La Presse Bisontine 52 - Février 2005

LE DOSSI ER

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Hébergement des personnes âgées : L’URGENCE

La prise en charge des personnes âgées est un des enjeux principaux actuellement sur le secteur de Besançon. S’il s’avère exagéré de parler de crise grave, la situation des éta- blissements d’hébergement est néanmoins alarmante. Le constat est sans appel : tous les centres d’hébergement affichent com- plet, les listes d’attente peuvent dépasser 9 mois pour certains établissements. Pendant ce temps-là, les familles essaient tant bien que mal de s’organiser. Certains élus en char- ge de ce dossier qualifient eux-mêmes la situation “d’infernale.” La Presse Bisontine a fait le tour des principales structures d’ac- cueil du Grand Besançon pour évaluer la réalité des faits. Des familles, confrontées à la difficulté de confier un proche âgé, témoi- gnent. L’engorgement des établissements et le coût énorme lié au vieillissement amènent les responsables de cette question à réflé- chir à d’autres formes d’hébergement. Des initiatives se font jour. La question de l’aide à domicile fera d’ailleurs l’objet d’un autre sujet traité ultérieurement, tant le seul thè- me de l’hébergement collectif mérite à lui seul ce dossier. Hébergement des personnes âgées : l’urgence. Le point sur un enjeumajeur des prochaines années.

LE DOSSI ER

P ERSONNES ÂGÉES

Plus de 100 personnes attendent au C.H.U.

Les établissements d’accueil totalement engorgés

soignantes, sans parler des kinésithé- rapeutes et autres ergothérapeutes ne fait que renforcer le malaise actuel de la gérontologie. “Dansmon service, j’ai 2 aides-soignantes pour 30 lits. C’est intenable” illustre ce praticien. Dans le Grand Besançon, les efforts sont actuellement concentrés pour déve- lopper d’autres formes de prise en char- ge : hôpital de jour, hébergement tem- poraire, ou pour permettre aux personnes âgées de rester à domicile (des programmes d’habitats adaptés sont actuellement en cours sur Besan- çon). Sur la périphérie, les communes de Marchaux et de Montfaucon par exemple réfléchissent à la création de nouvelles unités de vie pour personnes âgées cette année. Toutes ces solutions, aussi utiles qu’elles soient, nemasqueront pourtant jamais la nécessité de poursuivre des pro- grammes de rénovation ou de construc- tion de nouvelles structures d’héber- gement. Car, comme le souligne cet autre gériatre, “même si l’allongement de la vie permet aux personnes d’être autonomes plus longtemps qu’avant, à un moment donné, elles deviennent nécessairement dépendantes et ne peu- vent plus rester chez elles. Pour elles, il faudra bien de nouvelles places en établissement !” Hélas, pour l’instant, aucun projet de nouvelle maison de retraite n’estmené sur leGrandBesan- çon. ! J.-F.H.

Trouver une place enmaison de retraite ou en centre de long séjour est presque devenu un luxe. Des cen- taines de personnes âgées attendent, à leur domi- cile ou à l’hôpital, qu’une place se libère. Le point sur un phénomène bisontin.

B esançon compte 20 000 per- sonnes âgées de plus de 60 ans, soit plus de 15% de la popula- tion. Toutes ces personnes dites “âgées” ne sont pas dépendantes, loin s’en faut. La plupart sont autonomes. “C’est à partir de 75 ans que les problèmes de dépendance commencent à se poser” commente cette responsable bisontine de la question. Il suffit de faire le tour des établisse- ments d’accueil des personnes âgées pour mesurer la grave crise que tra- verse ce secteur d’activité. Ils affichent tous complet et les listes d’attente s’al- longent. Parfois jusqu’àunan… Consé- quence directe : d’autres établissements dont la vocation première est le court ou le moyen séjour se trouvent à leur tour engorgés. C’est à de véritables conséquences en cascade auxquelles on assiste actuellement sur le Grand Besançon.

Illustration avec le centre de soins Ambroise Paré des Tilleroyes, destiné à accueillir des patients en soins de suite, c’est-à-dire nécessitant une pri- se en charge à la sortie d’un établisse- ment hospitalier en vue de leur réadap- tation. On lenommeaussi centremoyen séjour, car il fait souvent la transition entre l’hôpital et la maison de retrai- te. L’évolution de ces dernières années est alarmante. En1995, laduréemoyen- ne d’un séjour était de 29 jours. Aujour- d’hui, il est de 55 jours. Cette aug- mentation est liée essentiellement au fait que ces personnes âgées ne trou- vent pas de place enmaison de retrai- te. L’augmentation du degré de dépen- dance, due à l’allongement de la vie, est tout aussi flagrante et lourde de conséquences. Toujours en 1995, 55% des patients soignés aux Tilleroyes retournaient à leur domicile à l’issue de leur séjour. Ils ne sont plus que 45%

Manque de places et carence en personnel : il y a urgence.

à ce jour. Les autres doivent trouver une solution dans d’autres établisse- ments type centres de long séjour, eux- mêmes engorgés : de deux mois à un an d’attente selon les établissements (Avanne, Bellevaux, Mamirolle…). Les conséquences dumanque de places se répercutent jusqu’auC.H.U. : “Il est estimé à au moins 100 le nombre de personnes âgées hospitalisées auC.H.U. et qui devraient être dans des services de soins de suite. Tout cela a un coût car leur hospitalisation coûteraitmoins cher en centre de soins de suite car il n’y a pas un plateau technique aussi important qu’au C.H.U. Et toutes ces personnes occupent des lits de médeci- ne générale alors qu’elles n’ont rien à

faire à l’hôpital. Le secteur des per- sonnes âgées est en crise” résume ce médecin gériatre bisontin. Les conséquences ne s’arrêtent pas là. “Les personnes âgées qui ne trouvent pas de place sont obligées de rester à domicile avec toute l’assistance que cela nécessite. Elles sont souvent aidées par leurs enfants, qui eux-mêmes ont dépas- sé l’âge de la retraite vu l’allongement de l’espérance de vie. Conséquence : on rencontre parfois des enfants de 65 ou 70 ans physiologiquement plus âgés que leur parent, tellement ils se don- nent” poursuit un autre spécialiste de la gérontologie. La question dumanque de moyens en médecins, infirmières et surtout aides-

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