Journal C'est à Dire 95 - Décembre 2004

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D O S S I E R

Technologie La rupture technologique liée au quartz

Le Cétéhor, centre de recherche de l’horlogerie à Besançon a lancé très tôt les recherches sur le quartz.

Montrélec à Morteau s’est engagée dès 1971 dans la cour- se à l’élaboration de la montre à quartz. Lip en fera autant comme le Cétéhor. Toutes ces aventures importantes à l’époque se révéleront infructueuses.

remettre en cause le savoir-faire tra- ditionnel horloger. Au début des années soixante, la Franche-Comté est dotée d’un potentiel technique et scientifique suffisant dans le sec- teur du temps-fréquence pour lui per- mettre d’innover et envisager le pas- sage de la montre mécanique à la montre à quartz. À l’époque, en matière de recherche, l’industrie horlogère s’appuie sur le Cétéhor de Besançon, dont une des

L’ arrivée du quartz dans l’in- dustrie horlogère est syno- nyme de rupture technolo- gique pour tout un secteur d’activité. C’est l’amorce d’une nou- velle mutation dans l’histoire de la montre. Longtemps, les horlogers français assurés de leur savoir-fai- re technique en matière de fabrica- tion de montres mécaniques, ont été taxés de négliger l’entrée du quartz dans leur profession. Ils n’auraient pas su estimer le potentiel de cette technologie et investir dans la

recherche et le développement de nou- veaux produits, comme frileux face à l’innovation du moment et réfractaires au changement. Ou alors étaient-ils convaincus que le quartz resterait

confiné sur le marché, complémentaire à la montre mécanique. En tout cas, ces certitudes auraient contribué à la défaillance de l’horlogerie

missions est de se concen- trer sur l’étude de nou- velles technologies pour le compte des industriels de l’horlogerie. Par contre, le Cétéhor ne disposera

“Pendant quatre ans, le Cétéhor va épuiser toutes ses finances.”

centre technique bisontin qui dès le milieu des années soixante va le pre- mier engager les recherches sur la montre à quartz française.

Mais le Cétéhor n’a pas les moyens de ses ambitions, ce qui le conduit à s’as- socier un peu plus tard avec une filia- le du groupe Thomson-C.S.F. L’objec- tif de ce partenariat est de confier au géant de l’industrie électronique les recherches sur la montre à quartz. Le contrat est signé en 1968 et Thom- son doit fournir au Cétéhor 5 circuits électroniques horlogers potentielle- ment utilisables dans une future pro- duction française. Cette décision coû- tera plus cher qu’elle ne rapportera au centre de recherche. “Pendant quatre ans, le Cétéhor va épuiser toutes ses finances dans ce partenariat” souligne Évelyne Ternant, professeur d’écono- mie au lycée Pergaud et titulaire d’une thèse sur la question horlogère à l’époque. Finalement, Thomson ne va pas hono- rer son contrat, en termes de délais tout d’abord puisque le premier pro- totype est livré en décembre 1971. Ensuite, Thomson ne fournira pas 5 circuits et enfin “les prototypes pro- posés ne sont pas applicables à l’in- dustrie horlogère.” C’est une première désillusion pour la profession. Parallèlement au Cétéhor, deux entre- prises mènent des recherches sur la montre à quartz. Il s’agit de Lip à Besançon et Montrélec à Morteau. “Lip, dès les années soixante, réunit des condi- tions favorables à l’innovation” mais les concepts de montre à quartz déve- loppés par l’industriel bisontin ne réus- siront pas et disparaîtront avec la fin de cette entreprise. Il reste Montrélec créée en 1971. Le site de production se trouve à Morteau rue de la Glapiney. Cette entreprise est composée de différents actionnaires dont les montres Cupillard-Rième, Cattin, Yema ou encore Thomson-C.S.F. (au total 13 partenaires). L’intérêt de ce groupe est son association de com- pétences car il réunit à la fois des élec- troniciens (Thomson) et des horlogers capables d’assurer la partie mécanique du mouvement. Montrélec parvient à commercialiser 5 prototypes à base de mouvement quartz L.C.D. (affichage numérique), produits à Morteau, et un mouvement quartz analogique, entre 1977 et 1980. Mais finalement, l’aventure de Montrélec s’achèvera dès le début des années quatre-vingt quand l’entreprise est absorbée par Frame- lec. Certains observateurs de cette période constatent que les choix tech- nologiques décidés par Montrélec offraient peu d’avenir sur la montre à quartz. La chute des prix vertigineu- se des produits L.C.D., consécutive à l’arrivée sur le marché des productions asiatiques, n’a rien arrangé. Finalement, l’industrie horlogère fran- çaise a tenté rapidement de se posi- tionner sur le marché de la montre à quartz, sans y parvenir réellement suite à des déboires technologiques, financiers et des difficultés d’organi- sation. Malgré tout, dans ces condi- tions, qu’il s’agisse de la montre à quartz analogique ou numérique, l’hor- logerie française a dû se résoudre à admettre ses difficultés à lutter contre une forte concurrence sur un mar- ché français progressivement envahi par des montres étrangères commer- cialisées par des sociétés telles que Seiko. ! T.C.

française. Mais ce jugement est trop rapide, voire erroné même si, en effet, le développement du quartz va

peut-être pas de moyens suffisants pour mener pleinement ses investi- gations. En revanche, c’est bien ce

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