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GRAND ANGLE

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ANTO I NE -MAR I E GRA Z I AN I : D É F R I C H E U R D E L’ H I S T O I R E C O R S E

Antoine-Marie Graziani enseigne l’histoire contemporaine à l’université de Corte. Ses sujets de prédilection? Pascal Paoli, la Corse génoise, les Bonaparte… « Ajaccio a connu un destin particulier, explique le chercheur. Au xvi e siècle, il s’agit d’une petite cité basée sur une oligarchie installée dans trois rues de la vieille ville. Quelques familles ajacciennes vont dominer le reste de la ville jusqu’au xviii e siècle. » Le reste de la ville, c’est U Borgu, aujourd’hui rue Fesch, un quartier populaire où s’affairent alors des corailleurs et des travailleurs du cuir qui entretiennent un lien avec les villages alentour. Les grandes familles, comme celle des Bonaparte, sont rentières de la terre. Elles louent des champs à l’État, à la communauté ou à l’évêque d’Ajaccio pour les sous-louer aux bergers et à des agriculteurs. « Au xviii e siècle, tout change, analyse l’historien. Ajaccio connaît une explosion démographique. Les premières revendications sociales des habitants du Borgu surgissent. Napoléon va ensuite arbitrer la transformation de la ville en fournissant un plan d’urbanisme où sont dessinés les cours Napoléon et Grandval. En 1811, il fait d’Ajaccio

Paru en mars 2018 : L’Ajaccio des Bonaparte. Une ville, une famille, 1514-1793. Éditions Alain Piazzola.

la capitale administrative de la Corse. » Que reste-t-il de cettemétamorphose, accompagnée plus tard par Napoléon III? « Ajaccio est devenue une ville économique avec une zone très dynamique en périphérie, à Sarrola-Carcopino, où se fabriquent des milliers de mètres carrés de surfaces commerciales. Mais Ajaccio reste une ville provinciale. Tout se joue dans une poignée de rues du centre où tout le monde se connaît, se salue, se retrouve dans son café de prédilection. Une certaine façon de vivre la Corse », estime-t-il.

214 / Avril 2019 / www.detoursenfrance.fr

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