SANTE MAGAZINE 520

l’hypertension artérielle et l’agrégation plaquettaire, des facteurs centraux de risque cardiovasculaire », insiste le Pr Legrand. Lorsque, en revanche, les oméga-3 ne sont pas apportés par l’alimentation mais sous forme de supplémentation, les résultats observés sont plus nuancés selon une toute récente revue des études existantes. À ce titre, le Pr Legrand estime que « l’on ne peut pas considérer les oméga-3 comme des médicaments. » Ont-ils un effet bénéfique chez les diabétiques ? Cela reste à confirmer. Certes, des études menées auprès d’Esquimaux et de Japonais, grands consommateurs de poisson, ont montré que l’incidence du diabète de type 2 était beaucoup plus faible chez ces populations. Mais ces constatations peuvent aussi être expliquées par le fait que ces dernières ne consomment quasiment pas de sucre ni de produits transformés. « Ce qui est certain, c’est que les oméga-3 agissent de façon positive sur les troubles métaboliques grâce à leur effet anti-inflammatoire, ajoute le Pr Legrand. Dans l’obésité comme dans le diabète, il existe une forte composante inflammatoire. »

LES OMÉGA-3, C’EST QUOI EXACTEMENT ? Ce sont des graisses polyinsaturées. « Ils sont dits “essentiels”, précise le Pr Philippe Legrand. L’organisme en a besoin et ne peut pas les synthétiser. Ils doivent donc être impérativement apportés par l’alimentation. » Les oméga-3 constituent eux-mêmes une sous-famille que l’on trouve dans le monde végétal et le monde animal. « Le précurseur, l’acide alphalinoléique (ALA), est présent dans certains végétaux (noix, graines de lin, huiles de colza, de lin...), précise le Dr Jean-Michel Lecerf, nutritionniste. Consommé par les animaux, l’ALA des végétaux est transformé en EPA (acide eicosapentaénoïque) et en DHA (acide docosahexaénoïque). On trouve donc logiquement ces deux acides gras dans les poissons, les crustacés, les viandes et les œufs d’animaux nourris aux graines de lin... » Ce sont ces acides gras EPA et DHA les plus essentiels à nos organismes. « Nous-mêmes pouvons en produire à partir de l’ALA que nous consommons dans les végétaux, ajoute le nutritionniste. Mais cette production endogène est faible, très insuffisante pour couvrir nos besoins. » Pourquoi ont-ils une si belle réputation ? « Les oméga-3 sont des constituants essentiels des membranes biologiques, explique le Pr Legrand. Ils jouent sur l’agrégation plaquettaire, l’immunité, la reproduction, le métabolisme, l’activité neuronale, la croissance et la différenciation cellulaire... » Ils possèdent aussi une action anti-inflammatoire et régulent un grand nombre de gènes. « Les études montrent clairement qu’une carence en

Les acides gras oméga-3 se retrouvent en grande quantité dans les huiles de noix, de colza ou de lin.

oméga-3 entraîne, entre autres, des problèmes vasculaires et cérébraux », continue le spécialiste. Préviennent-ils vraiment les maladies cardiovasculaires ? « Les études épidémiologiques indiquent que les populations dont les apports alimentaires en ALA, et plus encore en EPA et DHA sont importants ont un risque cardiovasculaire plus faible », note Jean-Michel Lecerf. En 2004, une méta-analyse des études de cohortes a rapporté une diminution de 11 % de la mortalité coronaire chez les personnes consommant du poisson 1 à 3 fois par mois, de 15 % chez celles qui en consomment une fois par semaine, de 23 % pour 1 à 4 portions par semaine et de 38 % pour 5 portions et plus hebdomadaires. En 2006, une autre méta-analyse a montré que la consommation d’EPA et de DHA était associée à une réduction de la mortalité totale, des décès d’origine cardiaque, des taux de mort subite et possiblement d’accidents vasculaires cérébraux. Cet effet bénéfique trouve sa justification à plusieurs niveaux : « L’EPA et le DHA contribuent à réduire significativement l’inflammation, les triglycérides sanguins,

Les graines de chia apportent une quantité importante de fibres et d’antioxydants.

KOOSEN, MONKEYJUMP / GETTYIMAGES

29 SANTÉ MAGAZINE I avril 2019

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