Journal C'est à Dire 95 - Décembre 2004

D O S S I E R

14

Paramètre La formation méritait d’être renforcée Les entreprises horlogères du Haut-Doubs auraient ressenti trop tard l’importance de ren- forcer les compétences dans des domaines com- me la commercialisation des produits.

Immobilier La métamorphose d’un patrimoine industriel De grands bâtiments industriels, symbole de l’activité horlogère mortuacienne dans les années 60-70 ont quelquefois été reconvertis en appartements.

L ’usine Cattin est aujour- d’hui une pépinière d’en- treprises, la société Maillardet rue Neuve abrite désormais le centre d’ai- de au travail (C.A.T.) et les grands bâtiments de Framelec situés à proximité de l’hôpital ont été transformés en appar- tements. Ces trois sites indus- triels qui figurent parmi les sym- boles d’une activité horlogère mortuacienne florissante dès les années soixante, ne sont plus que l’ombre d’eux-mêmes. Avec la transformation de ces ensembles immobiliers, une page s’est définitivement tournée sur tout un pan de l’histoire éco- nomique locale. On en oublierait presque l’in- novation de Cattin dans la construction de la nouvelle usi- ne en 1960 qui s’est accompa- gnée d’une série de logements proposés au personnel de la socié- té. “Pour loger ses ouvriers, Cat- tin avait acquis l’équivalent d’un immeuble au Clos Jeune au moment où ce parc immobilier a été bâti” rappelle Maître Redou- tey, notaire à Morteau. Dans l’en- ceinte même de l’entreprise, 10 villas ont été construites - toutes les mêmes - pour loger les cadres. Ces maisons étaient, dit- on, à l’image de celle d’Émile Cattin, responsable de l’entre- prise à l’époque. “En marge de la partie professionnelle, il y avait également des appartements situés route de Villers-le-Lac, à la sortie de Morteau” dans les locaux où a débuté l’activité de cette manufacture horlogère. “Dans sa démarche, Cattin avait

E n 1971 est créée en Fran- ce une obligation pour les entreprises de contribuer à la formation de leur personnel. “Cette obligation de former s’ac- compagnait d’une obligation de moyens mais en aucun cas on ne s’est intéressé aux résultats” signa- le un spécialiste de la question qui a souhaité garder l’anony- mat. Dans les années quatre-vingt, ce professionnel intervenait juste- ment dans le Haut-Doubs dans le but de sensibiliser les indus- triels horlogers aux bénéfices que peut apporter la formation du personnel. “Le Haut-Doubs, com- me d’autres régions d’ailleurs, était plutôt en retard. Je pense qu’effectivement il y a eu un manque de clairvoyance de la part des sociétés par rapport à l’évo- lution de l’horlogerie et des com- pétences qu’elle implique. On assis- tait à un splendide isolement et à un manque d’anticipation.” La critique est sévère de la part de ce conseiller qui estime que le comportement des entreprises horlogères face aux propositions de formation du personnel est un des facteurs retenus pour expli- quer le déclin de cette industrie. “En tout cas, cela dénote d’un état d’esprit. En Suisse et en particu- lier dans l’industrie horlogère, la formation professionnelle est importante, ce qui permet de tenir un niveau de compétence” dit-il. Dans le Haut-Doubs, elle serait

restée marginale. “Les sociétés ne voyaient pas comment cela pou- vait les aider à finaliser un pro- jet d’entreprise. Bien souvent, les crédits formation utilisés n’étaient pas compatibles avec l’objet de la société. Pendant des années, j’ai vu une entreprise horlogère de Morteau envoyer son personnel à des stages de couture ou de pêche…” La sensibilisation s’est faite tar- divement suivant les bassins d’emploi. Dans le Haut-Doubs, elle intervient quand l’activité horlogère rencontre de sérieuses difficultés dans les années quatre- vingt. “Les entreprises avaient indiscutablement de très bons techniciens dont certains ont été happés par la Suisse. Ils pen- saient que maîtriser la technique était suffisant. Mais la réussite, c’est aussi être performant dans le marketing, la gestion, la logis- tique, les modes de distribution, qui sont des fonctions supports à l’activité principale d’une socié- té. Quand les problèmes appa- raissent, des entreprises mor- tuaciennes ont commencé à lan- cer des grands programmes de formation de leurs commerciaux pendant deux années de suite, mais il était trop tard. Dans cer- taines sociétés, il y a eu un endor- missement.” La formation n’aurait sans dou- te pas sauvé l’horlogerie mais peut-être aurait-elle contribué à son adaptation. !

Les locaux de Framelec sont aujourd’hui des appartements.

Aujourd’hui, parmi les anciennes sociétés horlogères qui ont dis- paru, rare sont celles à avoir été réindustrialisées au moins par- tiellement comme Cattin. Les

une politique très avant-gardis- te. Il y avait finalement un petit côté paternaliste. C’est lui qui a insufflé ce phénomène dans le Val de Morteau, que l’on retrou-

été vendus, les acquéreurs ne se pressaient pas au portillon. Un seul acheteur s’est présenté, à savoir la société Ambre” racon- te un proche du dossier qui ajou- te que “beaucoup de fabriques mortuaciennes ont été vendues aux enchères.” À ce jeu-là, les professionnels de l’immobilier ont mis la main sur des centaines de m 2 disponibles, pour transformer le patrimoine industriel qui pouvait l’être, en de vastes programmes immo- biliers. !

observateurs du mar- ché de l’immobilier s’accordent à dire que ces bâtiments datés des années soixante sont souvent trop spa- cieux et inadaptés

ve à Villers-le-Lac avec l’entreprise Parent qui avait également des logements” précise Maître Redoutey. Tout le patrimoine Cattin a été vendu aux

“Cattin avait acquis l’équivalent d’un immeuble au Clos Jeune.”

enchères publiques au début des années quatre-vingt-dix suite à la disparition de la société.

pour intéresser les industriels en quête de locaux. “D’ailleurs, quand les bâtiments de Kiplé ont

Le Val de Morteau en photos Retrouvez dans ce livre plus de 100 photos originales de votre région

Le Val de Morteau

de A… à Z

Photos Didier Jacquot

En vente dès le 26 novembre 2004 Pour les fêtes de fin d’année, offrez un cadeau inédit ! Préface de Patrick Poivre d’Arvor

L’entreprise Maillardet est désormais le Centre d’Aide au Travail (C.A.T.).

Made with FlippingBook flipbook maker