La Presse Pontissalienne 236 - Juin 2019

16 DOSSIER PONTARLIER

La Presse Pontissalienne n°236 - Juin 2019

N é à Clerval en 1907, ce professeur est élu maire S.F.I.O. de Pontarlier en 1935. Dès l’Occupation le 17 juin 1940, il estime “qu’une armée défaite n’est pas un peuple vaincu” et appelle non pas à la résistance mais à l’insoumission vis-à-vis des Allemands et de Vichy. Il a le courage de dire “non.” Il est la conscience des Pontissaliens. Chaque semaine, il rédige l’éditorial de La Presse Pontissalienne qui s’est subs- tituée aux trois hebdomadaires locaux. Avec courage et ironie, il écrit auMaréchal Pétain pour dénoncer l’obligation du cer- tificat de non-appartenance à la franc- Raymond Vauthier, le maire qui a dit non N é à Pontarlier en 1865, lemédecin des pauvres fut élu député à 31 ans. Il se convertit à l’islam en 1894 car il estime que la société musul- mane est basée sur l’organisation de la famille. Les principes d’égalité, de justice et de charité y sont à l’honneur. Il est aussi farouchement opposé à l’alcool qui fait des ravages dans le Haut-Doubs. Il aspire à réunir les trois religions mono- théistes pour fonder une religion univer- selle. Il s’interroge sur l’avenir de la colo-

LIVRE

Droiture et tolérance Trois figures de

l’histoire pontissalienne Dans son dernier livre “Trois hommes de cœur et de conviction” qui vient de sortir aux éditions Cêtre, Daniel Lonchampt revient sur trois Pontissaliens au destin hors du commun : le docteur Philippe Grenier, Raymond Vauthier et Jules Pagnier. Une leçon d’humanité

maçonnerie, lettre qui se termine ainsi : “C’est pourquoi je m’engage, M. le Maré- chal à ne faire partie que d’une seule association secrète, la France.” Il condamne toutes les compromissions, la prostitution, le marché noir, la délation, protège les familles juives. L’occupant l’expulse en zone libre en décem- bre 1940. Septembre 1944, retour à Pontarlier où il est brillamment réélu maire après la Libération. Nommé à Besançon, il sera le fidèle 1 er adjoint de Jean Minjoz jusqu’en 1971. Il décède en 1987. n nisation. “Si nous n’avons pas su faire des Français de ces peuples, ils nous chasseront” , estime-t-il bien avant la guerre d’Algérie. En changeant de religion, PhilippeGrenier s’attire les foudres de la presse, ce qui ne l’empêchera pas de bénéficier du soutien de Jean Jaurès qui voit en lui le protecteur des populations colonisées. Assez visionnaire, il annonce déjà en 1897 la menace d’une Première guerre mondiale en estimant que la France est menacée par la TripleAlliance. Idem en 1940 quand il alerte le général Weygand, futur commandant de l’armée française. “Nous allons probablement être entraînés dans une nouvelle guerre mondiale qui nous causera des difficultés plus grandes qu’en 1914.” En 1940, il se met à la disposition des autorités au cas où l’occupant réclamerait des otages. Le Saint homme décède le 25 mars 1944. n

B ien dans son Haut-Doubs et à Pontarlier, Daniel Lonchampt s’intéresse depuis longtemps à l’histoire, matière qu’il a d’ail- leurs choisi d’enseigner après avoir travaillé à l’usine puis aux chemins de fer. Pourquoi a-t-il choisi de s’inté- resser à ces trois Pontissaliens sachant que d’autres méritaient sans doute le même intérêt à l’image par exemple de Paul Robbe ? “Les raisons ne man- quent pas. L’histoire de ces hommes hors du commun mérite d’être contée car ils ont mené des combats parfois au péril de leur vie pour défendre des idéaux inaliénables. Ce livre est un témoignage de reconnaissance qui per- met de constater que les luttes qu’ils ont menées restent encore d’actualité. Ce qui a guidé ma sélection s’explique aussi par l’abondance de matière au sujet de ces trois hommes. On dispose d’éléments biographiques, d’articles de presse, d’archives en quantité suffisante

jusqu’en Allemagne et en Autriche avant de devenir maire et de consacrer sa vie entière aumilitantisme syndical, associatif et politique. Ces trois hommes de cœur et de convic- tion au caractère bien trempé ont par- tagé les mêmes valeurs de tolérance, de solidarité, de patriotisme, de laïcité. “Les trois ont bien su faire la distinction entre l’Allemagne et le nazisme.À l’heure où beaucoup ne juraient que par la “haine du Boche”, ils poussaient déjà à la réconciliation. Avec lucidité et abnégation, ils luttèrent pour la paix et la concorde entre les peuples car ils voulaient croire que seule la construction européenne permettrait d’échapper à la fatalité des conflits à répétition en Europe.” Prémonitoire. n F.C.

pour s’engager dans un travail d’écri- ture” , justifie Daniel Lonchampt. Rendu célèbre pour sa conversion à l’Islam, élu député sans l’avoir prévu, le docteur Grenier reste, aux yeux de l’auteur, le protecteur des pauvres, des

populations coloni- sées et le défenseur des valeurs républi- caines et laïques. Raymond Vauthier est le premier maire de France démis de ses fonctions pour avoir dit non à l’oc- cupant et au régime de Vichy. Résistant de la première heure, Jules Pagnier com- battit l’ennemi

Ils poussaient déjà à la réconciliation.

Philippe Grenier, personnage de roman

Une séance de dédicace est organisée le samedi 15 juin de 14 heures à 18 heures à la librairie Rousseau

Jules Pagnier, une vie

au service des autres

Né en 1904 à Pontarlier, il s’investit très tôt dans l’action syndicale et entre au conseil municipal en 1935 sur la liste Vauthier. Ce résistant de la première heure sera arrêté trois fois puis relâché faute de preuves. En septembre 1942, il est contacté par le réseau Libération Nord et devient responsable pour le Haut-Doubs en œuvrant notamment à la diffusion de la presse clandestine pour contrecarrer la propagande de Vichy. En février 1944, sous le pseudo “capitaine Marion”, il prend part à la constitution du maquis et participe avec ses hommes à la libération de Pontarlier. En tant que

capitaine à la tête de la compagnie Alsace, il poursuit le combat à la cam- pagne des Vosges puis d’Allemagne jusqu’en Autriche. De retour à Pontarlier, après le départ de Raymond Vauthier, il est élu maire à l’unanimité. Démis au mandat suivant, il restera conseiller jusqu’en 1971. Il fut à l’origine de l’harmonie municipale, l’école de musique. Actif dans une ving- taine d’associations, il fut aussi la cheville ouvrière du jumelage avec Villingen en 1964. n

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