BVA_NUDGE_2018

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Prendre des risques ou fuir le risque ? Différences comportementales entre pays face aux risques financiers

Maria Ferreira, ING maria.ferreira.sequeda@ing.com

Introduction Les théories conventionnelles relatives au processus décisionnel dans le domaine de la finance reposent sur le postulat que les individus sont rationnels et pleinement informés et qu’ils évaluent objectivement les risques financiers en fonction de la volatilité des rendements. Selon ces modèles, les individus investiront toujours une partie de leur patrimoine en Bourse et ils détiendront un vaste portefeuille de titres diversifiés. Les données empiriques montrent toutefois que cette vision totalement rationnelle des choses ne permet pas de comprendre le véritable comportement des investisseurs. Généralement, les gens sont peu à l’aise lorsqu’il s’agit de prendre des risques. Les pertes pèsent plus que les gains dans la balance et les individus ont tendance à redouter les pertes ( Kahneman et Tversky, 1979 ). Dans une étude publiée en 1981, souvent considérée comme le point de départ de la finance comportementale, Shiller démontre que les théories de l’évaluation rationnelle ne suffisent pas à expliquer les fluctuations du cours des actions. Depuis, de nombreuses études relatives à l’influence des facteurs psychologiques sur le comportement financier des individus ont vu le jour ( Hirshleifer, 2015 ; Campbell, 2016 ). Dans lamesure où les décisions d’investissement impliquent des risques et un certain degré d’incertitude, nous avons tendance à nous en remettre aux normes et à notre intuition. L’intuition désigne la perception des risques, les croyances, les jugements et les attitudes qui jouent un rôle essentiel dans la prise de décisions financières ( Kahneman et Riepe, 1998 ; Shiv et al., 2005 ; Shum et Faig, 2006 ; Simonsohn, 2009 ; Nosic et Weber, 2010 ; Weber et al., 2013 ; Hoffman et al., 2015 ). S’appuyant sur des données issues de l’enquête internationale réalisée par ING (IIS), l’auteur de cette étude met en lumière le comportement des individus face au risque dans 15 pays, et identifie les facteurs qui les rendent moins enclins à adopter des comportements financiers risqués. Les résultats montrent que tous les individus de l’échantillon (env. 12 500 personnes) affichent une aversion au risque et suggèrent que la théorie classique de gestion de portefeuille (c-à-d., la volonté d’accroître son épargne grâce à des produits dont le rendement potentiel est supérieur au niveau de risque qu’ils font courir) ne résiste pas à l’épreuve des faits. Par exemple, les Allemands, les Polonais et les Autrichiens pensent qu’un investissement risqué est moins rentable qu’il n’y paraît. En matière d’aversion au risque, des différences importantes entre les 15 pays étudiés ont été révélées, même lorsque l’on prend en compte certains critères comme le sexe, le niveau d’instruction, les revenus, etc. Les Allemands, les Autrichiens et les Néerlandais affichent la plus forte aversion au risque, tandis que les Américains, les Turcs, les Australiens et les Britanniques sont plus enclins à prendre des risques.

134 Guide de l'Économie Comportementale - 2018

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