La Presse Bisontine 83 - Décembre 2007

DOSSIER

La Presse Bisontine n°83 - Décembre 2007

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MARCHÉS PUBLICS

PRÉVENTION 1 411 000 personnes “Sur les chantiers,

Règle du moins-disant

Les collectivités ont leur responsabilité L’attribution des marchés publics aux moins-disants encourage- rait le recours par les sociétés concernées à une main-d’œuvre en situation irrégulière. La ville de Besançon dément.

exigeons la carte” L’Union des caisses de France du réseau congés intempé- ries B.T.P., est en train de doter tous les salariés des entreprises du secteur d’une carte d’identification profes- sionnelle. Cet outil de contrôle du personnel sur les chan- tiers doit permettre de lutter contre le travail illégal.

L es organisations profes- sionnelles estiment que les collectivités, dans le cadre de l’attribution de marchés publics, ont leur responsabilité dans la dérive d’un système qui conduit à l’emploi d’une main- d’œuvre en dépit du respect du code du travail. Récemment, Alain Boissière, président de la F.F.B. du Doubs a déclaré : “Toutes ces déviances sont en fait encouragées par une recherche trop systématique du prix le plus bas, y compris dans le cadre de marchés publics et les maîtres d’ouvrage ferment alors les yeux sur des conditions d’exécution de leurs travaux into- lérables au regard du droit social.” En résumé, lorsqu’une collecti- vité, pour des raisons écono- miques, retient l’entreprise la moins-disant, la F.F.B. sous- entend que cela n’est pas for- cément sans conséquences. Il n’est pas exclu que la société

qui décroche le chantier trouve le moyen de tenir les prix fixés en jouant sur la main- d’œuvre, tout cela sans rogner ses marges. “Quand il y a 25 à 30%d’écart de prix entre les sociétés qui répon- dent à un appel d’offres, cela devrait interpeller le maître d’ouvrage” poursuit Jean-Claude Rei-

Un jugement hâtif pour la vil- le de Besançon qui affirme que dans son cas, “la règle dumoins- disant n’est pas celle qui est rete- nue. Pas un seul marché public n’est attribué sur la seule base du prix.” À partir de là, la municipalité estime cependant que la règle qu’elle applique ne l’écarte pas du risque de l’emploi d’une main-d’œuvre clandestine sur les chantiers qu’elle chapeau- te. C’est le problème des sous- traitances en cascades organi- sées par des sociétés du bâtiment travaux publics recon- nues. Elles décrochent un mar- ché avant de confier certains lots à des sous-traitants qui à leur tour vont sous-traiter une partie des opérations. Et la mai- rie de Besançon de conclure : “À partir de là, nous n’avons pas la possibilité ni légale, ni humaine d’effectuer des contrôles.” T.C.

“Il y a 25 à 30 % d’écart de prix.”

chard, secrétaire général de la F.F.B. du Doubs. Il ajoute : “Ce qui est condamnable, ce sont les prix aberrants. Quand quatre entreprises se tiennent dans un mouchoir de poche en termes de prix au moment d’un appel d’offres, et qu’une cinquième est 30 % en dessous des tarifs pro- posés par ses concurrentes, on peut supposer qu’il y a forcé- ment un loup.”

Le dispositif prévoit que chaque salarié ait sa carte sur lui qui certifie qu’il est en règle.

C’ est la règle, chaque personne qui intervient sur le chantier de la ligne L.G.V. doit porter un bad- ge. Une sorte de carte d’identité de travail sur laquelle figurent notamment le nom, le prénom et la photo du titulaire. Tous les employés sont censés l’avoir sur eux. Les équipes de sécurité qui circulent sur le site sont particulièrement attentives au respect de cette consigne. La carte est d’abord un moyen de contrôler le personnel détaché sur le projet. Mais cette accrédita- tion est aussi une manière de lutter contre le travail illégal, une dérive possible sur un chantier d’aussi grande ampleur. L’initiative que vient de prendre l’Union des caisses de France du réseau congés intem- péries B.T.P. s’inscrit dans lamême démarche. Cet organisme a lancé une carte d’identification des salariés à destination de toute la profession du B.T.P. soit près de 1 411 000 personnes réparties dans 192 000 entreprises. Cette carte personnalisée est infalsifiable. Elle peut être vérifiée à tout moment “et à première demande sur les chan- tiers par les organismes de contrôle habili- tés et les donneurs d’ordres privés ou publics.” L’objectif est de “lutter contre toutes les formes de travail illégal sur les chantiers de B.T.P.

qui pénalise la profession et fragilise son avenir.” Cette initiative a reçu l’appui de la déléga- tion interministérielle à la lutte contre le travail illégal (Dilti). Plusieurs régions ont déjà mis en œuvre ce dispositif. “La carte vient d’être mise en place dans le Doubs” pré- cise l’antenne départementale de la F.F.B. B.T.P. Elle est envoyée systématiquement aux entreprises du bâtiment. À réception,

les sociétés n’ont plus qu’à y appliquer la photo de l’employé qui la portera. “Les entreprises n’ont pas été surprises de les recevoir. Le dispositif est plu- tôt bien accueilli. D’ailleurs, s’il ne l’était pas, nous le saurions.” Cette carte d’identification professionnelle est un pas en avant vers la réduction du tra- vail illégal. Mais cet outil ne sera véritablement efficace que s’il est accompagné d’un renforcement des contrôles sur les chantiers.

“Les sociétés n’ont pas été sur- prises.”

T.C.

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