Détours en France spécial Route du Rhum

à Saint-Malo ESCAPADE

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Cette grosse tour ronde, qui se dresse un peu en avant de la ceinture de rem parts, servait à entreposer la poudre à canons : c’est pourquoi elle fit l’objet de la plus spectaculaire attaque jamais tentée par les Anglais contre Saint Malo. Une nuit de 1693, ils profitèrent d’une grande marée haute pour laisser dériver contre la tour un bateau chargé d’explosifs. Heureusement, un rocher un peu plus haut que les autres bloqua juste à temps la bombe flottante, qui explosa en mer et non pas contre la tour. C’est

à la suite de cette alerte que des forts furent construits sur plusieurs rochers et îlots de la baie, contrôlant chacun des chenaux qui, en passant au beau milieu des récifs, conduisent au port. Après être passé au-dessus des plages, on découvre la longue digue qui pro tège l’avant-port. C’est le môle des Noires dont l’extrémité offre un point de vue impressionnant sur les remparts et les hôtels d’armateurs: l’aller-retour s’impose!

Toujours sur le chemin de ronde, après avoir salué la statue de Duguay Trouin, on note un édifice de belle allure qui semble cependant un peu décati par rapport à ses voisins : c’est l’hôtel Magon, dont l’état s’explique par un âge vénérable. Par miracle en effet, il est sorti intact de la guerre. Or, cet hôtel fut construit par l’un des plus fameux négociants du xviii e siècle : Auguste Magon de la Lande, lui-même propriétaire de la malouinière de la Chipaudière. La visite en fait découvrir le cadre de vie de «ces messieurs de Saint-Malo», comme Louis XIV appelait ces richissimes bourgeois auxquels il fit appel à plusieurs reprises pour ren flouer les finances du royaume. Au bout du rempart, un escalier des cend sur la place Chateaubriand, face à l’entrée du château. Ses terrasses offrent le point de rendez-vous clas sique intra-muros. Et bien entendu, une soirée malouine ne saurait se concevoir en dehors de la rue de la Soif. Inutile de la chercher sur un plan : elle n’existe pas ; c’est le surnom de la succession de cafés et de restaurants situés tout au long de l’intérieur des remparts, dans les rues Jacques-Cartier et de Chartres. À l’époque des campagnes de pêche à Terre-Neuve, c’est là que s’arrosaient les départs et les retours. Et l’esprit maritime est demeuré intact au bar de la Brasserie des Voyageurs, en face du château, avec le tableau géant brossé avant la guerre par le peintre officiel de la Marine Gustave Alaux : l’arrivée à Saint-Malo d’un cor saire avec sa prise hollandaise. Tandis que le bar de l’Univers, tapissé de pho tos de voiliers, reste le yacht-club offi cieux de Saint-Malo.

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