La Presse Pontissalienne 153 - Juillet 2012

LA PAGE DU FRONTALIER

La Presse Pontissalienne n° 153 - Juillet 2012

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VAL DE TRAVERS 1 500 ouvriers La saga Dubied, un pan de l’histoire industrielle locale Le Val de Travers et Couvet en particulier ont vécu pendant près de 120 ans sous la “tutelle économique” de l’entreprise Dubied, le fabricant de machines à tricoter.

Henri-édouard Dubied fait construire en 1867 à Couvet une petite fabrique de machine à tricoter.

machines à tricoter une division de mécanique générale et de décolletage. Il ouvre en 1898 une première succursale à Pontar- lier spécialisée dans les pièces pour cycles et automobiles. Après des études commerciales, son fils Pierre-Édouard Dubied entre dans l’entreprise familia- le en 1905 pour en prendre la direction en 1911. Il développe la production et les activités sociales : infirmerie, réfectoire, assurance-maladie…L’entreprise investit aussi dans la construc- tion de logements pour son per- sonnel. Elle possède ainsi une bonne partie du patrimoine immobilier du Val de Travers.

machines à tricoter circulaires. Après son décès en 1955, son gendre Rodo de Salis puis son petit-fils Sker de Salis occupent l’un après l’autre la fonction d’administrateur-délégué au conseil d’administration. Les années 1967 à 1972 furent glorieuses. Le groupe Dubied occupe alors près de 2 900 col- laborateurs sur sept sites. La suite fut plus morose, marquée par une lente agonie jusqu’au dernier soupir en 1987. Les causes du déclin furent mul- tiples. “Dubied fabriquait d’excellentes machines mais elle a raté le virage de l’informatique et de l’électronique, résume Jacques Kaeslin. On peut aussi signaler que c’est la seule failli- te qui ne se termine pas par des chiffres noirs.” En effet, la liqui- dation des actifs permit aux liqui- dateurs de rembourser tous les créanciers, principal et intérêts, et de servir en plus un dividen- de aux 60 000 actions et 20 000 bons de participation dont était composé le capital social. Du jamais vu.

ou Peugeot dans le pays deMont- béliard” , explique Jacques Kaes- lin, un passionné d’histoire loca- le. À l’origine de la saga Dubied, un coup de baguette de la Fée verte.La familleDubied a d’abord prospéré dans le commerce d’absinthe. Fils de distillateur, Henri- Édouard Dubied fonde l’entreprise en 1867. Cet ingé- nieur-mécanicien a fait ses gammes dans plusieurs usines de construction navale en Fran- ce. Toujours en 1867, il découvre à l’exposition universelle de Paris une machine à tricoter à main inventée par un américain dont il acquiert le brevet pour l’Europe. Il se lance dans la fabrication à Couvet. “Il fut confronté au défi industriel de regrouper unemain- d’œuvre jusqu’alors dispersée” , poursuit Jacques Kaeslin. Son fils Paul-Édouard Dubied lui aussi ingénieur-mécanicien n’a d’autre choix que de reprendre les rênes de l’entreprise au len- demain de la mort de son père en 1879. Il n’a que 23 ans. En 1896, il adjoint à la division des

P rès de 1 500 collabora- teurs travaillaient sur le siteDubied àCouvet vers 1970. Soit pratiquement

un quart de la population acti- ve du Val de Travers. “Dubied à Couvet, c’était l’équivalent de Michelin à Clermont-Ferrand

Vers la réhabilitation d’une friche industrielle Suite à la faillite en 1987, le site Dubied a été bradé à vil prix, puis morcelé et revendu “par tranches” à de nombreux propriétaires. Depuis lors, des activités por- teuses se sont redéveloppées dans plusieurs secteurs : centre de formation, artisans, P.M.E. Le site dispose encore dʼun poten- tiel de développement considé- rable, notamment dans toute sa partie centrale, qui est quasiment à lʼétat de friche. Ce constat a incité les autorités locales à enga- ger depuis quelques mois des études visant à élaborer un concept global de revalorisation du site.

Édouard Dubied & Cie devient une société anonyme en 1919 avant le transfert du siège et de la direction de la firme à Neu- châtel. Pierre- Édouard rachète en 1935 une société allemande qui fabrique des

Le dernier soupir en 1987.

Le site de Dubied va se développer au fil des générations. Il s’étend aujourd’hui sur près un kilomètre au bord de l’Areuse.

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