SPORT, PAIX ET DÉVELOPPEMENT 1913 -2013

SECONDE PARTIE_CHAPITRE 6

Développement au Royaume-Uni et en Scandinavie Tout à l’opposé de l’Allemagne et de l’Autriche se trouve le développement du sport ouvrier au Royaume-Uni : le sport travailliste britan- nique n’a jamais été organisé à grande échelle et à un niveau national. En Grande-Bretagne, il y a avait aussi un grand nombre de clubs de sport travaillistes locaux pour les adeptes de différentes disciplines. Le plus connu d’entre eux était le club cycliste socialiste Clarion, fondé à Birmingham en 1894 (http://www.cla- rioncc.org/about.html). L’organisation cen- trale créée en 1923, la British Workers Federa- tion of Sport (BWFS) n’a jamais atteint que les deux mille membres environ. Elle a également été de très courte durée ; en 1935, l’union était déjà dissolue (Jones, 1985, 110–122). Bien que les trois pays scandinaves que sont le Danemark, la Norvège et la Suède, avec leurs partis sociaux-démocrates puissants, soient assez similaires dans leurs structures politiques et sociétales respectives, le dévelop- pement du sport travailliste a été très différent pour chaque pays. En Suède, le parti social-dé- mocrate n’a pas soutenu la séparation des clubs sportifs ouvriers du mouvement sportif natio- nal (Riksidrottsförbundet, RIF) fondé en 1903. Cela a été un choix politique déterminant du parti : il a décidé de rivaliser avec la bourgeoisie au pouvoir dans le mouvement sportif, de la même manière que pour tout autre secteur de la société suédoise. Toutefois, après la première guerre mondiale, l’opposition sportive de gauche, soutenue par le Parti Communiste, a

ou non atteindre les objectifs de leur culture physique dans le cadre d’organisations spor- tives dominées par la bourgeoisie nationale s’est posée. La politique sportive de la classe ouvrière était associée aux objectifs politiques généraux du mouvement des travailleurs so- cialistes. Ce tournant idéologique a conduit à la formation d’un mouvement sportif tra- vailliste autonome. Dans bon nombre de pays européens, des organisations sportives ou- vrières nationales ont vu le jour entre le 19e et le 20e siècle (Krüger & Riordan, 1985). Même avant la première guerre mondiale, ce fut en particulier dans les régions germano- phones de l’Europe, à savoir en Allemagne, en Autriche et en Suisse que le sport travailliste organisé s’est mué en unmouvement populaire regroupant des centaines de milliers de per- sonnes. Les premières organisations sportives travaillistes nationales en Allemagne et en Au- triche ont été créées par des gymnastes ou- vriers. Lors d’un meeting à Gera en 1983, le Arbeiter-Turnerbund (ATB) allemand fut fondé (Ueberhorst 1973, 18–22). En même temps, les gymnastes travaillistes autrichiens se sont sé- parés du mouvement gymnique bourgeois pour fonder leur propre organisation (Kram- mer 1981, 16–21). La fondation de celle-ci est considérée comme étant liée à l’initiative des social-démocrates de fonder l’Arbeiter Turn- und Sportbewegung, le mouvement gymnique et sportif travailliste en Autriche en 1892. Peu à Développement dans les régions germano- phones de l’Europe

peu, des adeptes d’autres disciplines sportives se sont organisés. En Allemagne, une Commis- sion centrale pour la Coopération dans le Sport et la Culture physique (Zentralkommission für Sport und Körperpflege) a été établie en 1912. À la fin des années 20, onze unions sportives tra- vaillistes représentant différentes disciplines sportives travaillistes faisaient partie de cette commission centrale. Elle comptait au total plus d’1,3 millions de membres. L’union la plus importante avec ses 700 000 membres est la Arbeiter Turn- und Sportbund (ATSB), qui re- présente la gymnastique, l’athlétisme, le foot- ball, les sports d’hivers et quelques autres dis- ciplines (Ueberhorst, 1973, 111–114). Une autre organisation puissante, avec plus de 320 000 membres à son actif, est l’association des cy- clistes travaillistes (Arbeiter-Radfahrerbund ‘Solidarität’) (Beduhn, 1982). L’association des touristes travaillistes amis de la nature (Touris- tenverein ‘Die Naturfreunde’) est également très populaire (Wunderer, 1977; Zimmer, 1985). En 1924, toutes les unions sportives au- trichiennes représentant plusieurs disciplines ont réussi à créer une organisation centrale unique, l’Association travailliste pour le sport et la culture physique en Autriche (Arbeiter- bund für Sport und Körperkultur in Öster- reich, ASKÖ). À la fin des années 20, cette or- ganisation centrale comptait environ un quart de million de membres (Krammer, 1983, 95– 98). En 1971, l’ASKÖ a été renommée Arbeits- gemeinschaft für Sport und Körperkultur in Österreich. Le mouvement sportif autrichien était et est toujours l’un des piliers de la CSIT.

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