La Presse Pontissalienne 153 - Juillet 2012

LA PAGE DU FRONTALIER 36

La Presse Pontissalienne n° 153 - Juillet 2012

ASSURANCE-MALADIE Groupement et Amicale IL FAUT SAUVER LE LIBRE CHOIX Les associations de défense des travailleurs frontaliers poursuivent le combat pour que soit confirmée par le nouveau gouvernement la possibilité de choisir librement l’endroit où ils assurent leur famille. “Nous avons un vrai rôle social” Alain Marguet, le président de l’Amicale des Frontaliers, tire la sonnette d’alarme au sujet du libre AMICALE ET FRONTALIÈRE

Alain Marguet ne ménage pas sa peine depuis plusieurs années pour défendre ce dossier auprès de l’État français.

dent leur libre choix, mais sous la pres- sion de Bercy, tout le monde a plié. Je suis très déçu de nos parlementaires qui n’ont pas su défendre ce dossier crucial. L.P.P. : Vous gardez espoir ? A.M. : Il ne nous reste que deux plans de financement de l’assurance-mala- die, en 2013 et en 2014, pour arriver à nos fins. Nous continuons à nous battre. On craint pour notre avenir mais on a surtout le souci du porte- feuille de nos assurés. Si les fronta- liers sont obligés d’adhérer à la C.M.U. volontaire française, ça leur coûtera beaucoup plus cher aussi. J’espère vrai- ment que le bon sens et la raison l’emporteront en faveur des 140 000 frontaliers français qui travaillent en Suisse. L.P.P. : Pour la Frontalière, ça représente quoi ? A.M. : On a 14 000 assurés, soit 10 % de tous les frontaliers. Et pour nous, c’est 13 bureaux, de l’Alsace à la Hau- te-Savoie et 27 salariés. Nous avons surtout un vrai rôle social vis-à-vis de nos assurés. En 50 ans d’existence, nous n’avons jamais laissé un seul d’entre eux sur le bord de la route. Nous sommes une mutuelle solidaire et res- ponsable et nous comptons bien le res- ter. Propos recueillis par J.-F.H.

choix de l’assurance-santé, gravement menacé après l’échéance-butoir de 2014.

GROUPEMENT Transfrontalier Européen “Faire le maximum pour garder ce statut” Le secrétaire général du Groupement Transfronta- lier Européen se dit relativement optimiste sur la poursuite du système actuel. 32 000 pétitions sont déposées le 26 juin sur le bureau du préfet.

L a Presse Pontissalienne : Les fronta- liers peuvent bénéficier du libre choix pour s’assurer auprès d’une compa- gnie d’assurance privée. Jusqu’à quand ? Alain Marguet : Actuellement, les tra- vailleurs frontaliers ont en effet le choix : soit ils décident de s’assurer en Suisse auprès d’une assurance privée, soit en France également auprès d’une compagnie privée, soit ils décident de s’assurer à la C.M.U. volontaire en France, c’est-à-dire à la Sécurité socia- le. Leur intérêt de s’assurer à une com- pagnie privée française est avant tout financier : en Suisse, ce type de pres- tation coûte entre deux et trois fois plus cher. 95 % des frontaliers ont fait le choix de souscrire à une assurance privée française et c’est ce libre choix- là que l’on menace de supprimer après mai 2014. L.P.P. : Une vraie épée de Damoclès pèse donc sur eux et sur le devenir de compagnies com- me la Frontalière ? A.M. : Oui, on est un peu en sursis car

ce libre choix devait déjà être suppri- mé en 2009 et on a obtenu une pro- longation de ce délai de 5 ans, donc jus- qu’à mai 2014. Tout cela est dû aux accords bilatéraux signés entre la Suis- se et l’Union européenne. On s’aperçoit qu’au final, ce sont bien les Suisses qui sont maîtres de ces accords. En 2009, ils ont décidé par référendum de pour- suivre ces accords. Ils y ont intérêt car avec les accords, ils s’engagent avec l’Europe, mais pas autant que s’ils déci- daient d’intégrer complètement l’Union européenne. Ils tirent donc les avan- tages de l’Europe sans en avoir les inconvénients. L.P.P. : Aucun élu de la frontière n’a réussi à faire plier l’État français sur cette question du libre choix ? A.M. : Non, malgré les réunions innom- brables qui ont eu lieu à ce sujet. Les 10 députés des territoires frontaliers avec la Suisse, de l’Alsace à la Haute- Savoie, étaient U.M.P. jusqu’à main- tenant. On s’était tous mis d’accord avec eux pour que les frontaliers gar-

L a Presse Pontissalienne : Le Grou- pement Transfrontalier Européen n’est pas une compagnie d’assurances et pourtant, vous vous battez pour le maintien du système. Pourquoi ? Jean-François Besson : Faisons juste un petit rappel historique. En 1963, quand s’est créé le Groupement, les travailleurs frontaliers n’avaient aucune couverture sociale ou mala- die. Quelques frontaliers un peu fédérateurs se sont mobilisés en créant cette association et c’est seu- lement en 1964 que par l’intermédiaire de la compagnie la Strasbourgeoise ils ont commencé à être couverts. Nous avons donc depuis le début accompagné nos adhérents pour qu’ils obtiennent satisfaction enmatière d’assurance- maladie et notre volonté a toujours été d’adapter le plus possible les contrats d’assurances aux besoins des frontaliers. Depuis le début, c’est la Strasbourgeoise qui prélè- ve les cotisations des frontaliers pour notre compte. Nous sommes donc liés. Ceci dit, cette histoire d’assurance- maladie n’est pas une question de survie pour nous contrairement à des mutuelles ou certaines compa- gnies d’assurances. En revanche, en tant qu’association, nous faisons du “corporatisme” et on a deman- dé à nos 35 000 adhérents leurs désirs.À 99,9 %, ils souhaitent conti- nuer à bénéficier de ce libre choix. L.P.P. : Malgré tout le travail des associa- tions de défense, ce sujet fait toujours débat ? J.-F.B. : Oui car nous ne sommes pas forcément dans une situation stable entre l’Union Européenne et la Suis-

se, les choses peu- vent bouger, donc il faut faire le maximum pour garder ce statut le plus longtemps possible. L.P.P. : Vous êtes plu- tôt optimiste ? J.-F.B. : Je pense que l’on finira par obtenir gain de cause, je suis rela- tivement optimis- te. Car si cette pos- sibilité de libre choix est suppri- mée, il y aura des retombées sur des dizaines de cabi- nets d’assurances situés le long de la frontière. Certains

“Des retombées sur des dizaines de cabinets d’assurances.”

Des frontaliers galèrent pour être pris en charge L a Ligue contre le cancer accompagne quelques travailleurs frontaliers malades confrontés à des difficultés de prise en charge. Ils sont assurés en Suisse où les démarches administratives sont plus lourdes pour être reconnus comme invalides et obtenir une rente adaptée. “Cʼest plus compliqué et plus long quʼen France. Il y a beaucoup dʼexamens médicaux, énormément dʼexpertises. Lʼassurance statue sur un pourcentage dʼinvalidité à partir duquel sera défini le montant de la rente. Le temps que tout cela se mette en place, la personne nʼa souvent plus de ressources” remarque le comité du Doubs de la Ligue contre le can- cer. Privé de ressources, un travailleur frontalier malade tente dʼobtenir de lʼaide du côté des institutions sociales françaises qui pourraient lui accorder le R.S.A. Mais pour cela, la C.A.F. veut avoir la certitude quʼil ait enga- gé toutes les démarches auprès de lʼAssurance inva- lidité suisse. La lourdeur administrative augmente enco- re le délai de prise en charge.

travaillent à 70 % avec les fronta- liers. Si la question n’est pas vita- le pour nous en tant qu’association, elle l’est pour nos adhérents. Ce n’est pas un hasard si la pétition que nous avons lancée a recueilli plus de 32 000 signatures. Elles sont déposées ce 26 juin sur le bureau du préfet de Haute-Savoie pour qu’il les transmette au gou- vernement. La mobilisation des frontaliers sur cette thématique est extrêmement forte. Sur cette question, il y a certes l’aspect financier qui prévaut, mais il y a aussi cette question rela- tionnelle entre les assurés et leur compagnie privée, des relations de confiance profondes que l’on sou- haite vraiment maintenir. Propos recueillis par J.-F.H.

Jean-François Besson, secrétaire général du Groupement Transfrontalier Européen.

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