La Presse Pontissalienne 153 - Juillet 2012

DOSSIER

La Presse Pontissalienne n° 153 - Juillet 2012

20

RENCONTRE Une conteuse évoque le mystère de Saint-Point Légende de Damvauthier : “Une leçon sociale” Ancienne conteuse

Édith Montelle auteur de nom- breux ouvrages sur les légendes en Franche-Comté fut conteuse professionnelle.

taient du fond du lac ! C’est vrai !” martèle-t- elle. La légende de Saint-Point est pleine de raison. Place à l’histoire : Damvauthier était une ville superbe et riche. Les rues pavées d’or, comme le toit de l’église, brillaient de mille feux. Une nuit de Noël, une femme débarqua avec son enfant. Pauvre, celle-ci se rendit à la mairie demander de l’aide. L’édile la rejeta. Elle tenta l’église où le curé, bien portant, l’expulsa. Dans cette ville de richesse, la pauvreté n’avait pas le droit de cité. Elle gravit alors la colline et trouva réconfort sous un épicéa dont le tronc était creux. Elle tomba sur un ermite nommé Point qui vivait là. Il lui offrit un bol de soupe et l’invita à dormir en lui conseillant de ne plus bouger jusqu’au matin. Un terrible orage écla- ta. La femme ne bougea pas. Ce n’est que le len- demain matin qu’elle quitta son abri. Le soleil resplendissait… et la vallée qui abritait la fameu- se ville était devenue unmagnifique lac ! “Chaque légende à une raison. Celle-ci est une leçon socia- le. On pourrait dresser des parallèles avec les expulsions qui se passent aujourd’hui” émet Édi- th Montelle, auteur de nombreux ouvrages, dont “L’œil de la Vouivre” , qui a permis à cette légen- de de perdurer. Aujourd’hui encore, des pêcheurs disent prendre leur ligne dans la cité engloutie. D’autres ont entendu des coqs chantés. “Certaines légendes partent, d’autres reviennent. Indevillers (pla- teau de Maîche) a perdu sa légende de la fosse car plus personne ne passait à cet endroit. En revanche en Savoie, une légende du fantôme de l’auto-stoppeuse est née après que nombreux automobilistes aient aperçu une jolie dame avant un virage. Une fois dans la montée, celle-ci crie avant de disparaître” conclut d’une voix douce notre auteur, comme pour mieux entretenir le mystère. À vous d’y croire. E.Ch.

É couter la voix douce d’Édith Montelle, c’est entrer dans un univers merveilleux. Celui du conte, des légendes, où chaque détail géographique a son importance. Si cette ancienne conteuse profession- nelle spécialiste des légendes franc-comtoises et suisses a pris sa retraite, pour raison de san- té, elle a accepté de narrer à La Presse Pontis- À minuit le soir de Noël, on peut entendre les cloches sonner… professionnelle, Édith Montelle raconte la légende du lac de Saint-Point qui abriterait dans ses bas-fonds une ville dorée.

Zoom Les légendes suisses sont-elles différentes ? S elon Édith Montelle, les légendes venues de Suisse romande sont différentes des nôtres. “Elles sont plus rationnelles dans les régions protestantes” avoue la spécialiste qui prend lʼexemple de la Vouivre de Saint-Sulpice (entre Pontarlier et Neuchâtel). Là-bas, la Vouivre habitait dans la falaise et mangeait aussi bien des hommes que des enfants ou des vieillards, ce qui nʼest pas le cas en France. “Elle très réaliste puisque nous avons la date et le nom (Sulpi Rémond) qui lʼa combattu et abattu.” Mais comme en France, celui qui a réussi à la vaincre dans son repaire est mort trois jours plus tard. Le sang de la Vouivre lʼavait contaminé.

salienne la légende de Dam- vauthier plus connue sous le nom de cité engloutie du lac de Saint-Point. “C’est une bel- le légende car elle est à l’origine d’un lac, dit Édith Montelle. Le héros n’est pas un person- nage mais un lieu. C’est la fonction première d’une légen- de : donner une indication géographique.” Si cette légende est parvenue jusqu’à nous, c’est “parce qu’elle a une part de véraci- té” note la conteuse. “Allez à minuit le soir de Noël vous installer entre le lac de Saint- Point et celui de Remoray… Vous entendrez les cloches comme elles si elles remon-

“On entend les cloches.”

LA CLUSE-ET-MIJOUX La tragique

histoire d’amour de Berthe de Joux

L a bouleversante histoire d’amour de Berthe de Joux s’écrit entre mythe et réalité. Berthe est devenue une figu- re emblématique des femmes de la région. Sa triste destinée fut celle d’une épouse infidèle enfermée dans un donjon du majestueux château de Joux. Cette jeune fille fut mariée à l’âge de 17 ans au seigneur du châ- teau, le sire Amaury de Joux. Ce fut un mariage d’amour. Quand le sei- gneur dut partir en croisade, son épouse l’attendit recluse des années, espérant le retour de son bien-aimé. Quatre ans plus tard, un autre sei- gneur se présente, Aimé de Mont- faucon, ayant participé aux mêmes croisades qu’Amaury de Joux. Le sire annonce à la dame le décès de son époux.Après le chagrin, Berthe

succombe aux charmes de son nou- vel hôte. Mais une semaine plus tard, Amaury de Joux revient au château. Fou de rage, il enfer- me son épouse infidè- le dans un cachot d’1,30 m, où elle ne peut ni rester debout, ni s’allonger. L’amant

REMONOT Un sanctuaire guérisseur L’ axe Morteau-Montbenoît. Au bord de cette route empruntée par les Mor- tuaciens comme les Pontissaliens, la grotte de Remonot recèle dans son son de guérir les maladies oculaires. À la mort de l’ermite, les moines de Montbenoît ramenèrent

L’amant fut pendu…

Berthe de Joux a été enfermée au château de Joux avant de se retirer à l’abbaye de Montbenoît.

la statue dans leur monastère afin de bénéficier de ses faveurs, et pas dans un but très pieux, espérant récupérer les offrandes des pèlerins. Mais l’effet inver- se se produisit : le miracle se stoppa. La légende affirme que, une nuit, la statue reprit d’elle-même sa place dans la grotte. Les pre- mières tracent de ce lieu de pèle- rinage remonte au XII ème siècle.

antre d’une profondeur d’environ 30 mètres un lieu de pèlerinage. Un temple y est situé, dédié à Notre-Dame de Pitié. Un endroit sacré depuis la nuit des temps car la plaque située à son entrée rappelle que les druides gaulois y ren- daient déjà un culte à une déesse-mère, géné- ratrice d’abondance, source de fécondité. Au VII ème siècle, un ermite s’installa dans la grotte, où il plaça la statue de la vierge au pied de la source principale. Elle aurait le pouvoir

Un ermite s’installa dans la grotte.

fut pendu. Et pour ajouter à sa souf- france, Berthe était condamnée à sortir deux fois par jour pour voir le corps de son amant par une fenêtre. Après douze années d’enfermement, Amaury de Joux mourut, et Berthe fut libérée. Elle se retira jusqu’à la fin de ses jours dans l’abbaye de Montbenoît.

MONTLEBON La tombe du Colporteur

U ne légende qui fait froid dans le dos.Un jour d’hiver, vers 16 heures, un colpor- teur décide de passer de Suis- se en France en utilisant le che- min allant du Prévoux aux Fontenottes. Ce chemin se situe aujourd’hui non loin de Mont- lebon. Laissez votre voiture au croisement du Biot et emprun- ter le chemin qui monte à gauche, impressionnante rou- te taillée dans la falaise. En haut de cette falaise est un chaos

de pierres. Vous tomberez alors sur la tombe du colporteur. L’histoire peut commencer. Une tempête de neige s’abat et bloque dans la nuit le colpor-

conduisit jusqu’à l’homme qui était mort.À l’époque, on ne pre- nait pas le chemin des Sarra- zins pour se rendre en Suisse mais une route étroite. Le curé recouvrit le corps grâce à des pierres et redescendit au villa- ge. “Cette légende décrit le pay- sage et explique qu’il suffit de chercher la falaise et les rochers pour ensuite trouver le chemin conduisant jusqu’au village” explique ÉdithMontelle, conteu- se professionnelle.

teur. Alors que le curé du village des Fontenottes se mettait au lit, un ange est venu lui raconter la mésa- venture. L’ange prit le curé sur ses épaules et le

Le curé recouvrit le corps…

Made with FlippingBook Online newsletter