La Presse Bisontine 49 - Novembre 2004

LE DOSSI ER

10

É CONOMIE

Combien coûtent des obsèques ?

Loi de 1993 Pompes funèbres : dix ans de concurrence Depuis 1993, le monopole des communes en matière d’obsèques n’a plus cours. Depuis cette date, toute entreprise habilitée peut assurer cette mission. Sur Besançon et la première couronne, trois sociétés se partagent le marché : P.F.G., Pompes Funèbres d’Avanne et Roc’Éclerc.

visait, en pleine vague de sépa- ration de l’Église et de l’État, à transférer l’exercice du mono- pole des fabriques d’églises vers les communes. La loi affirmait clairement le caractère de ser- vice public communal du ser- vice extérieur, les communes pouvant l’exercer directement ou par entreprise interposée mais elle n’obligeait paradoxa- lement pas les communes à orga- que consacre une famille à des funérailles est d’environ 3 000 euros. Le prix des cercueils les plus couramment vendus est de 750 à 900 euros. Le prix d’un cercueil en acajou peut atteindre 4 500 euros. “J’ai déjà vu un enterrement où la famille avait dépensé 15 000 euros, dont S elon tous les opérateurs de pompes funèbres inter- rogés, le budget moyen

les Pompes Funèbres Générales jusqu’en 1993. La troisième est l’absence d’organisation du ser- vice extérieur. Dans ce cas, tou- te entreprise remplissant les conditions pour fournir les pres- tations funéraires peut inter- venir librement sur le territoi- re de la commune. Ce mode d’organisation a été sévèrement ébranlé ces der- nières années : les principales critiques portaient sur les prix pratiqués (fréquemment jugés excessifs), l’absence de trans- parence tarifaire, la constitu- tion dans certaines communes d’un quasi-monopole de fait bénéficiant à quelques sociétés privées, le manque de contrôle des collectivités locales. Toutes ces dispositions, voulues par le législateur et prises dans un esprit de clarification du “marché de la mort”, ne chan- gent a priori pas radicalement les rapports entre communes, hôpitaux et prestataires de pompes funèbres, si l’on en croit tous les témoignages recueillis. La loi de 1993 n’a apporté que quelques améliorations mais pas la révolution attendue. ! J.-F.H. 7 500 pour le cercueil. Ils avaient tenu à louer des voitures de luxe, Rolls et Cadillac, pour le cortège funèbre” raconte cet opérateur bisontin. Tous s’ac- cordent à dire que le budget minimal pour des obsèques ne peut être inférieur à 1 200 euros. Mais naturellement, dans un domaine qui touche autant l’af- fectif, il n’y a pas de règle pré- définie en matière de budget. opérateurs français du funéraire. Lasociétécrééeen1844avaitsigné des centainesdepartenariats avec les communes à l’époque de la séparation de l’Église et de l’État, quand il est revenuauxcommunes de gérer la question funéraire. Les P.F.G. ont été rachetées en 1979 par la Lyonnaise des Eaux-Dumez de JérômeMonod, dont elle déte- nait lamajorité des parts. Elle a été cédée au milieu des années 90 à l’AméricainS.C.I., (ServiceCorpo- ration International), la plus grosse sociétédufunéraireauxÉtats-Unis. La société S.C.I. s’est récemment retirée de l’affaire, vendue le 11 mars 2004 à un groupe constitué d’investisseurs américains (Vestar CapitalPartners)etd’ancienscadres français des P.F.G. : l’entité franco- américaine dont le siège est en France a un capital social de 40,9 millions d’euros. Selon l’associa- tion française d’information funé- raire, lesP.F.G.étaientclasséesdans les années 90 en “33 ème position des entreprises les plus rentables de France.” ! Qui sont les P.F.G. ? A vec plus de 1 000magasins sur tout le territoire national, les P.F.G. sont les premiers

D epuis le 10 janvier 1998 précisément, il ne doit plus exister aucun privilège ni monopole, et les familles ont la totale liberté de choix en ce qui concerne l’entreprise de pompes funèbres. La loi votée le 8 jan- vier 1993, applicable dans son ensemble depuis janvier 1998, poursuivait quatre objectifs : organiser le service public des pompes funèbres dans un cadre

limite de l’absurdité” selon un prestataire local -, a été mise en place. Désormais, le service public des pompes funèbres res- te certes communal et il peut être assuré par une régie ou par une entreprise habilitée, mais il ne confère plus aucun privi- lège d’exclusivité : une concur- rence est instaurée entre les dif- férents intervenants. “En pratique, on aboutit encore par-

clause d’exclusivité. Deuxiè- mement, durant cette période, les entreprises qui fournissaient des prestations de pompes funèbres en violation du privi- lège d’exclusivité ne pouvaient prétendre à l’habilitation sur le territoire de la commune où la violation était constatée. La loi de 1993 a certes ouvert à la concurrence mais une pro- cédure d’habilitation beaucoup plus stricte, parfois trop - “à la

concurrentiel, encadrer l’exer- cice de la profession, améliorer l’information et la protection des familles et épouser l’évolu- tion des mœurs funéraires. Entre 1993 et aujourd’hui sub- sistaient néanmoins encore deux règles. Premièrement, les régies et les contrats de concession continuaient à produire leurs effets mais les communes ne pouvaient plus conclure de contrats de concession avec une

niser ce service exté- rieur. La loi leur laissait une très gran- de souplesse pour ce qui concerne les modes d’exploitation de ce service. Dans les faits, il existait trois modes d’exerci- ce dumonopole com- munal.

fois à un monopo- le de fait, rétorque un responsable d’entreprise de pompes funèbres. Les habitudes sont difficiles à changer lorsqu’elles existent depuis près d’un siècle.” La loi du 8 janvier

“En pratique, on aboutit encore parfois à un monopole de fait.”

Le premier était la régie - tou- jours d’actualité dans une vil- le commePontarlier par exemple mais théoriquement soumis à la concurrence - dont le per- sonnel est soumis à la fonction publique territoriale. Le deuxiè- me est la concession de service public où la commune pouvait alors choisir son cocontractant. C’est ce qu’a fait Besançon avec

1993 était censéemettre fin aux monopoles des communes sur les pompes funèbres, et donc ouvrir ce substantiel marché qui représente avec 500 000 décès par an en France plus de 2,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires, à toutes les entre- prises habilitées. Auparavant, tout reposait sur la loi du 29 décembre 1904 qui

De 1904 à 1993, la gestion des pompes funèbres était soumise au monopole communal.

P OMPES F UNÈBRES G ÉNÉRALES Rue de Vesoul Les P.F.G. défendent leur position

Si elle ne dispose plus du monopole sur Besançon, la société des Pompes Funèbres Générales bénéficie encore d’une posi- tion dominante sur le marché funéraire local puisqu’elle assu- re près de la moitié des enterrements du Grand Besançon.

“N ous ne sommes pas des mar- chands de mort !” martèle avec vigueur Jacky Collot, le directeur des Pompes Funèbres Générales (P.F.G.) de Besan- çon lorsqu’on évoque avec lui ce secteur d’activité si parti- culier. Avec une “part de mar- ché” annoncée de “46% sur les 1 800 décès qui surviennent tous les ans à Besançon et de 82% pour les obsèques intra muros à Besançon” , les P.F.G. sont pourtant les premiers opé- rateurs de Besançon, et de loin. À tel point que les concurrents n’hésitent pas à parler encore de “monopole de fait des P.F.G.” Du côté de la rue de Vesoul, siège des P.F.G.bisontines, on réfute l’idée de démarche com- merciale. “C’est plus une

ment ? “En humanisant notre métier” répond Jacky Collot qui avoue à demi-mots que l’ac- cueil n’était pas toujours à la hauteur aux P.F.G., la situa- tionmonopolistique expliquant

démarche culturelle vis-à-vis de la mort. Les opérateurs de pompes funèbres sont parfois mal vus car ils vendent une prestation. Les gens n’hésitent pas à dépenser 5 ou 6 000 euros

sans doute cela. Aujourd’hui, “le mot d’ordre de l’entreprise est l’accompagnement des familles et la qua- lité du service” selon M. Collot qui estime que “l’ouverture à la

à l’occasion d’un mariage, mais ça les gêne pour lamort qui est, qu’on le veuille ou non, un des trois événements majeurs de la vie avec une naissance et un bap-

“Il a bien fallu qu’on s’adapte.”

Jacky Collot anime également des séances à destination des endeuillés au sein de l’association “Vivre son deuil”.

Grâce à son implantation ancienne, et malgré un mar- ché ouvert à la concurrence, les Pompes Funèbres de la rue de Vesoul restent un opérateur incontournable du funéraire à Besançon, un secteur dans lequel elles tentent de renfor- cer leur enracinement histo- rique. ! J.-F.H.

lise un chiffre d’affaires de “2,273 millions d’euros.” Le prix moyen d’une prestation complète pour un enterrement sur Besançon pratiqué par les P.F.G. est de 2 525 euros, aux- quels il convient d’ajouter la T.V.A. et les taxes diverses, ce qui revient enmoyenne à “3 800 euros.”

tême” enchaîne Jacky Collot. Pourtant, depuis l’ouverture à la concurrence et la fin de la régie municipale qui liait la ville aux Pompes Funèbres Générales, le monopole des P.F.G. sur les obsèques à Besan- çon est tombé. “On a pris cet- te mesure de plein fouet et il a bien fallu qu’on s’adapte.” Com-

concurrence a eu pour consé- quence, paradoxalement, une augmentation générale des tarifs. En effet, quand on fait beaucoup de quantité, on peut se permettre de pratiquer des tarifs plus bas.” Avec “environ 25 salariés” employés aux P.F.G., l’entre- prise de la rue de Vesoul réa-

Made with FlippingBook - professional solution for displaying marketing and sales documents online