, sur Témis par exemple, soit des emplois “aidés” à travers des dis- positifs nés dʼune politique nationale (de droite qui plus est), comme dans la zone franche urbaine de Planoise par exemple. Un des indicateurs les plus embléma- tiques du moment (nous le verrons dans le dossier du mois), cʼest la nature des emplois proposés actuellement dans la région. Numéro 1des propositions : agents de service. Où sont les cadres, où sont les ingénieurs qui sont les premiers indi- cateurs de lʼattractivité dʼune région ? Le maire de Besançon le répète assez sou- vent : “Arrêtons de nous tirer une balle dans le pied lorsque l’on parle de l’emploi à Besançon.” Certes on a réussi à col- mater les brèches des crises industrielles passées en remplissant les cases lais- sées vides. Mais les chiffres sont là, pous- sifs. Avec leur glorieux passé, au moins Besançon et sa région pourraient deve- nir une antichambre dorée dʼune Suisse qui crée de lʼemploi à tour de bras et redo- rer ce blason terni de ville industrielle. Mais la volonté nʼy est pas suffisamment affirmée. Jean-François Hauser Éditorial

SPECTACLE

Actuellement à l’Olympia

Avant d’entamer son marathon à l’Olympia, l’imitateur numéro 1 est venu roder son spectacle dans le Haut-Doubs, à Pontarlier et à Villers-le-Lac. Impressions d’un homme simple et sain. Nicolas Canteloup : “Je gère mes imitations comme on gère une bonne entreprise”

L a Presse Bisontine : Vous êtes en per- pétuelle adaptation de l’actualité, y com- pris dans votre spectacle qui évolue qua- siment tous les jours ? Nicolas Canteloup : Sur Europe 1, on se concentre en effet uniquement sur l’actualité. Dans le spectacle aussi sauf que là, nous sommes obligés de créer des scènes intemporelles. Toutefois nous restons très réactifs par rapport à l’actualité. En ce moment, on en ajou- te tous les jours, du Sarkozy en par- ticulier. On a évoqué bien sûr Ingrid Bétancourt, le Tibet et les Chinois, etc. Avec les deux auteurs qui travaillent avec moi, on ajoute sans cesse des petites touches. Et comme on se com- plète bien, on a chacun son univers, ça donne un bon résultat. L.P.B. : En quelques années à peine, vous êtes passés du stade de quasi-anonyme à la réfé- rence actuelle des imitateurs. Comment ça se gère une notoriété si soudaine ?

d’équitation. Si demain je devais connaître un insuccès, je sais que je pourrais revenir sans problème à cet- te profession. Ça me donne une cer- taine sérénité par rapport à la noto- riété que j’ai aujourd’hui. D’ailleurs, je ne me sens pas faire une activité plus noble qu’un menuisier ou un bou- langer. Autre élément, je n’ai pas connu non plus la célébrité à 20 ans. Je pen- se que comme pour faire un bon maré- chal-ferrant, il faut au moins dix ans de pratique dans ce métier pour pou- voir prétendre à quelque chose. Je suis passé par les cabarets parisiens, le Club Méditerranée, avant de collabo- rer aux Guignols de l’info. Finalement, entre la première fois où je suis mon- té sur scène et aujourd’hui, 22 années se sont écoulées, alors que les gens me reconnaissent depuis trois ans à pei- ne. Ce vécu me permet de prendre du recul par rapport à un univers fait de paillettes et de caméras. C’est vrai que depuis que je suis aux côtés de Michel Drucker le dimanche, je suis bien plus exposé. “Vivement Dimanche” est une vitrine, mais si ça marche aujourd’hui, c’est que les fon- dations sont solides. L.P.B. : Pourquoi négligez-vous des voix com- me celles de Johnny ou de Depardieu par exemple ? N.C. : Je ne cherche pas à imiter des voix que d’autres maîtrisent très bien. Je n’ai pas envie d’aller me battre sur un terrain déjà bien occupé.Au contrai- re, ce qui m’amuse, c’est de m’aventurer sur un terrain vierge, en imitant des voix auxquelles le public ne s’attend pas. Même si l’imitation n’est pas par- faite, j’essaie avec mon enveloppe cor- porelle de m’approcher du personna- ge en accentuant une mimique ou même un phrasé. En ce moment, je

N.C. : On m’avait dit : “Méfie-toi de la noto- riété.” Mais ce qui est formidable, c’est que nous sommes en Fran- ce comme dans un vil- lage où tout le monde se connaît. Cette proxi- mité favorise les rap- ports avec les gens que je rencontre au quoti- dien. Le contact est plus facile encore car mon métier est de fai- re rire les gens. Leur approche est toujours très sympathique. L.P.B. : Comment éviter de “choper” la grosse tête ? N.C. : Mon métier, à la base, c’est moniteur

Nicolas Canteloup se produit jusqu’au 4 mai à l’Olympia.

“Je me base sur des fondations solides.”

travaille de nouvelles voix comme Oli- vier Besancenot par exemple. L.P.B. : Quel est votre rapport avec la “concur- rence” ? N.C. : Je pense qu’ils m’ont bien accep- té dans le “cercle”. Le contact est très fraternel avec Yves Lecoq. Quant à Laurent Gerra, je ne le connais pas beaucoup, je l’ai croisé quelques fois. Mais j’ai beaucoup de respect pour le bonhomme. Il est sur le point de prendre une année sabbatique mais je suis sûr

qu’il reviendra très fort.

L.P.B. : Où fixez-vous les limites de la causti- cité ou de la méchanceté à ne pas dépasser ? N.C. : Le critère est le suivant : si je suis capable de faire l’imitation face à la personne que j’imite, sans avoir honte, alors c’est la bonne limite. L.P.B. : Y a-t-il un secret pour durer dans ce métier ? N.C. : Je crois qu’il ne faut pas perdre de vue son cœur de métier et éviter de se disperser en se tournant vers d’autres domaines comme la chanson. C’est aussi important de se renouve- ler si vous voulez que le public ait tou- jours plaisir à venir vous voir sur scè- ne. Le danger, c’est la routine. En ce moment, c’est l’actualité qui veut ça, Nicolas Sarkozy revient beaucoup, sur- tout à la radio. Il occupe toute la scè- ne médiatique et laisse peu de place à d’autres personnages. Toute la dif- ficulté pour moi est de savoir comment faire plus exister ces personnages. Je gère mes imitations comme on gère une bonne entreprise en consacrant une large part de l’investissement à la “recherche et au développement”. L.P.B. : Avec le rythme que vous tenez, com- ment éviter le pétage de plombs ? N.C. : Mon hygiène de vie est simple : je ne sors jamais, je fais attention à ce que je mange, je bois beaucoup (de l’eau) et je parle doucement afin de préserver ma voix. En revanche, je manque de sommeil quand je suis en tournée. Je me couche tard le soir et je me lève tôt pour préparer la quoti- dienne sur Europe 1. Enfin, ça marche pour moi en ce moment donc je fonce. Ce serait au contraire difficile d’arrêter la scène, la télévision et la radio. Un jour, il y aura bien un moment d’insuccès où je pourrai lever le pied…

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Propos recueillis par T.C. et J.-F.H.

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