Journal C'est à Dire 168 - Juillet 2011

24

P L A T E A U D E M A I C H E

Éric Murat : “Je n’éprouve ni rancune ni nostalgie” Trévillers a connu la gloire avec le Franch- Country Festival. Puis la descente aux enfers. Pour le journal C’est à dire, Éric Murat a accep- té de se confier, six ans après sa démission. Trévillers

G ourou, illuminé, pas- sionné, visionnairemais surtout pas imbu de sa personne. Éric Murat est un peu de tout cela. Pour ceux qui ne le connaissent pas,cet hom- meâgé de 50 ans a réussi à atti- rer jusqu’à 20 000 personnes à Trévillers… faisant passer ce village de l’ombre à la lumière. Même les caméras de France 2 ont goûtéaux joies du plateau de Maîche, Éric Murat était le Grand Sioux, un hom- me parvenu à fédérer et bouger tout un territoire. Il avait appri- voisé les plus récalcitrants et avait réussi à se faire adopter. Avec ses tiags, son perfecto, ses che- veux longs, sa plume d’Indien en guise de boucle d’oreille, ce n’était pourtant pas gagné d’avance. Puis, Murat le prési- dent a quitté le navire du “Fran- ch Country”, laissant derrière lui de nombreuses rumeurs et notamment celle qu’il se serait enrichi personnellement, que “son” association aurait laissé de nombreuses dettes. Aujour- d’hui dans le Pays de Montbé- liard où il s’occupe de la réin- sertion d’anciens détenus, Éric Murat se confie. “Franch-Country fes- tival”, événement créé autour de la musique country, des Indiens et Cow-boys. Sur le

d’avoir vu le Franch-Coun- try Festival disparaître sont-elles refermées ? Éric Murat (ancien président et créateur du Franch Coun- try) : En reparler, six ans après, c’est bizarre d’autant que j’en étais le papa. Ce genre d’événement, on ne le fait une fois dans sa vie. Ces huit années furent les plus belles de ma vie, même si j’y ai laissé ma santé, mon couple, mon fric. êtes par l’intermédiaire de cette fête populaire… E.M. : N’importe quoi. S’enrichir n’a jamais été mon but et toutes les personnes qui ont gravité autour de moi dans le but de s’enrichir ont vite quitté le navi- re. Elles ont compris qu’elles ne pouvaient pas se faire de l’argent sur le dos du festival. En le créant, je voulais faire décou- vrir la musique et la country musique. Càd : Comment expliquer la disparition d’un événement qui a accueilli jusqu’à 20 000 personnes ? E.M. : La météo. En huit ans, on s’est pris cinq fois la pluie. Il a même fallu en 2005 affréter des camions de paille car il avait trop plu. Nous n’avons pas eu le soutien du politique car nous enrichi Càd : Vos détrac- teurs disent pour- tant que vous vous

“Après 2005, je ne suis pas responsable.”

Éric Murat a réussi fédéré près de 300 bénévoles autour de lui. C’était à la belle époque, entre 1998 et 2005 à Trévillers.

Càd : Vous dites que la météo vous a tué. N’avez-vous pas vu trop grand et offert trop de places gratuites ? E.M. : Nous avons fini avec 150 000 euros de budget. Tout devenait plus cher : la sécurité, la publicité, les artistes. À côté de cela, nous faisions travailler tous les corps de métiers du Pla- teau. Pour les entrées gratuites, c’est de la foutaise car une per- sonne qui n’a pas payé sa place consommera son argent dans la boisson ou la nourriture. C’est là que nous gagnions. Càd : Le Franch Country a laissé des impayés à de nom- breuses entreprises. Expli- quez-nous ? E.M. : Ce n’est pas moi car le festival a continué alors que je dit à mes successeurs. Sur les chiffres, j’ai tiré un trait. Je veux bien assumer tout ce qui s’est passé de 1998 à 2005 mais pas après. Càd : Pourquoi avoir quitté le navire ? E.M. : Je suis parti dans un uni- vers artistique différent. J’ai eu l’opportunité d’être intermittent du spectacle et vivre de la musique, ce qui m’a toujours plu. Cela ne se refusait pas. Je n’en veux pas aux gens qui me cri- tiquent aujourd’hui mais il est facile de trouver un fautif. Je maîtrisais tout… sauf la météo. n’étais plus là en 2006. Avoir voulu déplacer le festival à Besançon a tué le festival. Les dettes sont arrivées là. Des “teepe” sur du macadam, ça ne pouvait pas mar- cher. Je l’avais pourtant

étions catalogués comme une manifestation populaire…Dans les politiques, seule Christine Bouquin (conseillère générale)

nous a soutenus. À côté de cela, je n’aurai rien fait sans les béné- voles ! Je remercie encore Alain Bertin qui m’a ouvert des portes.

Càd : Revenez-vous dans le Haut-Doubs ? Ce festival vous a-t-il détruit ? E.M. : Je reviens à Maîche et je n’ai pas besoin de gilet pare- balles (rires). J’aime cette région. Dans la balance, je retiens le positif, ces odeurs de café dans le camping, les “afters” avec les artistes, les yeux des enfants devant les Indiens… Càd : Votre principal regret ? E.M. : Que les gens qui ont pris ma relève n’aient pas réussi à faire vivre le festival. Je le répè- te : je n’ai ni de rancune ni de nostalgie. J’ai vécu de superbes moments. Au tout début, les agri- culteurs me fermaient les portes lorsque je demandais de me prê- ter un terrain pour le festival.

C’est à dire : Les cicatrices

J amais sans son livre. Sta- nislas Renaud, une fois le nez plongé dans les pages d’unouvrageadumalàlever lenez.L’hommeestunpassionnéde La première page du club de lecture Sous l’impulsion de Stanislas Renaud, un club de lecture permettra aux amoureux des livres d’échanger leurs connaissances et leurs bouquins. Maîche

lecture. Demeurant à Maîche où il estparailleursconseillermunicipal, ce professeur d’histoire-géographie lanceunclubdelecture.L’intérêtest d’échanger autour des œuvres. À partir de septembre, il pro- pose aux lecteurs du Plateau de se retrouver autour d’un thème pour engager ensuite le débat. “Chacun proposera un thème en fonction des lectures qu’il affec- tionne. Exemple : on peut com- mencer par le thème du roman policier. On donne une liste de livres à lire et nous en discute- rons ensuite” explique-t-il. Il pro- pose une coopération avec la bibliothèque de Maîche qui pour- rait prêter gratuitement les livres. Le passionné espère sus- citer la curiosité. Cette idée a germé après sa par- ticipation au “Prix du livre Fran- ce Inter” en tant que juré. Avec 23 autres passionnés de lectu- re triés par la radio, il a argu- menté pour son livre préféré. Sous la présidence d’Amin Maa- louf - écrivain franco-libanais -, le jury a attribué le prix à Oli- via Rosenthal pour “Que font les rennes après Noël”, paru aux éditions Verticales. Renseignements : stanis- las.renaud@laposte.net

Mais une fois que j’ai réussi à faire parler de leur village, tout le mon- de me tapait dans le dos. J’étais devenu l’enfant du village et plus le “méchant” avec des che- veux longs et les boucles

“Le “méchant”

avec des cheveux longs.”

d’oreille.

Càd : Qu’est devenu Éric Murat, l’Indien du Plateau de Maîche ? Relancera-t-il un jour le festival ? E.M. : (rires). Je suis dans le Pays de Montbéliard où je m’occupe de la réinsertion d’anciens détenus. Je joue tou- jours de la musique avec le grou- pe “Captain Jack”. Et non, je ne relancerai pas le Franch-Coun- try. On ne le fait qu’une fois dans sa vie. Propos recueillis par E.Ch.

Stanislas Renaud était membre du jury au prix littéraire France Inter. Cette expérience l’incite à créer un club de lecture sur le Plateau.

Made with FlippingBook Annual report