La Presse Bisontine 217 - Février 2020

DOSSIER I

La Presse Bisontine n°217 - Février 2020

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“S’il faut aller toutes les semaines au ministère de l’Intérieur, j’irai !” l Réaction Depuis les événements, la candidate Anne Vignot dit être venue quasiment tous les jours à Planoise. Son avis est tran- ché, également en faveur de la dépénalisation du cannabis.

l Logements La disparition des 408 a en partie bousculé l’ordre

L e quartier des 408 est défavorablement connu pour les réseaux qui y ont prospéré, notam- ment du trafic d’armes lourdes. Déconstruit aux trois quarts, le quartier a obligé les dealers à s’adapter. “Il y a bien longtemps qu’ils ont anticipé, estime une source policière. Les 408 n’ont rien à voir avec les violences à Planoise.” n

répondent toujours : on vient voir Antoine, un ami, au 6 ème étage…” témoigne un poli- cier. Antoine n’existe évi- demment pas. Ce prénom n’est plus utilisé depuis quelques mois tout comme ce point de deal abandonné depuis quelques jours. n

Qui est “Antoine”, du 6 ème étage rue de Picardie ?

“Antoine”, c’est “LE” prénom connu des toxicomanes de Planoisemais aussi des poli- ciers. Quand ils viennent s’approvisionner en “came” au 4, rue de Picardie, les

consommateurs sont d’abord envoyés dans la fosse sous le 4 de la rue, puis on leur dit de monter au 6 ème étage. Pour faire quoi, voir qui ? “Ils nous

L a Presse Bisontine : Vous confirmez vous aussi ce sentiment d’insécurité croissant ? AnneVignot : Bien sûr. C’est juste insup- portable de voir un commissariat fermé à 17 heures ou un samedi matin. Les habitants ne peuvent même pas venir faire part de leurs plaintes. C’est donc d’abord à l’État d’agir. La police municipale seule ne peut pas infléchir la situation et d’ail- leurs son armement n’y changerait rien. Les gens de Planoise n’ont aucune envie de se retrouver avec plein de gens armés. Ce qu’il faut, c’est plus de moyens dans la Police nationale. Si je suis élue, je suis prête à aller toutes les semaines au minis- tère de l’Intérieur s’il le faut pour réclamer les moyens nécessaires. Je l’affirme, on est dans ce quartier en rupture de service public. L.P.B. : La Ville n’aurait donc aucune respon- sabilité ? A.V. : La rupture spatiale, sociale et culturelle de ce quartier en manque de mixité provoque ce genre de consé- quences. Le rôle de laVille commence à l’école, dans les maisons de quartier, dans l’accompagnement à l’emploi. Tout cela, ce sont des politiques de la Ville qui n’ont pas été suffisantes et qu’il faudra donc renforcer. Mais qui demande énormément demoyens. Cela doit faire partie des priorités.

l Squats Le problème des appartements vides mais squattés

ments laissés vacants sont littérale- ment squattés. Une réunion s’est tenue vendredi 17 janvier en présence des bailleurs, du préfet et d’associations du quartier pour tenter de limiter le problème des immeubles à moitié vide. Ils sont de véritables nourrices ou lieux de squats. Le procédé envisagé est de bloquer chaque cage d’escalier. “On espère que tout le monde va agir dans ce sens. Car s’il venait se passer un problème pour les gens qui restent dans ces appartements, ce serait catastrophique” témoigne un membre du Conseil citoyen de Planoise. n E.Ch.

L.P.B. :Toujours favorable à la dépénalisation du cannabis ? A.V. : Bien sûr, ce débat doit avoir lieu et il faut réfléchir à une réponse glo- bale concernant tous ces produits illi- cites afin de casser cette dynamique de marché parallèle. Et si ce marché se développe, c’est aussi parce qu’il y a des acheteurs. Il est temps de mettre tout le monde en face de ses responsabilités en travaillant véri- tablement sur la question des addic- tions. Plus on baisse les moyens publics, plus ces marchés seront pros- pères. n Recueilli par J.-F.H. Anne Vignot : “Le débat sur la dépénalisation du cannabis doit avoir lieu.”

L e Plan de rénovation urbaine à Planoise conduit à la des- truction prochaine de barres d’immeubles. Présents sur le quartier, les bailleurs sociaux propo- sent des solutions de relogement aux

résidents, ailleurs dans la ville. Pro- blème, certaines familles refusent de quitter leur appartement si bien que des grandes barres demeurent ouvertes mais ne sont occupées qu’à certains étages. Les autres apparte-

De la publicité dans la rue L aurent Croizier (MoDem) avait dénoncé lors d’un conseil municipal la présence de tags affichant les prix de la drogue juste à côté d’une école. C’était avant la fusillade et l’incendie. Depuis, les tags ont été effacés mais d’autres sont réapparus. n

l Zooms “En mini-jupe à 22 heures dans le quartier”

Vivant la journée, Ile-de-France l’est aussi la nuit. En janvier, la Police municipale n’avait plus le droit d’aller seule à Planoise. Jusque-là, elle collaborait au groupement local contre la délinquance. À côté d’une école, des tags annoncent aux consommateurs de stupéfiants le prix de la cocaïne. Ils ont été effacés.

“L’ héroïne est la drogue des ouvriers, la cocaïne celle des classes sociales aisées” énonce un homme. Un policier s’amuse de contrôler des personnes dont le profil ne colle pas du tout avec l’ambiance du quartier : “La dernière fois, nous avons contrôlé une jeune

fille, interne en médecine au C.H.U., venue dans le quartier vêtue d’une petite mini-jupe et en hauts talons. Il était 22 heures. Elle a avoué venir chercher de la cocaïne. Venir seule, ici, c’est limite dangereux…” convient le professionnel. On ne sait pas si elle est revenue depuis. n

Un quartier qui par endroits semble à l’abandon.

Interdits de rue, ils jouent à cache-cache

L a justice prononce régulièrement des interdictions de séjour à l’en- contre des dealers. Cela va de l’interdiction de quartier à l’interdiction de certaines rues. Problème, ces petites frappes savent très bien

contourner la loi. L’un d’eux, interdit de présence rue de Fribourg s’est décalé avenue Ile-de-France et pour- suit le business. “Ils jouent avec nous, ils le savent” témoigne ce policier. n

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