Journal C'est à Dire 135 - Septembre 2008

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A G R I C U L T U R E

Agriculture

Fièvre charbonneuse : la situation n’est toujours pas maîtrisée Depuis le 3 juillet, la maladie a touché 41 bovins dans 21 élevages sur 10 communes du Doubs. On ne connaît toujours pas le scénario de cette contamination d’une ampleur exceptionnelle.

L e point de situation n° 4 établi par la Préfecture le 25 août précise qu’il n’y a pas eu de nouveaux cas de fièvre charbonneuse depuis le 18 août. Les derniers se situaient sur les communes de La Chaux et La Longeville. Le foyer primaire de la maladie s’est développé de proche en proche dans 8 communes au Sud du canton de Vercel : Athose, Nods, Vanclans, Chasnans, Ver- nierfontaine, Rantechaux et Pas-

sonfontaine. La contamination s’est élargie au canton de Mont- benoît pour des raisons encore inexpliquées. “C’est une maladie bactérienne que l’on sait dia- gnostiquer et traiter avec un vac- cin efficace pour les bovins et les ovins. Elle touche en général une ou deux exploitations. La situa- tion sur le Doubs est tout à fait exceptionnelle” , confie Huguet- te Thien-Aubert, chef du servi- ce santé et protection animale à la direction départementale des

services vétérinaires (D.S.V.). La fièvre charbonneuse est une maladie infectieuse due à une bactérie sporulée. Elle touche principalement les herbivores qui la contractent en mangeant de l’herbe contaminée par des spores présentes dans la terre. Ces spores sont des formes de résistance de la bactérie. Ils peu- vent persister dans le sol pen- dant plusieurs dizaines d’années. On les retrouve essentiellement sur les lieux d’anciens charniers te cette logistique génère pas mal de frais assumés pour l’instant par Olivier qui comp- te sur le soutien de sa coopé- rative. Depuis la vaccination, il prend tous les jours la température de ses bêtes et ce, pendant 15 jours. Le temps que le vaccin fasse effet. Lui aussi est sous antibiotique. “Je suis installé depuis 8 ans. C’est la première bête que je perds dans ces cir- constances.” Comme tout le mon- de, il s’interroge sur la dissé- mination de la maladie. “La seu- le chose qui passe ici, c’est les sangliers.” Chamboulé dans ses habitudes de travail, il ne semble pas pour autant désespéré. Il attendait par contre avec impatience le 29 août, jour où il a pu réinté- grer la fromagerie de La Chaux.

41 bovins ont été touchés jusqu’à fin août.

des inondations, de travaux de drainage, de terrassement ou de transport de terre. Les condi- tions météorologiques du prin- temps s’avéraient, par exemple, propices à cette remontée. L’abondance des précipitations a favorisé le lessivage des sols. “Cet épisode de fièvre charbon- neuse relève d’une conjonction d’éléments. Il est encore impos- sible de hiérarchiser ces facteurs de dissémination et de com- prendre comment ils ont fonc- tionné. On fouille diverses hypo- thèses en effectuant des analyses de terre, d’animaux, sur des son- dages géologiques. L’objectif étant d’aller le plus loin possible dans les investigations” , indique Huguette Thien-Aubert. L’hypothèse d’une propagation par la faune sauvage n’a rien donné. Tous les cadavres retrou- vés sur la zone sensible ont fait l’objet d’analyses à ce jour néga- tives. Dès qu’un cas de conta- mination survient dans un trou- peau laitier, les traites de l’élevage en question sont pas- teurisées immédiatement à titre de précaution. Le traitement thermique se poursuit 15 jours

utilisés avant la création du ser- vice public d’équarrissage au milieu du XX ème siècle. “Si l’herbivore qui a ingéré de l’herbe contaminée présente une lésion au niveau de son tube digestif, les spores se retrouvent dans l’organisme. Ils entrent dans un état actif qui réveille la bactérie. La maladie se développe très rapi- dement et prend une forme de mortalité suraiguë. La bête décè- de en quelques heures” , poursuit Huguette Thien-Aubert. Fait rarissime, la maladie est susceptible d’être transmise aux personnes, éleveurs ou vétéri- naires, ayant été au contact d’un animal porteur de la bactérie. Il n’existe pas de vaccin mais un traitement antibiotique préventif efficace. “En dehors des sources primaires bien localisées, on ne sait toujours pas comment cet- te maladie a pu toucher 21 éle- vages. Le scénario n’est pas enco- re maîtrisé” , confirme Cédric Chapuis, le directeur du groupe de défense sanitaire (G.D.S.). Comment expliquer autant de foyers ? Les spores peuvent remonter à la surface sous l’action de la microfaune du sol,

après la vaccination. La zone de vaccination préventive des ani- maux touche aujourd’hui 26 com- munes*. L’interdiction de chas- se est prolongée jusqu’au 5 sep- tembre sur l’ensemble de ce ter- ritoire en attendant les résul- tats d’analyses effectuées sur une dizaine d’animaux sauvages. Les travaux forestiers étaient également interdits jusqu’au 1 er septembre. Huguette Thien- Aubert estime qu’il faudra attendre aumoins jusqu’au 8 sep- tembre avant d’évoquer une situation stabilisée, sous réser- ve qu’aucun autre ne survienne entre-temps. F.C. * Arc-sous-Cicon, Athose, Aubon- ne, Avoudrey, Chasnans, Éche- vannes, Épenoy, Étray, Fallerans, Flangebouche, Gilley, Guyans- Durnes, Hautepierre-le-Châte- let, Lavans-Vuillafans, Lods, Longemaison, Mouthier-Haute- pierre, Nods, Orchamps-Vennes, Passonfontaine, Rantechaux, Vanclans, Vernierfontaine, Voires, La Chaux et la Longeville .

Témoignage

Le poids des contraintes

É leveur laitier installé la fer- me duLouiset sur la com- mune de La Chaux, Oli- vier Bolle-Reddat a perdu une de ses vaches, morte de fièvre char- bonneuse. “J’exploite des ter- rains sur Aubonne et Arc-sous-

Reddat qui suspecte la maladie et contacte aussitôt la D.S.V. Les conséquences sur la condui- te de son exploitation sont assez contraignantes. Sociétaire à la coopérative bio de La Chaux, il ne peut plus s’y rendre et doit

transporter sa produc- tion dans un atelier équipé pour la pasteu- risation. “J’ai loué un tank à lait et un petit camion-citerne pour

Cicon où je mets une partie de mes bêtes en pâture. J’ai donc vac- ciné tout mon troupeau (70 bovins) le 14 août.” La vie suit son cours.

“Le corps tout mou avec la tête noire.”

Le 17 août au matin, l’agriculteur trait ses vaches qui partent ensuite au champ. C’est en venant les chercher le soir qu’il découvre le cadavre. “Le corps tout mou avec la tête noire” , explique Olivier Bolle-

livrer mon lait chez Perrin à Clé- ron. J’y vais tous les deux jours. En même temps, je passe à Pas- sonfontaine chez un autre col- lègue dans la même situation que moi.” En plus de la vacci- nation (4 euros par animal), tou-

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