Journal C'est à Dire 103 - Septembre 2005

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D O S S I E R

Médecine

Sandra Deleule, de la réalité à la télé

À 33 ans, Sandra Deleule est médecin urgentiste. Une profession qui l’a conduite à s’engager aux côtés de Médecins sans Frontières, mais aussi à assurer l’assistance sanitaire sur des émissions de télé-réalité comme Koh-Lanta.

“J e suis médecin généraliste avec une spécialité urgen- tiste et médecine de catas- trophe.” Sandra Deleule est attachée aux services des urgences de Belfort. À 33 ans, elle n’en serait peut- être pas là si en 1989, elle n’avait pas participé à ce voyage humanitaire au Burkina-Faso organisé par le lycée de Morteau où elle était scolarisée. Pen- dant ce périple à travers l’Afrique, elle a passé le plus clair de son temps à obser- ver le médecin qui accompagnait l’ex- pédition. côtés de Médecins sans Frontières (M.S.F.). “J’ai toujours voulu faire de l’humanitaire” dit-elle. Mais de là à tout lâcher pour une mission de plusieurs mois en terre inconnue, tous les jeunes étudiants en médecine, aussi attirés soient-ils par l’aventure, ne sont pas prêts à le faire. Sandra Deleule a sauté le pas. Après avoir passé de longues années entre son bureau et les bancs de la fac de Besan- çon pour suivre des études astreignantes et qui finissent “par vous fermer l’es- prit” , elle a voulu prendre le large. Il y a un monde au-delà de nos fron- tières. En 2000, juste après sa thèse, la jeune médecin a fait ses bagages pour partir arpenter cette terre pétrie d’in- égalités et d’appel à l’aide. Après tout, peut-être aurait-on besoin d’elle ailleurs, sous d’autres latitudes. “J’avais dit à M.S.F. que je leur accordais six mois de De cette première approche est née la vocation pour un métier de contact qui plus tard va l’em- mener dans les campagnes les plus reculées de la Chine aux

mon temps. L’organisation m’a envoyé en Chine” raconte Sandra Deleule. Elle restera finalement sept mois dans la petite bourgade de Danian dans la pro- vince du Guanxi. Plus qu’un dépaysement, c’est une gifle émotionnelle et culturelle qu’elle reçoit à son arrivée. Elle découvre dans cet- te campagne à “9 heures de voiture du premier hôpital” , la réalité d’une Chine qui survit. Une image à l’opposé de cel- le que l’on a de ce pays en passe de deve- nir une des premières puissances éco- année d’école pour un enfant” raconte Sandra qui a débarqué dans le petit dis- pensaire du village à 2 500 m d’altitu- de. Sur place, le confort est sommaire. “Quand je suis arrivée, je me suis dit que je n’y arriverais pas. C’était sale, il n’y avait pas d’eau, pas d’électricité, ça sen- tait mauvais, l’air était humide. Mais après une bonne nuit de repos, c’était parti, tout allait mieux.” Un des objectifs de la mission de M.S.F. était de former des village doctors (méde- cins au pied nu) capable d’aller vacci- ner et prodiguer les premiers soins aux personnes isolées dans la campagne. Mais au quotidien, il faut gérer la tuber- culose, une flopée de maladies tropi- cales, des cancers, le S.I.D.A. Il faut s’adapter, trouver les moyens de contourner la barrière de la langue. “Au début, on a aucun repère.” Mais le tra- vail se fait. “Ce que j’aime dans l’hu- nomiques mondiales. Les cou- lisses sont moins réjouissantes. Les habitants du Guanxi sont des paysans qui vivent de la cul- ture de la terre. “Ils gagnent 25 euros par an. C’est le prix d’une

manitaire, c’est qu’on ne pratique pas que de lamédecine. Il y a toute une infor- mation à mettre en place pour expliquer l’importance de l’hygiène par exemple.” Le quotidien, c’est aussi la pression d’un système qui contrôle tout. “Toutes les communications sont écoutées, tous les courriers sont ouverts et les mails lus par les autorités locales” explique-t-elle. Malgré tout, Sandra Deleule s’est adap- tée à cette campagne où l’on vit par-delà la misère. “Les médecins chinois sont épatants. Je n’avais pas envie de ren- trer. Je ne me suis jamais senti aussi bien. Pourtant, partout où j’étais, il n’y avait aucun confort.” Finalement, Sandra Deleule a trouvé son équilibre loin du rythme trépidant d’une existence d’urgentiste. Elle n’ex- clut pas aujourd’hui de repartir pour d’autres missions avec Médecins sans Frontières. Mais dans l’immédiat, si ce n’est pas avecM.S.F. ce sera peut-être avecMédia- Médic, une société pour laquelle elle col- labore depuis cette année. Cette struc- ture assure l’assistance sanitaire sur des émissions de télé-réalité. Cet été, sur votre petit écran, vous avez peut- être aperçu Sandra Deleule dans l’émis- sion Koh Lanta. Elle est partie un mois en Nouvelle-Calédonie pour les besoins du jeu. “Je gérais l’assistance médica- le pour une centaine de personnes, qu’il s’agisse des techniciens où des partici- pants à l’émission. C’était très différents de l’humanitaire.” L’expérience est aux antipodes de son voyage en Chine. “Fran- chement, dans ce métier, je m’éclate, mais c’est presque un peu trop speed. ” O T.C.

“Franche- ment, dans ce métier, je m’éclate.”

Sandra Deleule a passé sept mois dans une campagne reculée de Chine.

Italie Destination Italie avec escale en Grèce

Originaire du Russey, Christelle Parrenin a rencontré son mari pendant une année universitaire en Grèce. Quatre ans plus tard, elle est partie le rejoindre en Italie.

S on histoire ressemble un peu à l’Auberge Espagnole, le film de Cédric Klapisch, sur une bande d’étudiants partis étu- dier et vivre pendant un an à l’étranger. Un peu par hasard, parce qu’un de ses professeurs lui avait proposé, Christelle Parrenin est partie en Grèce en tant qu’étudiante Erasmus, du nom du programme euro- péen qui facilite les échanges universitaires. C’était il y a dix ans. Originaire du Russey, l’étu- diante en histoire ancienne pré- pare alors sa thèse sur un écri- vain grec du II ème siècle après J.C. “C’est quelque chose qui transforme. Au retour, on a tous eu beaucoup de mal à se remettre. C’est tellement diffé- rent. Personne ne parle la langue locale, il y a une sorte d’exo- tisme. Et sur place, on rencontre rapidement d’autres étudiants et ce lien a quelque chose de très fort” , raconte Christelle. Entre deux recherches dans les biblio- thèques athéniennes, elle a aus- si rencontré Mario, un étudiant italien en échange universitaire comme elle. “On a gardé le contact pendant quatre ans,

elle sait déjà quelques mots des deux langues. Sa mère lui par- le français, son père italien, les parents parlent entre eux tou- jours français, “la langue qu’on a commencé à parler ensemble depuis le début. Difficile après de changer.” Pour sa fille, Chris- telle a arrêté son travail. Elle vient juste de reprendre en sep- tembre son poste d’enseignan- te de langue. Pour celui de joyeusement. La famille envisage de rester pour le moment en Italie, n’ex- clut pas un jour peut-être de s’installer de l’autre côté des Alpes, “cela dépendra du tra- vail, ce n’est pas forcément faci- le de trouver.” Et même dix ans après, Christelle et Mario gar- dent des liens avec Athènes, le lieu de leur rencontre. “On conti- nue à aller en Grèce régulière- ment. On a des amis sur place. Et même en France, on a tou- jours des contacts avec des amis français connus là-bas” , explique Christelle. O S.D. maître de conférence en France, elle a aban- donné. “Il faudra peut- être penser à faire autre chose” , dit-elle

le temps que je termine ma thè- se. Et puis je suis venu m’ins- taller en Italie. En fait au début, je ne savais pas pour combien de temps” , explique-t-elle. En 2000, quand Christelle arri- ve à Milan, la ville de son com- pagnon, elle ne parle que quelques mots d’italien. La vil- le du Nord de l’Italie est assez prisée des expatriés français mais il faut tout de même plus difficiles pour moi. Là, il y avait la famille de Mario, ses amis. À force, j’ai appris la langue. Même si les premières semaines, c’est dur, on est frus- tré car on n’arrive pas à dire ce qu’on voudrait.” Dans le même temps, elle a trouvé un poste d’enseignan- te de français dans une école privée pour adultes, des mana- gers ou P.D.G. qui commercent avec la France et donne tous les quinze jours des cours à l’université de Grenoble. Dans l’appartement, une peti- te fille gazouille. Daria a un an et demi. Entre les deux cultures, apprendre la langue, vite. “Mais j’avais déjà eu l’expérience de la Grèce, où les débuts avaient été beaucoup

Dans l’appartement, une petite fille gazouille.

Christelle, son mari Mario et leur petite Daria.

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