SANTE MAGAZINE 520

10 FAÇONS DE

COMMUNIQUER SANS VIOLENCE Grossièretés, insultes, incivilités… Quand les tensions montent à la maison, au travail, dans l’espace public, les dérapages guettent. Pour éviter toute provocation ou couper court à la surenchère, adoptez un champ lexical pacifique. Ce qui ne signifie pas être une bonne poire ! Marie-Madeleine Sève

3 S’interdire de jouer les victimes Gare au déni de responsabilité qui envenime les relations ! Stoppez-le, et avant de dire “Je n’y peux rien, c’est le chef, ta mère... qui...”, assumez vos choix. La victimisation se cache dans l’usage d’adverbes tels “toujours”, “jamais”, “encore”, “souvent”, qui induit un processus de généralisation et suggère que l’autre a tort, et vous raison. Et que ce tort est permanent ! La victimisation se niche aussi dans des expressions banales mais assassines, que Françoise Keller appelle jugements masqués : “Je ne me sens pas écouté”, “Je me sens trahi”... sous-entendu “Par toi”, “Par vous”, “Par eux”. « Avec “Je sens que”, on imagine signaler un ressenti, alors que l’on exprime une pensée. » Apprenez à distinguer ces pseudo- sentiments de vos véritables émotions. Sur une feuille, écrivez à gauche les “Je sens que”, puis identifiez votre émotion tapie derrière, à noter à droite : “Je me sens dévalorisé / Je suis triste” ; “Je ne me sens pas respecté / Je suis inquiet”...

1 Décoller les étiquettes “Tu n’es qu’un égoïste”, “Tu me coupes sans cesse la parole”, “Tu es péremptoire”. Ces vifs reproches adressés à un conjoint, un proche, un collègue, procède d’un mécanisme infernal : étiqueter autrui et généraliser son attitude en espérant le conduire à la modifier. Idem avec les jugements moralisateurs, “Cela ne se fait pas !”, “C’est irrespectueux”. « On se raconte des histoires, analyse la coach Françoise Keller. À nos yeux, l’autre est comme ceci, comme cela, agit de la mauvaise manière, mais est-ce la réalité ? » Et puis, on interprète, en anticipant le scénario du pire, “Il veut ma peau, il va tenter de...” Pour déjouer ce piège, il faut observer, en revenir aux faits et les contextualiser. Par exemple, combien de fois votre collègue vous a-t-il coupé la parole ? Deux ou trois fois, donc pas constamment. De plus, ce jour-là, il défendait en réunion un dossier épineux, sans intention de vous court-circuiter. Suffisant pour relativiser. Veillez à proscrire le verbe “être” pour caractériser un individu : il le réduit à sa réaction “x” à l’instant “t”, en mettant de côté le reste de sa personne.

NOS EXPERTS

Johanna Henrion- Latché docteure en sciences de l’éducation

2 Arrêter les dévalorisations “Mon père aurait réparé ce robinet en moins de deux !”, ou “C’est facile ! Moi, je l’ai déjà fait”, insinuant “Tu es nul”. “Mais ne te prends donc par la tête avec cet exposé, ce n’est pas si grave”, insinuant “Tu es mal organisé, pas à la hauteur”. Ces réflexions sont ravageuses. Détruisant l’estime de soi (de l’autre), provoquant chez celui qui encaisse, l’apathie autodestructrice ou une virulente rébellion. Le meilleur moyen d’y parer n’est pas de répliquer “Fais-le toi-même”, mais de vous recentrer sur vous, avec bienveillance avant de répondre : “Chacun sa technique !”, ou son rythme, son point de vue... comparaisons et les

Françoise Keller coach formatrice certifiée en communication non violente

123 SANTÉ MAGAZINE I avril 2019

Made with FlippingBook - Online magazine maker