Détours en France spécial Route du Rhum

Publication animée

LA ROUTE DU RHUM FÊTE SES 40 ANS

Exemplaire offert par le Crédit Agricole d’Ille-et-Vilaine et le Crédit Agricole Mutuel de Guadeloupe. Ne peut être vendu.

SOMMAIRE

2

LA ROUTE DU RHUM

Édito

3 6 8

Le mémo de la course Grand angle Les six catégories de bateaux et les concurrents en lice

La Route du Rhum, 40 ans d’épopée

22

Vivre la Route du Rhum à Saint-Malo Escapade à partir de Saint-Malo

30 36 40

Vivre la Route du Rhum à Pointe-à-Pitre

Escapade à partir de Pointe-à-Pitre

44

Jacques Valpillon/Sea&Co

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

3

Edi to

Emmanuel Pain

DR

Bienvenue à tous, visiteurs, clients et sociétaires, skippers et équipiers, embarqués pour ce 40 e anniversaire de la route du Rhum destination GUADELOUPE, «terre de champions». Nous vous invitons à parcourir dans ce magazine Détours en France, spécial Route du Rhum, notre bel archipel et à y découvrir ses trésors. Le Crédit Agricole Mutuel de GUADELOUPE, acteur incontournable, est pleinement acteur du développement de l’économie régionale. 100% Guadeloupéenne, notre Caisse régionale prend toutes ses décisions localement. Elle assure l’emploi de l’épargne des Guadeloupéens au bénéfice des projets des Guadeloupéens et demeure le premier banquier – assureur du département. Elle affirme ainsi, son utilité au territoire renforcée en 2018 par la création de sa Fondation d’entreprise. Fort de ses 400 salariés et ses 140 administrateurs, le Crédit Agricole Mutuel de Guadeloupe a engagé via son projet d’entreprise DECLIK2021 (développement client Karuréra) lancé en 2017, d’importants travaux d’innovations, pour relever les défis de la modernité et de la satisfaction de nos clients. La mascotte de notre projet d’entreprise est d’ailleurs le canot saintois, embarcation réputée dans la caraïbe pour sa navigabilité et solidité, et nous nous associons pleinement aux efforts qu’engagerons les compétiteurs entre SAINT-MALO et POINTE-A-PITRE. Participer à ce 40 e anniversaire de la Route du Rhum, en collaboration avec notre consœur d’Ille-et-Vilaine est pour nous un vrai plaisir, que nous vous invitons à parcourir dans ce magazine.

La 11 e édition de la Route du Rhum est sans nul doute l’un des événements majeurs de l’année 2018 pour l’Ille-et-Vilaine. Pendant onze jours, la ville de Saint-Malo va accueillir le village de cette course mythique, avec ses milliers de visiteurs. Banque mutualiste 100 % dédiée à son territoire, notre Caisse régionale a à coeur de participer à l’attractivité et au rayonnement de l’Ille-et-Vilaine. C’est pourquoi nous nous associons à ce temps fort avec la mobilisation de nos équipes, collaborateurs et administrateurs, et sommes heureux de participer à ce numéro spécial, co-construit avec le Crédit Agricole Mutuel de Guadeloupe. L’engagement de notre Caisse régionale s’inscrit également dans le cadre du déploiement de notre filière mer qui s’avère être un levier indéniable de développement économique de notre territoire, avec des potentialités dans de nombreux domaines (biotechnologies bleues, algues,etc.). La Route du Rhum est une belle opportunité pour valoriser les expertises et les savoir-faire des acteurs bretilliens de la mer que le Crédit Agricole d’Ille-et-Vilaine s’attache à accompagner au quotidien.

JEAN-PIERRE VAUZANGES Directeur Général du Crédit Agricole d'Ille-et-Vilaine

Bons vents à tous les skippers, Rendez-vous à POINTE-A-PITRE.

BENOÎT LEDUC Directeur Général du Crédit Agricole Mutuel de Guadeloupe

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

PORTFOLIO

4

Alexis Courcoux

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

5

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

LE MÉMO DE LA COURSE

6

L’ITINÉRAIRE DE LA COURSE SAINT-MALO / POINTE-À-PITRE La route théorique la plus courte représente une distance de 3510 milles. Le record de la traversée est détenu depuis 2014 par Loïck Peyron sur le Maxi Solo Banque Populaire VII , en 7 jours 15 heures 8 minutes et 32 secondes à la vitesse moyenne de 22,93 nœuds.

Alexis Courcoux

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

7

L’AGENDA DE LA COURSE 24/10/2018

Saint-Malo : Ouverture du village, avec la présence des bateaux participants 25/10/2018 Parade d'accueil des bateaux 26/10/2018 Parade des Ultimes et Multi50 27/10/2018 Présentation des skippers Soirée des skippers 4/11/2018 Départ de la 11 e édition de la Route du Rhum – Destination Guadeloupe 9/11/2018 Guadeloupe : Ouverture du village au Mémorial ACTe 16/11/2018 Guadeloupe : Ouverture du village à la Marina Bas-du-Fort 17/11/2018 Parade et remise des prix Ultime, Multi50 et IMOCA 24/11/2018 Parade et remise des prix Class40, Rhum Mono et Rhum Multi 2/12/2018 Fermeture du village de Marina 123 SKIPPERS EN LICE, 6 CATÉGORIES DE BATEAUX ULTIME Multicoques LHT > à 60 pieds sans limitation de taille MULTI50 Multicoques en conformité avec les règles Multi50 IMOCA Monocoques en conformité avec les règles IMOCA CLASS40 Monocoques en conformité avec les règles Class40 RHUM Multicoques LHT > à 39 pieds et < à 60 pieds / ne pouvant entrer dans une classe définie ci-dessus RHUM Monocoques LHT > à 39 pieds et ne pouvant entrer dans une classe définie ci-dessus Pour former une classe, il faut qu’elle compte au minimum cinq bateaux. *LHT : Longueur hors tout

GRAND ANGLE

8

Alexis Courcoux

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

9

Tous les voiliers courent ensemble sur le même parcours, avec pour caractéristique commune de mesurer plus de 39 pieds (16 mètres environ). Tel est l’esprit de la Route du Rhum. Mais ils sont répartis en six catégories de concurrents, ce qui permet à chacun de régater à égalité de chances avec des bateaux comparables. MAGIQUE TRANSATLANTIQUE

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

GRAND ANGLE

10

Les trimarans ULTIM32/23

Liberté absolue exige : la catégorie Ultime ne connaît pas de limitation de taille. Mais les têtes d’affiche de ces dernières années ont défini un type de bateau qui, en conservant des dimensions maximales, devait permettre d’atteindre des performances exceptionnelles.

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

Yvan Zedda / Sea&Co

11

La caractéristique essentielle des Ultim 32/23 réside dans leurs foils et plans porteurs.

Yvan Zedda / Sea&Co

DES PERFORMANCES EXCEPTIONNELLES

foils sont donc des ailerons coudés cou lissant à travers les flotteurs du trima ran (sur les IMOCA 60, ils remplacent les dérives). Sous l’effet de la vitesse du bateau, ils soulèvent ce dernier. La surface de frottement entre l’eau et la carène – qui freine le bateau – s’en trou vant diminuée, une accélaration s’ensuit immédiatement. À cette paire de foils qui fait décoller le trimaran, s’ajoutent quatre ailerons qui lui permettent, littéralement, de voler sur l’eau. Ces ailerons horizontaux sont situés aux extrémités de la dérive et du safran de la coque centrale, et à l’extré mité des safrans de flotteurs. C’est sur

ces quatre petits plans porteurs que le bateau vole en rase-vagues. COMMENT CELA TIENT-IL ? La seule réponse simple qu’on puisse apporter tient en quatre mots : miracle de la technologie. Une technologie dans laquelle des matériaux légers, rigides et résistants permettent de construire des appendices aux profils élaborés. Quant aux résultats : tenir des vitesses de 40 nœuds (près de 75 km/h) en solitaire ne relève plus de la science-fiction. En revanche, ce type de navigation devient du pilotage et les risques de chavirage sont encore loin d’être dépassés.

Les trimarans Ultim 32/23 mesurent entre 24 mètres minimum et 32 mètres maximum de long, pour une largeur maximumde 23mètres, le tirant d’air ne pouvant pas dépasser 120 % de la lon gueur de coque la plus grande trouvée sur le bateau. Ainsi, la tête de mât de Banque Populaire IX , skippé par Armel Le Cléac’h, culmine à 38 mètres, ce qui lui permet de porter 610 mètres carrés de voilure aux allures de près, et 890 par vent portant. Outre un poids qui ne dépasse pas 15 tonnes grâce à l’usage de matériaux de haute technologie (car bone, kevlar, normex…), des perfor mances extraordinaires sont obtenues à la faveur des appendices qui sortent le trimaran de l’eau. Dès lors, celui-ci ne flotte plus : il vole. COMMENT EST-CE POSSIBLE ? Pour comprendre le principe du foil, en voiture, sortez la main et tenez-la à l’horizontale : vous sentez uniquement la résistance du vent. Inclinez-la légère ment, l’avant de la main vers le haut : tout votre bras est emporté à la verticale! Les

PARADOXES TECHNOLOGIQUES

Si l’on peut s’enthousiasmer devant ces traversées ultrarapides effectuées par la seule force du vent et des muscles du skipper, il ne faudrait pas pour autant conclure à un bilan carbone nul. Qu’il s’agisse du pilote automatique, des instruments de mesure et de navigation, des liaisons radio, de l’ordinateur, du dessalinisateur d’eau de mer, de l’éclairage… les voiliers modernes consomment une énergie électrique que seul un moteur à explosion peut fournir! Ils en dépendent même totalement puisqu’un concurrent en panne électrique se trouve très vite à court d’eau douce!

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

GRAND ANGLE

12

Portrai ts Les engagés de la catégorie Ultime

Yvan Zedda/Sea&Co

ARMEL LE CLÉAC’H NÉ EN 1977 - BANQUE POPULAIRE

1

PAR N° D’INSCRIPTION

Dans l’univers du monocoque, Armel Le Cléac’h n’a plus rien à prouver, comme sa victoire dans le Vendée Globe 2016-2017 et son titre de champion du monde IMOCA 2017 l’ont démontré. Ces titres ont fait oublier les divers records en solitaire sur multicoque qu’il a établis en leur temps : traversée de la Méditerranée, Route de la Découverte, Distance parcourue en 24 heures. Les performances accomplies par son Ultime sont aussi impressionnantes que le chavirage subi par ce dernier à la mi-avril 2018.

Si la course océanique est arrivée au même degré d’exigence que l’athlétisme de haut niveau ou la course automobile, le stade nautique qu’est devenu l’Atlantique Nord ne réserve pas les mêmes conditions à tous les concurrents. D’abord parce que les bateaux ne sont pas identiques : dans telles ou telles conditions de navigation particulières, l’un ou l’autre peut se trouver avantagé. Mais le vent et la mer évoluent sans cesse ; à quelques milles de distance et à quelques heures près, ils peuvent varier considérablement. Enfin, reste un danger imparable qui a souvent joué un rôle d’arbitre implacable : la collision avec un objet flottant non identifié, comme un container en dérive.

Th. Martinez/Sea&Co

SÉBASTIEN JOSSE NÉ EN 1975 - MAXI EDMOND DE ROTHSCHILD Souvent victime de malchance qui l’a conduit à l’abandon (à deux reprises dans le Vendée Globe), Sébastien Josse a cependant remporté déjà deux courses transatlantiques. Son Ultime, parfaitement au point, le met en situation de briguer la victoire. 3

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

13

THOMAS COVILLE NÉ EN 1968 - SODEBO ULTIM’

5

Depuis 2002, Thomas Coville accumule les expériences sur de grands trimarans, battant, en son temps, divers records : traversée de la Méditerranée et de l'Atlantique Nord, distance parcourue en 24 heures (il sera le premier à dépasser les 700 milles). En 2016, il a amené le record du tour du monde en solitaire et sans escale à moins de 49 jours et 3 heures.

Th. Martinez/Sea&Co Yvan Zedda/Sea&Co

FRANÇOIS GABART NÉ EN 1983 - MACIF On peut qualifier François Gabart de génie précoce de la voile. Après avoir, pour sa première participation, emporté le Vendée Globe (2012/13), il gagne la Route du Rhum 2014 en IMOCA. Il fait alors construire un trimaran de 30 mètres et, en 2017, amène le record du tour du monde en solitaire et sans escale à moins de 43 jours, tout en ayant poussé à 850,68 milles le record de distance parcourue en 24 heures, soit une vitesse moyenne de 35,44 nœuds (65,63 km/h). 2

B. Stichelbaut/Sea&Co

FRANCIS JOYON NÉ EN 1956 - IDEC SPORT À 62 ans, celui qui accomplit le premier tour du monde en solitaire et sans escale sur multicoque (2004), pourrait faire figure de vétéran. Mais, il faut se souvenir qu’en 2016-2017, il a descendu le record du tour du monde en équipage (trophée Jules Verne) en dessous de 41 jours ! 4

ROMAIN PILLIARD NÉ EN 1975 - USE IT AGAIN

6

Ce nouveau venu dans la cour de récréation des grands skippers pilote un bateau de l’ancienne génération de trimarans, ceux qui ne volaient pas au-dessus de l’eau. Ce bateau possède en revanche une belle histoire : c’est à son bord qu’en 2005, Ellen MacArthur a battu le record autour du monde en solitaire.

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

GRAND ANGLE

14

Formule 1 du grand large IMOCA 60

Parce qu’ils sont les bateaux du Vendée Globe, un tour du monde en solitaire et sans escale qui constitue la plus exigeante de toutes les courses au large, les Imoca 60 bénéficient d’améliorations considérables à chacune de ses éditions.

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

Th. Martinez / Sea&Co

15

DES DIMENSIONS QUI NOUS ÉCHAPPENT

En mer, faute d’éléments permettant d’apprécier la longueur des coques et la hauteur des mâts, le gigantisme des concurrents de la Route du Rhum passe inaperçu. Mais dans le port de Saint-Malo, la proximité des remparts et des hôtels d’armateurs, ainsi que le passage de l’écluse, donnent une toute autre vision. Ainsi, la tête de mât des Ultime se trouve à environ 40 mètres au-dessus de l’eau, soit un immeuble de 12 étages. On a souvent vu des skippers obligés d'escalader leur mât pour une réparation : déjà vertigineuse sur les eaux tranquilles du port, l’opération devient tout simplement effrayante s’il faut l’effectuer par mer agitée!

Yolaine Gautier - CDT35

Concernant le gréement, noter la posi tion du mât, très en arrière, et les deux tangons positionnés de part et d’autre de son pied, en travers du bateau : ce sont les outriggers, dont la fonction est d’écarter au maximum le haubanage, afin d’améliorer la tenue du mât. Sous voile, l’IMOCA 60 présente encore une silhouette particulière avec une grand voile étroite à sa base, dont la par tie haute n’adopte pas la forme d’une pointe de triangle : grâce à un système de lattes, elle est carrée et offre ainsi une surface efficace maximale en haut du mât, là où le vent est le moins per turbé, et partant, le plus propulsif. Les voiles d’avant sont des focs, de diverses surfaces et de coupes différentes, les uns prévus pour les allures de près (vent soufflant de l’avant) et les autres pour les allures portantes (vent soufflant sur l’arrière). Enfin, concernant le plan de pont, la partie avant du cockpit est pro tégée par une casquette qui prolonge le roof et protège l’équipage.

Au premier coup d’œil, l’IMOCA 60 apparaît comme un voilier pas comme les autres. Vu d’en haut, la largeur extrême de l’arrière donne un rapport de proportions qui ne va pas sans faire penser à un dériveur de haute perfor mance... mais long de 18 mètres. Non seulement le tirant d’eau est déme suré, mais le voile de quille s’allonge, étroit comme une lame de poignard, pour s’achever sur un bulbe en forme de fusée. Cette quille présente la par ticularité de pouvoir basculer latérale ment, afin de renforcer la capacité du lest à tenir le bateau droit. Et comme ce faisant, la quille perd de son efficacité en tant que plan anti-dérive, l’IMOCA est doté de deux dérives, une de chaque côté de la coque. Depuis le Vendée Globe de 2016, ces dérives ont été remplacées par des foils (voir le focus consacré aux Ultim 32/23, p. 11) . Le système de gou vernail se compose de deux safrans : quand ce type de bateau gîte sur un bord de près, seule la lame sous le vent se trouve dans l’eau! Il en va d’ailleurs de même pour les dérives.

L’IMOCA se reconnaît de loin, avec sa grand-voile étroite et carrée dans sa partie haute.

Th. Martinez/Sea&Co

GRAND ANGLE

16

Yvan Zedda/Sea&Co

Les concurrents engagés dans la classe IMOCA, soit ont déjà couru le Vendée Globe et se préparent à y revenir pour emporter enfin la victoire ; soit rêvent de s’y lancer à leur tour. Dans tous les cas, la Route du Rhum fait partie de leur entraînement et de la préparation du bateau. Ici, comme en classe Ultime, les têtes d’affiche se trouvent à égalité de chances, qu’il s’agisse de leur talent de skipper ou de leur bateau. C’est donc l’Atlantique qui s’imposera en arbitre. Portrai ts Les 5 favoris IMOCA PAR N° D’INSCRIPTION / SUR 22 CONCURRENTS

SAMANTHA DAVIES NÉE EN 1974 - INITIATIVES COEUR

1

Quatrième du Vendée Globe 2008-2009, Samantha Davies avait stupéfié le public par son sens de l’humour et le bonheur qu’elle montre à vivre en mer. Malheureusement, elle a été contrainte à l’abandon dans l’édition 2012-2013, suite à un démâtage survenu dans les premiers jours de la course. Elle dispute en 2018 sa première Route du Rhum.

Th. Martinez/Sea&Co

5 ALEX THOMSON NÉ EN 1974 - HUGO BOSS Deuxième du Vendée Globe 2016-2017 malgré un foil brisé, il a cependant battu le record de distance parcourue en 24 heures en monocoque : 536,8 milles. C’était alors le quatrième Vendée Globe de ce Britannique qui apparaît comme l’un des meilleurs connaisseurs des IMOCA 60.

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

17

9 VINCENT RIOU NÉ EN 1972 - PRB

Vainqueur du Vendée Globe en 2004-2005, il a connu une mésaventure en 2008-2009 : en portant secours à un concurrent, il a perdu son mât lors de la délicate manœuvre de sauvetage. Il a été classé troisième ex-æquo par le jury. Dans l’édition de 2012-2013, alors qu’il est en troisième position, il heurte un objet flottant non identifié, ce qui le contraint à l’abandon ; au départ du Vendée Globe 2016 2017, même aventure. La chance pourrait lui sourire à nouveau sur la route de Pointe-à-Pitre.

Th. Martinez/Sea&Co Th. Martinez/Sea&Co

JÉRÉMIE BEYOU NÉ EN 1976 - CHARAL Avec trois victoires dans la Solitaire du Figaro (2005, 2011 et 2014), une place de deuxième dans le Rhum 2014, et une de troisième dans le Vendée Globe 2016-2017, Jérémie Beyou se présente en bonne position pour prétendre à la victoire dans cette Route du Rhum 2018. 8

LOUIS BURTON NÉ EN 1985 - BUREAU VALLÉE Après un abandon suite à un abordage lors du Vendée Globe 2012-2013, Louis Burton a terminé septième celui de 2016-2017. Entre-temps, il avait obtenu la cinquième place à la Route du Rhum 2014. Lui aussi peut se poser en candidat au podium. 18

B. Stichelbaut/Sea&Co

GRAND ANGLE

18

Portrai ts Les concurrents Multi50 et Class40

S’ils courent dans des catégories moins prestigieuses, ces skippers et skippeuses

sont des champions en devenir, ou des coureurs expérimentés mais ne disposant pas des budgets vertigineux exigés par des bateaux plus importants.

MULTI50

PAR N° D’INSCRIPTION / SUR 6 CONCURRENTS

THIBAUT VAUCHEL CAMUS NÉ EN 1978 - SOLIDAIRES EN PELOTON-ARSEP Ce navigateur malouin d’origine guadeloupéenne a décroché la 2e place de la course 2014 dans la catégorie Class40. Il concourt cette année avec son nouveau trimaran et signe sa première victoire en solitaire chez les trimarans de 50 pieds en gagnant la DHREAM CUP. 1 Premier de la transat Jacques Vabre 2017 et troisième en 2015, deuxième de la transat anglaise en 2017 et deuxième de la Route du Rhum 2014, Lalou Roucayrol possède lui aussi toutes ses chances en 2018. 4 MULTI50 Le principe de cette catégorie est de maintenir les concurrents dans des budgets maîtrisés; il existe ainsi un circuit de compétitions où les Multi50 ont leur place, comme la Route du Rhum. Il s’agit de trimarans dont les longueur et largeur maximales sont de 50 pieds (15 mètres environ). Leur tirant d’air (hauteur au dessus de l’eau) est de 23,77 mètres maximum, ce qui limite la surface de leur voilure. LALOU ROUCAYROL NÉ EN 1964 - ARKEMA

Th. Martinez/Sea&Co

19

Robin Christol

CLASS40

PAR N° D’INSCRIPTION / SUR 51 CONCURRENTS

KITO DE PAVANT NÉ EN 1961 - MADE IN MIDI Familier de la Solitaire du Figaro 7

RODOLPHE SEPHO NÉ EN 1986 - RÊVE DE LARGE Pour sa deuxième participation, Rodolphe Sépho porte les couleurs de la Guadeloupe à bord d’un Class40 dernière génération. Ce passionné de voile a participé à plusieurs tours de Guadeloupe, de Martinique ainsi qu’à plusieurs championnats de France et aux 1000 milles des Sables en avril 2018. 27

qu’il a courue huit fois et gagnée en 2008, il a aussi participé à trois Vendée Globe et emporté la Transat AG2R de 2006. Il a fini troisième des Class40 lors de la Route du Rhum 2014. Vainqueur de la Solitaire du Figaro en 2006 et 2008, il a fini deuxième des Class40 dans la dernière Route du Rhum. Il a donc toutes ses chances cette année. 13 1986, l’année de sa naissance, coïncide avec la victoire de Philippe Poupon, son père, lors de la Route du Rhum. Ayant navigué avec lui dès son plus jeune âge, aujourd’hui skippeuse professionnelle (dans les mers polaires australes), ce grand marin se met à la course. 16 NICOLAS TROUSSEL NÉ EN 1974 - CORUM MORGANE URSAULT POUPON NÉE EN 1986 (NOM NON COMMUNIQUÉ)

CLASS40

Ces monocoques de 12,19 mètres répondent à des normes strictes avec une largeur maximum de 4,50 m et un tirant d’eau maxi de 3 mètres. La surface maximale de l’ensemble grand-voile et foc de type solent est de 115 mètres carrés. Plus petits que les IMOCA, ils se satisfont de budgets plus raisonnables, qui permettent à des amateurs éclairés de courir à haut niveau, avec un programme de courses plus accessible que les transats et autres tours du monde.

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

GRAND ANGLE

20

Dans la catégorie Rhum, qu’il s’agisse de mono ou de multicoques, les bateaux importent autant que les skippers, car la participation des uns comme des autres relève du devoir de mémoire. Portrai ts Les concurrents Rhum Mono et Rhum Multi

RHUM MONO

PAR N° D’INSCRIPTION / SUR 17 CONCURRENTS

BOB ESCOFFIER NÉ EN 1949 - KRITER V SOCOMORE Armateur d’une flottille de voiliers anciens, Bob Escoffier ne résiste pas facilement à l’envie de prendre le départ du Rhum : à quatre reprises déjà, il y a cédé. En 2018, il recommence avec le mytique Kriter V . Son défi: traverser en 23 jours, comme l’avait fait Michel Malinovski en 1978. WILLY BISSAINTE NÉ 1970 - C’LA GUADELOUPE Pour sa troisième traversée en solo, le skipper guadeloupéen a pu compter sur le soutien de la Région et du Conseil départemental de la Guadeloupe. Trois fois vainqueur de la RORC Caribbean 600, arrivé 6 e de la Route du Rhum 2014, il concourt cette année en classe Rhum avec un nouveau bateau. 2 13

RHUM MONOCOQUES Toujours dans la philosophie de la Route du Rhum – s’ouvrir à tous les voiliers déclarés capables de traverser l’Atlantique – cette catégorie accueille des monocoques mesurant au minimum 39 pieds et n’entrant pas dans les autres classes. On y voit plusieurs bateaux mythiques.

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

Yvan Zedda/Sea&Co

21

Gilles Martin-Raget/Sea&Co

RHUM MULTI

PAR N° D’INSCRIPTION / SUR 21 CONCURRENTS

CHARLIE CAPELLE NÉ EN 1955 - ACAPELLA SOREAL

YANN MARILLEY NÉ EN 1960 - NO LIMIT YACHT

1

13

Pour la Route du Rhum 1982, Acapella – sistership du fameux Olympus Photo , le petit trimaran jaune de Mike Birch, vainqueur en 1978 – était skippé par Yves Le Cornec. Depuis, il y a participé cinq fois, mené par Charlie Capelle, constructeur de bateaux en bois-époxy. LOÏCK PEYRON NÉ EN 1959 - HAPPY Vainqueur de la dernière Route du Rhum, de trois transats anglaises et de deux Jacques Vabre, le fameux skipper s’offre le plaisir de prendre le départ sur une copie d’ Olympus Photo , en hommage à Mike Birch qu’il considère comme son «maître Jedi». L’hommage sera complet puisque Loïck Peyron naviguera à l’ancienne, c’est à dire en faisant le point au sextant, sur des cartes en papier. 123

Adaptation pour la course d’un catamaran de série, ce bateau est né d’une collaboration entre Yann Marilley et Jean Maurel, décédé en 2012, et à l’époque directeur de course de la Route du Rhum.

RHUM MULTICOQUES

Trimarans, catamarans ou praos, ils mesurent entre 39 et 60 pieds, et ils ne peuvent pas entrer dans les autres classes. Cette catégorie ouvre la participation des bateaux les plus divers à la Route du Rhum. On y trouve notamment des copies des premiers participants à la course.

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

DÉCRYPTAGE

22

Parmi toutes les courses océaniques, la Route du Rhum possède une caractéristique unique. Chacune de ses dix éditions a constitué un épisode mémorable d’une authentique épopée. Pure aventure à l’origine, cette course a évolué tout de suite vers la compétition sportive, faisant de l’Atlantique Nord un parcours de régate géant. d’épopée La route du Rhum 40 ANS

Jacques Valpillon/Sea&Co

1978

S’attarder sur les dix éditions de cette course légendaire revient à décrire quarante ans d’évolution de l’architecture des voiliers de course et du savoir-faire de leurs skippers. Tout commence donc en 1978 avec la création d’une nouvelle course trans atlantique en solitaire. Il existe alors, depuis 1960, une course mythique qui se dispute tous les quatre ans sur le parcours Plymouth-Newport, aux États Unis : l’Ostar (Observer Single-handed Trans-Atlantic Race). Cette course est anglaise, mais elle a révélé surtout des marins français, dont le plus célèbre est Éric Tabarly, devenu le sportif préféré des Français avec sa victoire en 1964.

Keystone France

23

LE 5 NOVEMBRE 1978 EST DONNÉ LE DÉPART

Par un hasard dont personne n’est jamais revenu, le Rhum 1978 n’appor tera pas de réponse définitive. En effet, le Français Michel Malinovski a pris le départ sur un étroit monocoque long de 21 mètres. Le Canadien Michael Birch a opté pour un trimaran qui n’atteint pas 12 mètres de long. C’est lui qui l’emporte, avec une avance de 98 secondes au terme d’une course de 23 jours ! Ce suspense final, qu’un scénariste n’aurait jamais osé imaginer, va faire la célébrité de la course avec un événement dramatique et jamais expliqué : la disparition corps et biens d’Alain Colas sur son trimaran.

Or en 1976, Alain Colas prend le départ de la course sur un monocoque long de 72 mètres et gréé de quatre mâts. Ce gigantisme – et peut-être aussi les vic toires françaises à répétition – effraye les Britanniques qui fixent la longueur maximum des bateaux à 60 pieds (envi ron 18 mètres). Par réaction, afin de maintenir un esprit de progrès constant et de recherche, le publicitaire français Michel Étevenon invente une nouvelle course. La Route du Rhum, entre Saint-Malo (Bretagne Nord) et Pointe-à-Pitre (Guadeloupe), est ouverte à tous les types de voiliers, monocoques ou multicoques, quelle qu’en soit la longueur.

DE LA PREMIÈRE ROUTE DU RHUM Cette course s’annonce difficile. D’abord elle est longue (3600 milles, soit près d’un millier de plus que la Transat anglaise) ; et surtout, elle commence par une sortie de la Manche et une traversée du golfe de Gascogne contre les coups de vent fréquents à cette époque de l’année. Ensuite, diverses options s’affrontent : quel est le bateau le mieux adapté à ce par cours, le monocoque ou le multicoque? Et si on opte pour le multicoque, faut-il un catamaran ou un trimaran? Quant à la route, quel est l’itinéraire qui permet de profiter au mieux des alizés ?

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

DÉCRYPTAGE

24

C’est un principe physique : la vitesse maximale théorique d’un bateau découle de sa longueur. Plus celle-ci est importante, plus la vitesse envisageable est élevée. On observe par ailleurs qu’à longueur égale, un multicoque est plus rapide qu’un monocoque. Cela tient à ce que la partie de la coque au contact de l’eau, par effet de frottement, freine le bateau. Cette «surface mouillée», pour employer le terme technique, est beaucoup plus réduite sur les multicoques. CE QUI FAIT QU’UN BATEAU VA VITE

1982 LE CATAMARAN S’IMPOSE Marc Pajot / 18 j 01 h 38 min 00 s Avec 50 concurrents au départ dont toute la fine fleur de la course au large (Tabarly, Knox-Johnston, Kersauson, Pajot, Gabbay, Caradec, Poupon, Riguidel, Arthaud, les frères Peyron…), le Rhum confirme son succès. Il prend de plus une dimension médiatique iné dite, puisque les bateaux sont dotés de balises Argos. Désormais, le public suit la course pour ainsi dire en temps réel. Avec l’Ostar qui s’est courue en 1980, il est apparu que même sur un parcours

où les vents de face prédominaient, les multicoques surpassaient les mono coques. La question se pose alors de savoir s’il faut opter pour un catama ran ou un trimaran. À l’époque, les catamarans emportent les suffrages des architectes et des coureurs, tan dis qu’on n’hésite pas à se lancer sur des grands bateaux : plus de 25 mètres pour Kersauson et Riguidel. Pour cette seconde édition, le temps du vainqueur est amélioré de cinq jours.

TH. Martinez/Sea&Co

1986

1986 LE RETOUR DU TRIMARAN

Philippe Poupon / 14 j 15 h 57 min15 s 33 concurrents seulement, mais 13 d’entre eux dépassent les 23 mètres de long. Les catamarans sont les plus nombreux et on note une nouveauté : Éric Tabarly skippe un trimaran doté de foils. Pour la première fois, mais pas la dernière, la course va affronter du très mauvais temps, sous la forme d’une succession de profondes dépressions ravageuses. Démâtages et chavirages se multiplient : ils ne seront que 15 à passer la ligne d’arrivée. De plus, Loïc Caradec est disparu lors du chavirage de son catamaran de 26 mètres. La vic toire revient à Philippe Poupon qui est parvenu à sauvegarder son trimaran de 23 mètres. En améliorant le record de quatre jours malgré les tempêtes rava geuses, il fait de la Route du Rhum la plus exigeante de toutes les courses.

Thierry Rannou/Gamma-Rapho

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

25

1990 UNE FEMME GAGNE LA PLUS PHYSIQUE DES COURSES

Florence Arthaud / 14 j 10 h 08 min 28 s La leçon de l’édition précédente a été reçue : les multicoques géants ne sont pas faits pour les solitaires et exigent des budgets déraisonnables. Il est vrai qu’on ne compte que 27 concurrents au départ, alors qu’en 1982 ils étaient 50 ! C’est ainsi que, l’esprit de la Route du Rhum dût-il en souffrir, la longueur des bateaux est limitée à 60 pieds. Par ailleurs, le mouvement enclenché par Philippe Poupon est suivi avec un retour en force des trimarans. Il est vrai que la construction de ces machines s’est bien améliorée grâce à l’usageducarbone. Deplus, lesskippers de la nouvelle génération n’hésitent pas à pousser leurs trimarans au plus près de leurs limites, en naviguant sur le flotteur sous le vent. L’inévitable sériede perturbations qui caractérise le début du mois de novembre balaye la flotte mais ne provoque que 7 abandons. La fin de course oppose Philippe Poupon, Mike Birch et Florence Arthaud. Face à deux skippers anciens vainqueurs du Rhum, c’est elle qui l’emporte et ce, malgré une incroyable série d’avaries.

1990

LES 3 TYPES DE MULTICOQUES

LES TRIMARANS possèdent une coque centrale et deux flotteurs. À l’origine, ils naviguaient en appui sur le flotteur sous le vent. Ils ont surpassé les catamarans lorsqu’ils ont été capables de naviguer sur leur seul flotteur sous le vent.

LES PRAOS se composent d’une coque et d’un seul flotteur. Cette formule d’usage dangereux a été rapidement abandonnée.

LES CATAMARANS possèdent deux coques identiques. Pour atteindre la vitesse maximale, la coque au vent doit se trouver au-dessus de l’eau.

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

DÉCRYPTAGE

26

CIRCUITS PROFESSIONNELS

L’épopée de la Route du Rhum se situe dans l’évolution de la course au large de manière plus générale. Devenue professionnelle, cette dernière exige que les sponsors

s’investissent non plus dans des courses au coup par coup, mais dans des programmes

de compétitions réunissant plusieurs épreuves, lesquelles interagissent entre elles. Pour un classement sportif des coureurs déjà. Mais aussi parce que la participation à une épreuve est aussi un entraînement pour une autre. Yves Parlier, troisième au classement général du Rhum 1994, avait fini quatrième du Vendée Globe en 1993, et Alain Gautier, le quatrième, avait gagné ce même Vendée Globe.

Th. Martinez/Sea&Co

1994 CLASSE À PART EST FAITE AUX MONOCOQUES

1994

Laurent Bourgnon / 14 j 06 h 28 min 29 s La supériorité des multicoques sur les monocoques étant acquise, le Rhum va-t-il se transformer en une course de trimarans ? Pour éviter ce qui est perçu, à juste titre, comme un appauvrissement, il est décidé d’éta blir un double classement dans la course. On peut espérer que mettre en valeur des bateaux moins coû teux que les multicoques améliorera la participation à la course, tombée à 24 concurrents (dont 12 monocoques). Paradoxalement, les monocoques de cette édition vont montrer qu’une nou velle génération de bateaux arrive, avec des potentiels de performances étonnants : leurs ballasts notamment, qui leur permettent de porter plus de toile dans la brise. Ainsi, le classement général du Rhum 1994 voit en tête les trimarans de Laurent Bourgnon et de Paul Vatine, avec en troisième et qua trième places les monocoques d’Yves Parlier et d’Alain Gautier.

Gilles Martin-Raget/Sea&Co

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

27

1998 L’ATLANTIQUE DEVIENT UN PARCOURS DE RÉGATE

Laurent Bourgnon / 12 j 08 h 41 min 06 s Avec 37 concurrents dont 18 mono coques, la Route du Rhum attire de nouveau les marins, tandis qu’une nouveauté très discrète vient modi fier l’esprit de la course : le routage. Les skippers peuvent en effet se faire conseiller depuis la terre pour le choix de leurs options météo. Or, de course en course, il s’est avéré que la victoire revenait à celui qui allait chercher le vent favorable, quitte à allonger sa route. Un nouveau métier apparaît donc dans la course au large : le routeur, roi de la stratégie. On trouve ainsi sur l’Atlantique les tactiques de la régate pure. 1998 marque par ailleurs les 20 ans de la course, un anniversaire qui se caractérise par un premier doublé, puisque Laurent Bourgnon est de nou veau vainqueur. En portant le record de la course à 12 jours, il a presque divisé le temps de course par deux par rapport à 1978. Dans le classement des mono coques, sur son 50 pieds, une jeune Anglaise de 22 ans, Ellen MacArthur, a presque fait jeu égal avec des 60 pieds.

1998

Benoît Stichelbaut

2002

2002 LES GRANDS TRIMARANS MONTRENT LEURS LIMITES

Michel Desjoyeaux / 13 j 07 h 53 min 00 s Le renouveau de la Route du Rhum se confirme avec une participation record : 58 concurrents, dont 18 trimarans de 60 pieds. Ceux-ci offrent un fabuleux spectacle au départ de la course, avant de connaître, quelques jours plus tard, une hécatombe. La course doit en effet faire face à une perturbation redoutable – la force du vent dépassera les 70 nœuds – qui massacre littéralement les multi coques : flotteurs arrachés, démâtages, chavirages… Seuls Michel Desjoyeaux, Marc Guillemot et Lalou Roucayrol cou peront la ligne d’arrivée. Les mono coques, qui avaient pris leur départ 24 heures avant, affrontent la même tem pête mais s’en sortent mieux. Les deux premiers d’entre eux (Ellen MacArthur

Th. Martinez/Sea&Co

et Mike Golding) arrivent même à Pointe à-Pitre devant les trimarans. Et si Michel Desjoyeaux l’emporte, c’est après avoir dû faire trois escales pour réparer!

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

DÉCRYPTAGE

28

2006 LA ROUTE DU RHUM NE DURE PLUS QU’UNE SEMAINE ! Lionel Lemonchois / 07 j 17 h 19min 06 s Avec l’accès offert aux monocoques Class40, la Route du Rhum prend un coup de jeune et gagne de nom breux concurrents : 74 au total, dont 25 Class40. On note aussi que 62 skip pers atteindront la Guadeloupe. Il est vrai que la course, pour sa huitième édi tion, a été épargnée par les cataclysmes météorologiques tels celui de 2002. Ces conditions favorables expliquent en par tie pourquoi le record de la traversée est amélioré d’une manière aussi explosive. Si les 12 jours, 8 heures et 41 minutes établis par Laurent Bourgnon en 1998 avaient de quoi impressionner, les 7 jours 17 heures et 19 minutes de Lionel Lemonchois laissent stupéfait. La vitesse moyenne induite par ce temps est de 19,11 nœuds ce qui, pour un soli taire, constitue du jamais vu. Franck Cammas / 09 j 03 h 14 min 47 s Sûrement encouragés par la perfor mance réalisée par Lionel Lemonchois en 2006, neuf grands trimarans (catégo rie Ultime) se présentent au départ, ainsi que douze Multi50. Les quarante-quatre Class40 engagés viennent confirmer que la relève pour le haut niveau de la course au large est disponible. Et il reste encore de la place pour les nostalgiques et coureurs à petit budget, avec la caté gorie Rhum. Des conditions météorolo giques moins favorables ne permettront pas d’améliorer encore le record. Mais la fiabilité, dont les bateaux de Franck Cammas, Francis Joyon et Thomas Coville ont fait preuve, montre que les grands trimarans ont fait des progrès considérables. À noter aussi, dans la classe IMOCA, le doublé réussi par Roland Jourdain, vainqueur pour la deuxième fois consécutive. 2010 LES TRIMARANS GÉANTS PRENNENT LEUR REVANCHE

Benoît Stichelbaut/Sea&Co Yvan Zedda/Sea&Co

2006

2010

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

29

Th. Martinez/Sea&Co

2014 JUSQU’OÙ IRA-T-ON DÉSORMAIS ? Loïck Peyron / 07 j 15 h 08 min 32 s Dans tous les sens du terme, on peut affirmer que la Route du Rhum a atteint le gigantisme. En termes de participa tion, ce sont cette fois 91 concurrents qui se partagent en 8 Ultime, 9 IMOCA, 11 Multi50, 43 Class40 et 20 Rhum. S’agissant du public, le record de fré quentation est largement battu puisqu’on totalise 2200000 visiteurs entre les «vil lages de course» de Saint-Malo et de Pointe-à-Pitre. Et, comme une cerise

sur le gâteau, une anecdote vient donner toute sa dimension à l’épreuve : Armel Le Cléac’h, qui figure parmi les favoris, est victime d’un accident domestique à quelques jours du départ. Il est remplacé au pied levé par Loïck Peyron qui, sans préparation, gagne la course. Avec ce record de 7 jours, 15 heures et 8 minutes, la Route du Rhum se court en trois fois moins de temps qu’en 1978. Que se pas sera-t-il en 2018?

2014

GÉRER LE SOMMEIL, CLÉ DE LA VICTOIRE

Les skippers apprennent tous à connaître le temps de sommeil dont leur organisme a besoin, et à le découper en courtes tranches qui se comptent en minutes. Mais comment trouver le repos dans les mouvements violents d’un multicoque, surtout quand on sait que le risque de chavirage n’est jamais à exclure? Même par conditions correctes, la vigilance s’impose, c’est pourquoi les coureurs ont mis au point des système de largage automatique des écoutes, avec un dispositif de retour depuis le cockpit jusqu’à la bannette. Il leur est ainsi possible de relâcher instantanément la pression du vent sur les voiles, pour éviter le chavirage. Trouver le sommeil exige malgré tout une bonne dose de confiance, que seule une solide expérience peut apporter.

Yvan Zedda/Sea&Co

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

à Saint-Malo ESCAPADE

30

Yacht malouin datant de 1896, NAN of FIFE est devenu le porte-drapeau du Crédit Agricole d’Ille-et-Vilaine et de sa filière mer.

Stephane Maillard

Le Crédit Agricole d’Ille-et-Vilaine, partenaire privilégié de la filière mer bretillienne

L’Ille-et-Vilaine se caractérise depuis tou jours par un lien fort entre la terre et la mer pour nourrir les hommes, les faire vivre et les accueillir. Ce lien fait partie de l’ADN du Crédit Agricole d’Ille-et-Vilaine qui a développé une relation privilégiée avec les acteurs des filières de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la mer. Avec près de 900 entreprises et plus de 9000 emplois*, la mer se révèle être l’un des secteurs économiques d’avenir du dépar tement dans lequel la Caisse régionale a décidé de s’engager et d’investir, réaffirmant ainsi son ambition à horizon 2020 : «amélio rer la qualité de vie des Bretilliens».

Consolidé début 2018, son pôle Économie de la mer est composé d’experts spécialisés sur les différents marchés de l’économie bleue en Ille et-Vilaine : pêche, conchyliculture, infrastruc tures portuaires, biotechnologies bleues... Cette équipe bénéficie de formations spéci fiques délivrées par des acteurs de la filière afin de s’adapter aux évolutions du secteur. Parallèlement et en cohérence avec ses valeursmutualistes, le Crédit Agricole d’Ille-et Vilaine a mis en place une commission littoral réunissant des acteurs locaux de lamer afin de coconstruire sa démarche. Dans un environ nement en constante mutation, ces échanges réguliers lui permettent d’être au plus près des attentes et des besoins de la filière.

*Source : AUDIAR, 2016

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

31

Vivre la route du Rhum à SAINT-MALO En choisissant Saint-Malo comme point de départ de la transatlantique en solitaire française, Michel Étevenon le fondateur de la Route du Rhum, a donné une dimension historique à sa course. Avant le coup de canon de départ, donné devant la pointe du Grouin, 15 kilomètres à l’est de Saint-Malo, la visite de la vieille ville s’impose. Car tout se tient…

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

François/Adobe Stock

à Saint-Malo ESCAPADE

32

À la découverte de SAINT-MALO L’intra-muros, comme on appelle la ville ancienne, raconte l’histoire de Saint-Malo. Mais cette saga magnifique reste difficile à cerner pour qui n’en possède pas les clés. Un tour des remparts permet de comprendre comment s’est bâtie la fortune des armateurs-négociants, des corsaires et des terre-neuvas.

Il faut d’abord savoir que la cité de Saint-Malo a été édifiée de toutes pièces sur un rocher nu que chaque marée haute transformait en île. Au xii e siècle, lorsque débute l’épopée malouine, l’actuelle chaussée du Sillon est un simple cordon de sable et de galets qui ne donne accès à la ville qu’à marée basse. À l’emplacement du port de commerce actuel s’étendent des vasières où les navires mouillent l’ancre ; là réside le secret de la fortune malouine. Ceux qui se sont établis sur le rocher de Saint-Malo sont des marins. Aux négo ciants de Bretagne, de France mais aussi des ports hanséatiques d’Eu rope du Nord, ils proposent des navires bien entretenus et des équipages d’élite pour transporter les marchan dises dans les meilleures conditions de sécurité. Pour le roi de France, ils arment des bâtiments corsaires contre les Anglais et les Hollandais. Puis, après avoir été de simples transpor teurs, ils deviennent négociants eux mêmes, et afin d’ouvrir de nouveaux marchés, ils explorent les océans.

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

Yolaine Gautier/CDT35

33

Pel-1971/ iStock

Entret ien

«A 40 ans, la Route du Rhum est une course unique qui perdure et s’impose dans le monde de la voile. Avec la très belle 10 e édition 2014, l’équipe municipale s’est impliquée plus que jamais dans l’accompagnement de l’événement, qui a vu se presser 2 millions de spectateurs entre Cancale et le Cap Fréhel. Un engouement confirmé par le record d’inscriptions cette année : pas moins de 123 bateaux entreront en lice le 4 novembre. La clé du succès réside sans doute dans les images fortes de bagarres mémorables, d’arrivées sur le fil, de records improbables. En filigrane, les records d’Alain Bourgnon et Florence Arthaud sont dans toutes les mémoires. Mais la course, c’est aussi Saint-Malo. Lieu magique avec ses bassins, ses remparts et ses côtes sauvages, notre ville corsaire désormais très courtisée, a accueilli le passage de courses prestigieuses comme l’OSTAR et la Volvo Ocean Race. En hommage aux 10 vainqueurs de la course qui nous ont fait vibrer, le boulevard de la Route du Rhum a été inauguré le 28 septembre 2018, exposant à leurs admirateurs les empreintes des mains de nos héros modernes.»

la réputation de Saint-Malo, elle n’a pas autant contribué à la fortune des arma teurs que le grand négoce. Pour prendre la mesure de la réus site malouine, il faut monter au som met du donjon, accessible depuis le Musée historique aménagé dans le château. La vue sur les alignements de cheminées géantes des hôtels d’ar mateurs ne laisse pas d’impressionner. Toutefois, la vérité historique oblige à préciser que le Saint-Malo qu’on voit aujourd’hui a été, en très grande partie, reconstitué après la dernière guerre : les combats pour la libération de la ville avaient en effet quasiment détruit tout l’intra-muros. Du château, on passe sur les remparts. À la sor tie du musée, il faut longer le château sur la droite pour atteindre la porte Saint-Thomas où un escalier donne accès aux chemins de ronde. En sui vant ceux-ci, on admire, côté terre, la partie la plus authentique de la ville, car elle échappa au désastre de 1944. Côté mer, le panorama sur la rade de Saint-Malo paraît rien moins que gran diose, le plus beau point de vue étant sans contexte la terrasse de la tour Bidouane.

C’est ainsi qu’en juillet 1713, le Grand Dauphin revient à Saint-Malo au terme d’un tour du monde époustouflant. Ayant échangé, au Chili et au Pérou, des marchandises françaises contre de l’or et de l’argent, il a ensuite traversé le Pacifique pour accoster en Chine. Il y a négocié les métaux précieux contre des porcelaines, de l’ivoire, des épices, des soieries, avant de revenir au pays via le cap de Bonne-Espérance. Nombre de navires reprendront la même route, faisant de Saint-Malo le premier port de France. Si de telles expéditions rap portent gros, elles exigent des cam pagnes longues qui font attendre le retour sur investissement pendant plusieurs années. C’est pourquoi les armateurs avisés s’assurent un flux de trésorerie en envoyant chaque été des morutiers à Terre-Neuve. En effet, comme la morue salée se conserve indéfiniment, elle constitue l’aliment idéal pour respecter le «maigre» du vendredi dans les pays où on ne trouve pas de poisson. C’est le plus énorme des marchés! De plus, les équipages de terre-neuvas constituent une réserve de marins aguerris chaque fois qu’un conflit permet d’armer des bâtiments corsaires. Mais la guerre de course a beau avoir fait

Claude Renoult, maire de Saint-Malo

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

à Saint-Malo ESCAPADE

34

Cette grosse tour ronde, qui se dresse un peu en avant de la ceinture de rem parts, servait à entreposer la poudre à canons : c’est pourquoi elle fit l’objet de la plus spectaculaire attaque jamais tentée par les Anglais contre Saint Malo. Une nuit de 1693, ils profitèrent d’une grande marée haute pour laisser dériver contre la tour un bateau chargé d’explosifs. Heureusement, un rocher un peu plus haut que les autres bloqua juste à temps la bombe flottante, qui explosa en mer et non pas contre la tour. C’est

à la suite de cette alerte que des forts furent construits sur plusieurs rochers et îlots de la baie, contrôlant chacun des chenaux qui, en passant au beau milieu des récifs, conduisent au port. Après être passé au-dessus des plages, on découvre la longue digue qui pro tège l’avant-port. C’est le môle des Noires dont l’extrémité offre un point de vue impressionnant sur les remparts et les hôtels d’armateurs: l’aller-retour s’impose!

Toujours sur le chemin de ronde, après avoir salué la statue de Duguay Trouin, on note un édifice de belle allure qui semble cependant un peu décati par rapport à ses voisins : c’est l’hôtel Magon, dont l’état s’explique par un âge vénérable. Par miracle en effet, il est sorti intact de la guerre. Or, cet hôtel fut construit par l’un des plus fameux négociants du xviii e siècle : Auguste Magon de la Lande, lui-même propriétaire de la malouinière de la Chipaudière. La visite en fait découvrir le cadre de vie de «ces messieurs de Saint-Malo», comme Louis XIV appelait ces richissimes bourgeois auxquels il fit appel à plusieurs reprises pour ren flouer les finances du royaume. Au bout du rempart, un escalier des cend sur la place Chateaubriand, face à l’entrée du château. Ses terrasses offrent le point de rendez-vous clas sique intra-muros. Et bien entendu, une soirée malouine ne saurait se concevoir en dehors de la rue de la Soif. Inutile de la chercher sur un plan : elle n’existe pas ; c’est le surnom de la succession de cafés et de restaurants situés tout au long de l’intérieur des remparts, dans les rues Jacques-Cartier et de Chartres. À l’époque des campagnes de pêche à Terre-Neuve, c’est là que s’arrosaient les départs et les retours. Et l’esprit maritime est demeuré intact au bar de la Brasserie des Voyageurs, en face du château, avec le tableau géant brossé avant la guerre par le peintre officiel de la Marine Gustave Alaux : l’arrivée à Saint-Malo d’un cor saire avec sa prise hollandaise. Tandis que le bar de l’Univers, tapissé de pho tos de voiliers, reste le yacht-club offi cieux de Saint-Malo.

istock

Détours en France / Numéro spécial / LA ROUTE DU RHUM

Made with FlippingBook Online newsletter