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dérangeait soit remplacé par quelque chose qui nous amuse. Certains y arrivent en lisant des livres érotiques et en les apprivoisant. Si les pratiques qui peuvent choquer sont englo- bées dans une histoire d’amour, cela passe mieux. C’est ce qui arrive avec 50 nuances de Grey. Mais l’important est d’avancer à son propre rythme, et de trouver sa solution. Dr Dubois-Chevalier : cela dépend avant tout de son partenaire, de son niveau de libération. En parler peut générer une complicité dans le couple, mais il faut tenir compte de ce que l’autre peut recevoir et de ce que l’on peut oser dire ou faire. Dr Mimoun: c’est un jardin secret que l’on peut partager, mais il faut d’abord les formuler pour soi, repérer où en est l’autre, ce qu’il peut entendre, grâce à des suggestions plus géné- rales, puis lui dire par petites touches. S’il se crispe, on arrête. Dr Dubois-Chevalier : c’est avant tout une question de dosage. Tout ce qui va être systématique, ritualisé, sera dysfonctionnel. S’imaginer forcément avec quelqu’un d’autre pour accéder à la jouissance n’est pas bon. Mais cela n’a pas la même valeur selon que ce quelqu’un est identi é ou sans visage, accessible ou non. Est-ce juste un ins- trument érotique même si c’est une célébrité, ou une personne proche que je connais ? Dans ce dernier cas, c’est plus gênant. Ce n’est pas trom- per l’autre, mais cela peut en prendre le chemin. Celamontre en tout cas que l’autre ne suf t pas. Dr Mimoun : si c’est un imaginaire pur, pourquoi pas. Ce n’est alors S’imaginer avec quelqu’un d’autre, est-ce une bonne idée? Peut-on partager cet imaginaire avec son/sa partenaire ?

pas une tromperie, c’est simplement une façon de créer de l’excitation. C’est comme s’imaginer ailleurs, en vacances, pour mieux lâcher prise et accéder au plaisir, loin des tracas quo- tidiens. Si véritablement cette pensée d’un autre est obsédante, si on n’est plus du tout avec la personne réelle, cela devient gênant.

Avoir des images sexuelles, c’est

caresser son esprit, et les caresses entretiennent la stimulation et l’excitation. »

liamMasters et Virginia Johnson, où il y a beaucoup de sexualité, est, pour mes patients, un très bon médium de discussion. Dr Mimoun : oui, c’est un bon moyen, utilisé à bon escient. Si une femme n’a pas de fantasme, elle peut s’en créer en repensant à un rapport très agréable, ou à un film, une lecture. Faire travailler samémoire et son ima- ginaire auto-entretient la stimulation sexuelle. Des livres érotiques ou por- nographiques écrits par des femmes peuvent permettre à des “novices du fantasme” d’y accéder, comme ce recueil de nouvelles, Fantasmes de femmes (éditions Blanche), où elles verront si telle histoire les intéresse ou non. Comment libérer sa pensée de son éducation, de ses tabous? Dr Dubois-Chevalier : cela se joue sans doute à un niveau émotionnel très primaire, entre lesmotivations, la curiosité et la peur. La curiosité peut être la plus forte, et on va explorer des chemins, qui confrontent à ses tabous, son éducation ; pour d’autres, la peur sera la plus forte, et on va res- ter derrière la barrière. Comme dans toute éducation, on navigue entre “punition” et “récompense”. On sera encouragé si on est récompensé, que l’on y trouve de la satisfaction, du plai- sir, et découragé si l’expérience n’a pas été bonne. DrMimoun: en banalisant ses tabous, mais en n’étant pas pressé de pas- ser à l’acte ! Il faut arriver à greffer d’autres images pour que ce qui nous

TÉMOIGNAGE

L’idée dumariage me bloquait »

Elisa, 31 ans, Sannois (Val-d’Oise)

Depuis que je suis avec Théo, rien ne va plus. Il me dit que je n’ai jamais envie de faire l’amour. Le hic, c’est que l’on semarie cet été. Je suis allée voir un sexologue qui m’a proposé différentes pistes pour essayer de relancer mon désir. J’ai d’abord tenu un journal où j’ai noté les moments passés où j’avais été excitée. Quand je le relisais, celame faisait de l’effet. J’ai aussi recommencé àme caresser et j’avais du plaisir de plus en plus facilement. J’ai essayé de ressentir les caresses de l’eau sur ma peau, sous la douche. Puis, j’ai imaginé Théo non plus commemon futur mari, mais comme un inconnu qui me donnait rendez-vous juste pour faire l’amour. Petit à petit, mes blocages et mes peurs se sont envolés. Je crois que c’est l’idée dumariage qui m’empêchait d’être vraiment moi.

à lire

L’égoïsme

partagé, Dr Sylvain Mimoun et François Ducroux. Éd. Eyrolles, 14,90 €.

WESTEND61 / GETTYIMAGES

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