IFCAM a 40ans

DE NOUVELLES COMPÉTENCES POUR UNE BANQUE QUI S’ÉMANCIPE

Marketing du futur : un coup d’avance sur la concurrence

rare d’entendre pendant les visites « Comment ça ? Ce guichetier est multi-produit ? Mais il est impossible qu’un seul gars soit capable de parler de tout ! À chacun son métier ! » Tandis que les participants mesuraient dans le même temps tout l’intérêt de la polyvalence, tant pour l’organisation de l’entreprise que pour le salarié dont le métier devenait soudain bien plus intéressant. Aux États-Unis, le guichetier était capable de vendre une carte bancaire et de conseiller un placement... En France, à la même époque, le client devait prendre deux rendez-vous et lorsqu’il s’agissait de crédit, fonc- tion la plus noble, seuls le chef d’agence et son adjoint étaient habilités à en proposer. «Adapter le service au client que j’ai en face de moi, c’est aussi cela la servuction, et cela a naturellement eu un retentissement formidable sur la stratégie des Caisses régionales », rappelle Denis Tétu.

Lorsque tout le monde propose la même offre, l’enjeu pour l’entreprise est de se distinguer aux yeux du client en développant des services périphériques qui vont valoriser l’offre de base. Par exemple, avec une distribu- tion plus diversifiée, un accueil plus convivial ou une meilleure disponibilité des vendeurs. En 1984, c’était tout à fait nouveau. Pour anticiper l’avenir et si possible acquérir un coup d’avance, le séminaire emmène plusieurs fois par an une douzaine de participants dans de grandes villes américaines. Les visites sont préparées par Éric Langear et Pierre Eiglier qui disposent d’un prestigieux carnet d’adresses. Échanger au sommet des tours jumelles avec les banquiers de Wall Street ou étudier les plans marketing de talentueux patrons de chaînes de magasins populaires ouvrait le champ des possibles et « donnait le goût de la réussite » . « C’était devenu le must : 70% des directeurs généraux ont participé à ce séminaire, se souvient-on à l’IFCAM. C’était si passionnant que les Caisses régionales ont souhaité que les directeurs adjoints et les directeurs commerciaux y parti- cipent. » Le séminaire s’est élargi et les équipes de cadres de direction se sont elles aussi frottées à la culture de l’innovation et du changement, cette fois auprès des entreprises les plus en avance en Europe. DES VISITES DEVENUES EMBLÉMATIQUES Face à certaines pratiques, les directeurs géné- raux s’étonnent franchement. Par exemple lorsque les clients américains d’une grande agence de Chicago s’ar- rêtent avant le guichet, juste derrière un large trait mar- qué au sol. Il semblait impossible que l’on puisse un jour imposer à un client français de patienter sagement en ligne... Plus sérieusement, la polyvalence du person- nel des agences bancaires américaines a suscité bien des questions avant l’adhésion. Il n’était pas AUX ÉTATS-UNIS, PUIS EN EUROPE

Dans les années 80, le secteur bancaire n’est pas encore à la pointe du marketing. Au Crédit Agricole, les directeurs généraux de Caisses régionales sont en quête d’innovations qui leur permettront de faire mieux que les concurrents. L’idée pour prendre un temps d’avance: s’inspirer des entreprises américaines.

ALLER À LA SOURCE DE L’INNOVATION « Le coup de maître, c’est un séminaire appelé Marketing du futur proposé par deux hommes très inté- ressants : Éric Langear et Pierre Eiglier, qui connaissaient bien les banques aux États-Unis. Ils ont fait un tabac » , se souvient Jean Beaujouan, alors en charge du «perfec- tionnement dirigeants » à l’IFCAM. Ils vont permettre aux directeurs généraux des Caisses régionales de ren- contrer les dirigeants, les directeurs du marketing et les directeurs commerciaux des entreprises américaines les plus en vue. Éric Langear et Pierre Eiglier s’appuyaient, pour conduire le séminaire, sur le concept marketing de la servuction. LA SERVUCTION, UNE NOUVELLE FAÇON DE PENSER LE SERVICE CLIENT Le néologisme a été inventé par les deux hommes en combinant les termes service et produc- tion. « La servuction c’est la prestation d’un service, alors que la production concerne la fabrication d’un produit » , rappelle Denis Tétu, alors responsable des séminaires Marketing du futur. Il a intégré le concept de servuc- tion dans les formations commerciales et marketing à l’IFCAM. « Avec les notions de service global et de services périphériques, Éric Langear et Pierre Eiglier ont réussi à conceptualiser des idées que l’on pressentait déjà mais qui restaient éparses, et à mettre des noms sur ces concepts. »

«Adapter le service au client que j’ai en face de moi, c’est aussi cela la servuction»

GAGNER CINQ ANS SUR LA CONCURRENCE

Au cours des années 80, la FNCA et l’IFCAM lancent une vaste consultation pour accéder aux entreprises de service innovantes et réfléchir à des évolutions pour le Groupe. Un cahier des charges est établi à l’intention des meilleurs cabinets de consulting, dont les propositions sont soumises à un jury com- posé de cadres de direction en Caisse régionale, de membres de la FNCA, de la CNCA et de l’IFCAM. La meilleure proposition sera parfaitement ajustée aux attentes des Caisses régionales après quelques séances de co-création entre le cabinet retenu et l’IFCAM.

« La servuction, il faut que tout le monde s’y mette. » Les enseignements du séminaire sont si forts que les directeurs généraux demandent à ce que les concepts de la servuction soient enseignés à tous les niveaux, jusqu’aux chefs d’agence. C’est ainsi que les séminaires s’enchaîneront durant près de sept ans. Marketing du futur a bel et bien permis de gagner cinq ans sur la concurrence. Et si personne ne peut le prou- ver scientifiquement, nul doute qu’il a favorisé la diffu- sion d’une formidable culture de la relation client et de la distribution des services.

68

69

1976-2016 L’IFCAM a 40 ans

Ensemble, formons notre avenir

Made with