La Presse Bisontine 54 - Avril 2005

13 LE DOSSIER

L OTISSEMENT

D ÉCOUVERTE Chasseur de terres Les terrains traqués par des pros de l’immobilier Étudier le plan local d’urbanisme, éplu- cher le cadastre, la chasse aux terrains est ouverte pour les lotisseurs.

200 parcelles en 2004

Cette société immobilière figure parmi celles qui commercialisent le plus de terrains à bâtir chaque année. Mais elle s’interroge aujourd’hui sur ce marché caractérisé par une pénurie de foncier. La S.A.F.C. leader sur le marché de la construction

E n 2004, entre les régions de Besançon, Montbéliard, l’Alsa- ce et la Bourgogne, la S.A.F.C. a commercialisé 200 terrains. C’est un peu moins qu’en 2002. Cette année-là, 220 parcelles ont été ven- dues pour de la maison individuelle. À ce rythme, la société immobilière est un pro- moteur leader en Franche-Comté. Mais aujourd’hui, cette entreprise est confron- tée pour la première fois à une pénurie de foncier. “On termine un projet à Châ- tillon-le-Duc, où il reste 5 parcelles à com- mercialiser sur 31. Pour l’instant, c’est tout ce que nous avons à proposer aux acquéreurs dans le secteur. C’est la pre- mière fois que nous avons si peu d’offre” souligne Martine Coursimault, attachée de clientèle lotissement. Dans l’immédiat, la S.A.F.C. est en pan- ne. Impossible de répondre à toutes les demandes, caractérisées par des appels téléphoniques quotidiens de particuliers à la cherche d’un lopin de terre à Besan- çon ou sa proche couronne. Il faudra attendre le mois de juin pour que la situation évolue. “Des programmes vont sortir de terre à Auxon-Dessous, où

nous allons commercialiser 36 parcelles à environ 65 euros/m 2 . Dans lemême délai, un projet est en gestation à Pirey avec 32 terrains à bâtir (collectif et individuel) au prix de 75 euros/m 2 .” Début 2006, cette société immobilière commercialisera un lotissement à Besançon-Velotte au lieu- dit Échenoze de 21 parcelles. La S.A.F.C. a aussi un projet d’aménagement dans les cartons sur Saône. Ce déséquilibre entre l’offre et la demande est en partie responsable d’une fièvre des prix dans la région.

lorsqu’on proposait un projet sur une zone constructible, s’il était conforme au P.O.S., il était validé précise-t-on à la S.A.F.C. Maintenant, un dossier s’accompagne d’un certain nombre d’études préalables, concer- nant la loi sur l’eau, l’archéologie préven- tive. Résultat, à partir du moment où on démarche les communes pour un projet jusqu’à la commercialisation des parcelles, il faut compter entre 18 et 24 mois.” Un délai qui a doublé en 10 ans. Comme quoi les temps changent.

L’agence départementale d’in- formation sur le logement jus- tifie la réaction des municipa- lités “Pour une commune, le lotissement est presque syno- nyme d’investissement “à per- te” car ça engendre des frais importants. Il arrive qu’il faille

“Plus difficile de faire sortir de terre un lotissement.”

Pour les aménageurs, les ten- sions rencontrées sur le marché du foncier sont liées à deux phé- nomènes. Tout d’abord tant que les communes n’ont pas termi- né de réviser leur plan d’occu- pation des sols (devenu plan local

d’urbanisme) qui définit les zones construc- tibles ou non, la situation sera teintée d’in- certitudes. Ensuite, les municipalités sont plus attentives à leur développement face à cette frénésie immobilière. “C’est de plus en plus difficile de faire sortir de terre un lotissement. Les communes sont plus exi- geantes. Elles sont parfois frileuses. Avant,

recalibrer les écoles, mettre en place de nouveaux services. Le problème est qu’une fois la population est en place, elle ne se renouvelle pas ou peu. C’est pour cette rai- son que les collectivités cherchent à favo- riser l’habitat locatif.” ! T.C.

Chasseur de terres, le métier de Mathieu Aldrin.

O n connaissait les chas- seurs de tête et les chas- seurs de tendance. Voi- ci maintenant les “chasseurs de terrain.” Des profession- nels qui pour leur propre comp- te ou celui d’un lotisseur pas- sent leur temps à éplucher le plan local d’urbanisme des communes et à étudier le cadastre. Ils sont preneurs de toutes les informations qui peuvent les conduire à un ter- rain potentiellement construc- tible. Un travail discret, qui se fait à l’abri des regards des concurrents.

qu’à l’arrêté de lotir” dit-il. Sa méthode ? Consolider le dia- logue avec la municipalité et “arriver à l’instant T quand tous les éléments sont réunis. C’est-à-dire que la mairie est prête à recevoir un lotissement, qu’il y a des disponibilités fon- cières et que les propriétaires sont disposés à vendre.” Le scé- nario rêvé ! Mais en réalité, dans le métier, il est fréquent que les projets capotent avant même d’avoir vu le jour, car par exemple “le vendeur de terrain n’est plus vendeur.” Il faut négocier par-

R ÉACTION

Un acteur du marché

Le responsable desMaisonsMoyse et président de l’U.N.C.M.I. Bourgogne Franche-Com- té, apporte un commentaire sur le marché de l’immobilier avec sa double casquette. Gérard Moyse : “Il n’y a pas de vraie pénurie de foncier” L a Presse Bisontine : L’in- flation des prix est-elle une porte ouverte à des dérapages sur le marché de l’immobilier ? plus forte, mais qui n’est pas forcément la plus justifiée, concerne le prix du foncier. La forte demande et la concur- rence entre les opérateurs sont des éléments d’explication.

fois pendant plus d’un an avant de faire aboutir un projet. Mathieu Aldrin vient d’y parvenir puisque Francelot sort un projet de 19 par- celles à Fouche- rans.

Alors que les dispo- nibilités foncières se raréfient, il vaut mieux éviter de brû- ler une affaire et perdre l’opportunité de décrocher la tim- bale. C’est encore mieux si terrain convoité est dans une

“Un terrain se négocie entre 7 euros et 25 euros.”

Drôle de métier que celui de lotisseur. La profession est taxée de s’enrichir en spécu- lant sur la vente de terrains achetés à bas prix. Selon nos sources, en fonction de son emplacement et des aména- gements à prévoir pour le via- biliser, un terrain se négocie entre 7 euros et 25 euros le m 2 . Dans la fourchette basse, les particuliers se sentent quelques fois spoliés. Mais le jugement est sans doute un peu rapide compte tenu de toutes les contraintes techniques, admi- nistratives et des engagements financiers qui accompagnent le dossier de construction d’un lotissement. Une erreur de cal- cul et d’estimation et l’entre- prise peut “boire la tasse.” Le cas contraire existe aussi. Cer- tains lotisseurs avouent revendre les parcelles loties au double de leur prix de revient réel. ! T.C.

zone prisée. “On travaille au cas par cas. Un propriétaire de terrain constructible reçoit un coup de téléphone tous les 15 jours d’un lotisseur. C’est clair que pour nous, c’est inté- ressant de mobiliser de l’éner- gie pour construire 10 maisons à Pirey ou à Franois, car on sait par avance que nous réus- sirons à les commercialiser. Par contre, trouver un terrain à Étalans pour un projet iden- tique, c’est certain qu’on ne se bousculera pas” mentionne un lotisseur qui a souhaité gar- der l’anonymat. Toute la dif- ficulté pour lui est de pros- pecter dans un secteur où il est assuré de revendre ses ter- rains à bon prix. Mathieu Aldrin connaît ce métier. Il agit pour le compte de l’aménageur Francelot sur les secteurs de Dole, Dijon et Besançon. “Je suis chargé de programme. Je prospecte, je négocie et je suis le dossier jus-

Gérard Moyse : En effet, on voit émerger de plus en plus d’opé- rateurs non professionnels qui se lancent dans de l’aména- gement foncier. Ils croient que faire un lotissement c’est acheter un terrain et construire, mais ils oublient qu’il y a un certain nombre de pres- criptions à respec- ter. Ils échouent. Ces gens-là font du tort à la profession. L.P.B. : En tant que constructeur, comment analyser la hausse des prix ? G.M. : Le coût de la construc- tion augmente. C’est en par- tie lié à la hausse des prix des matières première comme l’acier que le constructeur peut répercuter. Mais la poussée la

L.P.B. : Y a-t-il vraiment pénurie de terrain ?

G.M. : Je ne le crois pas. En plus, les communes révi- sent leur P.L.U. Elles vont déga- ger des zones constructibles.

“Les communes vont dégager des zones constructibles.”

L.P.B. : Vous avez lan- cé un vaste lotisse- ment à Dannemarie-sur-Crète. Avez- vous d’autres projets ? G.M. : Nous allons tout d’abord engager la deuxième tranche de ce lotissement soit 24 lots. Est en cours un lotissement de 17 parcelles à Pouilley-les- Vignes, un à Saint-Vit de 16 parcelles et un à Bonnay de 14 parcelles. ! Propos recueillis par T.C.

Selon Gérard Moyse, “on voit émerger de plus en plus d’opérateurs non professionels.”

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