Journal C'est à Dire 251 - Février 2019

V A L D A H O N - P I E R R E F O N T A I N E

Marine, sa route face à la sclérose en plaques Touchée par une forme agressive de la maladie, la jeune femme prépare un road-trip en Europe pour délivrer un message aux patients touchés comme elle. Guyans-Durnes Pour l’aider

18 ans, elle ne ressent plus rien sur l’épiderme de la partie gauche du corps. Son petit ami lui conseille de consulter unmédecin. Ce dernier l’envoie à l’hôpital de Besançon qui diagnostique une hypoesthésie du corps gauche (perte de la perception des sensations). C’est - seulement - deux ans plus tard que la sclérose en plaques est déclarée. Un délai - long - qui permet à la maladie de l’affaiblir un peu plus avec l’appa- rition de lésions cérébrales, d’une lésion dans lamoelle épinière, d’une infection dans le liquide cérébro- spinal. La sclérose a malheureu- sement évolué : elle est devenue “récurrente-rémittente” mais la Franc-Comtoise - dont la grand- mère est décédée des suites d’une S.E.P. - s’est promis de se battre. “Je veux prouver que l’on peut sortir de sa zone de confort tout en prenant des précautions, donner des astuces aux malades. Certains ne savent pas que le centre anti-douleur existe à Besançon” ajoute-t-elle. Commerciale et désormais secré- taire dans une société automobile à Besançon, elle se lance dans un périple en van de 6 mois à travers l’Europe. C’est courageux. Fou à la fois. Le corps médical - qui la suit - émet des réserves mais Marine prend les devants : “J’ai fait un test en septembre dernier où, accompa- gnée d’une binôme pour ma sécurité, j’ai parcouru les pays latins (10 000 km dont 200 km de ran-

donnée pédestre). J’ai dû prévoir après plusieurs semaines une per- fusion à Marseille, partir avec tous mes cachets… Pour mon prochain voyage prévu en avril, je dois prévoir tout cela et je serai en contact avec mon médecin.” Elle devra gérer le soleil : trop de chaleur peut déclen- cher des symptômes neurologiques graves. Son chien Jessy l’accompa- gnera. “Je ferai des vidéos pour délivrer un message d’espoir avec mon dynamisme, donner des conseils sur la fatigabilité, dire aux malades qu’il ne faut pas hésiter à se rapprocher de la Maison dépar- tementale des personnes handica- pées…” Sa maman est inquiète. Normal. Mais rien n’arrêtera cette battante. n E.Ch. Samedi 2 mars, une conférence sur la maladie sera donnée avec le docteur Ziegler au Petit Kursaal à Besançon (16 heures). Les thèmes de la rééducation et de la douleur seront évoqués. Une cagnotte pour l’aider à financer son voyage est en ligne : https://www.helloasso.com/ associations/sep-go ou https://www.facebook.com/ sepandgo/

B oucles d’oreilles assorties à son pull rouge, visage longiligne et yeuxmarron pétillants, Marine Sau- geon - 31 ans - a l’apparence d’une femme comme les autres, en pleine forme. Mais à l’intérieur de son corps, elle souffre terriblement. Un mal invisible, handicapant, qui chaque jour la diminue un peu plus. Chaque effort est fatigant, les anti- douleurs censés apaiser ses maux ont nécrosé son rein droit, les coups de fatigue sont nombreux, ses mus- cles dysfonctionnent au point de ne plus la porter certains matins, son appétit et sa vue diminuent.

La cause : la sclérose en plaques, une maladie auto-immune qui touche le système nerveux central. 100 000 personnes sont touchées en France. Son moral, lui, tient. “J’ai décidé de me battre contre la maladie et lutter contre les discriminations car ce n’est pas parce que le han- dicap est invisible qu’il n’existe pas” présente la jeune femme, aussi déléguée départementale de la fon- dation pour la recherche sur la sclé- rose en plaques (A.R.S.E.P.) et pré- sidente de l’association “Sep and go”. Sa vie bascule à l’été 2006, lorsqu’à

Marine Saugeon et son chien Jessy partent en road-trip.

Réfugiés en C.D.I. à S.I.S. : “Ce sont nos pépites” Valdahon Sami était universitaire au Soudan, Shamsan ingénieur au Yémen. Ils ont fui la guerre. Après un long parcours, les voilà maroquiniers à Valdahon. Une nouvelle vie pour eux.

Devancés par Rachida Laithier, responsable de production, Sami et

I ls rêvent désormais d’ap- partement, de voiture, d’une stabilité perdue après avoir quitté leur pays en guerre. Sami le Soudanais, 29 ans, et Shamsan le Yéménite (32 ans) n’ont jamais caressé de si près l’espoir de vivre en paix, en totale autonomie. Après une

formation et un apprentissage du français en un temps record, les voilà maroquiniers en C.D.I., rémunérés comme les autres, seulement deux ans et demi après leur arrivée en France ! De la vie de réfugié à celle d’em- ployé, ils ont traversé de terribles épreuves sur lesquelles ils ne

préfèrent pas s’étendre. Rencontrés à la cafétéria de l’usine S.I.S. de Valdahon où ils travaillent depuis le 5 mai 2018, les deux hommes sont de fabu- leux exemples de réussite. “Sami - comme Shamsan - est devenu un maillon fort de notre équipe. Il a très vite appris le métier (et le français). Sa progression est rapide ! Il pourrait même l’en- seigner à d’autres car il possède une excellente dextérité et com- préhension des consignes pour confectionner une pièce” com- mente Rachida Laithier, forma- trice et responsable de produc- tion à S.I.S. Valdahon, une manufacture de produits de luxe. “Quand l’O.F.I.I. (Office français de l’intégration et de l’immigration) m’a proposé un travail, j’ai dit oui tout de suite” résume dans un très bon français Sami. Arrivé à Paris en provenance du Soudan le 25 octobre 2016, le Soudanais a dormi deux semaines dans la rue avant

Shamsan (à gauche) se rendent à l’atelier S.I.S. à Valdahon.

d’être envoyé en centre de réten- tion par la Police. Ont suivi des séjours en foyers, la demande d’asile, et cette histoire de “migrant” à raconter sans cesse. Il sera régularisé. “Le 23 février 2017, je suis transféré à Besançon où j’apprends le français, j’arrive

Le Yéménite a engagé des démarches pour que sa femme puisse le rejoindre. “Ils sont très volontaires, ils ont la niaque pour s’en sortir. C’est une véritable richesse car ils nous apprennent aussi à nous des mots, des cou- tumes” dit leur formatrice. Pour S.I.S., au-delà de la valeur économique, c’est une valeur sociale : “Ce n’est pas un coup de communication, nous avons des valeurs sociales. D’autres personnes - venues d’Afghanistan - ont intégré la société. Nous leur proposons un D.E.F. (niveau de diplôme en français)” explique la firme. L’intégration par le tra- vail, la clé de la réussite. n E.Ch.

a déposé une demande de loge- ments dans une agence immo- bilière pour s’installer à Besan- çon, une ville où il a quelques connaissances. À ses côtés, un café devant lui, Shaman l’ingénieur donne lui aussi entière satisfaction à l’en-

treprise S.I.S. Ingé- nieur civil, il a travaillé au Yémen puis deux ans en Arabie Saou- dite, pays qu’il a dû quitter “parce qu’il y a des difficultés pour les

le 28 mai 2018 dans l’entreprise” se remé- more le Soudanais, universitaire et qui fut chercheur d’or dans son pays pour gagner de l’argent. “Mainte-

Le Soudanais a dormi deux semaines dans la rue.

Yéménites à vivre là-bas” dit-il. Il a découvert la neige et le comté. Il loge dans un foyer à Besançon et comme son collègue, il monte tous les jours en train.

nant, c’est notre pépite à nous” lance la formatrice en guise de métaphore. Sami sourit : il com- prend le second degré. L’homme qui possède le permis de conduire

Les trois salariés réussissent leur intégration grâce au travail.

Made with FlippingBook flipbook maker