Livre Vins de Cassis

APPELLATION

•••

«FIN ET TRÈS APPRÉCIÉ»

La bonne notoriété du vin de Cassis ne faiblit pas par la suite. Il semble même qu’il soit devenu le vin fétiche des Marseillais. Ainsi, dans Le Comte de Monte-Christo, d’Alexandre Dumas, c’est avec deux bouteilles de vin de Cassis que le tailleur Caderousse, l’ami d’Edmond Dantès, s’enferme pour essayer « de noyer son inquiétude » . De même, en 1857, l’agronome Victor Rendu, dans son ouvrage de référence, Ampélographie française, classe Cassis parmi les contrées de Provence qui produisent des vins « fins, très appréciés » – pour les blancs. La notoriété du vin de Cassis est donc bien anté- rieure à la création de son appellation. Cependant, le vignoble cassidain que nous décrit Rendu est assez différent de celui d’au- jourd’hui, puisqu’il compte 450 hectares (deux fois plus qu’aujourd’hui), dont seulement un tiers est planté de variétés blanches ; côtés cépages, nous retrouvons tout de même de vieilles connais- sances : l’ugni, la clairette et le pascal blanc, notamment. Côté rouges, le mourvède, le grenache, le bouteillan et le brun fourca (morrastel) sont les variétés principales. L’auteur précise par ailleurs qu’une part de cépages blancs entre dans la vinification des vins rouges. Mais que le vin blanc, dont le volume de production est à peu près dix fois inférieur au rouge, « vaut presque le double » . C’est qu’il est « fort prisé des amateurs de vins très alcooliques » , selon ses termes. Rendu ajoute qu’il se fait encore à Cassis un vin liquoreux qui assemble « deux tiers de muscat et un tiers de mourvède » . Mais Cassis, malgré son relatif isolement, n’échappe pas au phylloxéra. Anéanti par le fléau, le vignoble doit être replanté sur porte-greffes américains, à l’initiative de Jules Savon et d’Émile Bodin. Il faudra une soixantaine d’années, cependant, pour que la surface de vignes atteigne à nou- veau celle d’avant le phylloxéra. Entretemps, son visage a bien changé ; si le blanc devient majoritaire, exit les vins doux, car exit le muscat. Les vignes ont été replantées de cépages traditionnels de la région, surtout de la clairette, de l’ugni et du bourboulenc, et plus surprenant, de la marsanne. Un vigneron de Cassis, Pierre Imbert, agronome de formation, et qui possède des vignes à Châteauneuf-du-Pape, est tombé amoureux du cépage rhodanien, et l’a acclimaté à Cassis. Nommé président du syndicat des vignerons, c’est lui qui militera pour que Cassis reçoive, parmi les tout premiers, la prestigieuse appellation contrôlée, en 1936. Au passage, la marsanne sera promue offi- ciellement parmi les cépages de l’appellation. RECONSTRUCTION ET CONSÉCRATION

•••

the “distinguished, fine and highly appreciated” white wines of producers in the Provence region. So the reputation of Cassis wine well and truly precedes the granting of its appellation. However, the Cassis vineyard described to us by Rendu is rather different to today’s, because it covered 450 hectares (twice the area of today), of which only one-third was planted with white grape varietals, including the well- known names of Ugni, Clairette and Pascal Blanc. The main varieties grown for red wine were, as described, “Mourvède”, Grenache, Bouteillan and Brun Fourca (Morrastel). The author also goes on to make clear that a proportion of white varietals was used in the

vinification of red wines. But that the quantity of white wine produced was around one-tenth that of red, and that it “cost almost double”. He also describes it as “highly prized by lovers of wines high in alcohol” . Rendu adds that a sweet wine blended from “two-thirds muscat and one- third Mourvède” is still made in Cassis.

Reconstruction and consecration

But despite its relative isolation, Cassis did not escape phylloxera. Annihilated by the great wine blight, the vineyards had to be completely replanted using vines grafted onto American

49

Made with FlippingBook Online newsletter