BVA_NUDGE_2018

Éditorial

et al., 2014 ; Heidhues et Koszegi, 2017 ; Bar-Gill et al., 2017 ), et des recherches complémentaires sont en cours sur l’inattention et les décisions relatives à la santé ( Abaluck et Adams, 2017 ; Allcott et al., 2017 ). Récemment, Handel et Schwartzstein (2018) ont réalisé une synthèse de la littérature abordant la façon dont les gens utilisent (ou non) les informations dont ils disposent pour nourrir leurs décisions, en distinguant deux écoles de pensée : la friction (approche de l’inattention rationnelle) et les lacunes mentales (voir les exemples sur la santé dans le tableau 2). L’école de la friction se concentre sur les coûts d’acquisition et de traitement de l’information. Par exemple, aux États-Unis, un consommateur qui souscrit une assurance maladie sur un marché dédié doit payer pour découvrir les options supplémentaires disponibles et les évaluer. Ce cadre d’inattention rationnelle corrobore l’hypothèse néoclassique selon laquelle les gens développent des croyances exactes en utilisant les informations qui valent la peine d’être traitées, quand bien même il intègre également des hypothèses réalistes sur le coût de l’attention ou du traitement de l’information. Il existe un courant de pensée alternatif dont le postulat de base est que l’économie est composée d’individus qui présentent des lacunes mentales (ou distorsions psychologiques) concernant la collecte des informations, la capacité d’attention et le traitement des informations (ce qui est différent de l’inattention irrationnelle) ( Handel et Schwartzstein, 2018 ). En partant de cette idée, un consommateur désirant souscrire une assurance maladie sur le marché est susceptible de négliger des informations importantes au moment de choisir des couvertures, même si ces informations sont disponibles, et ce sans doute parce qu’il utilise un modèle décisionnel inadapté ou parce qu’il surpondère certaines caractéristiques importantes des couvertures. Ce courant de pensée insiste sur le fait qu’il existe un écart entre ce que les gens pensent et ce qu’ils penseraient s’ils faisaient preuve de rationalité. Les catégories « friction » et « lacunes mentales » ne sont pas mutuellement exclusives ni exhaustives, mais Handel et Schwartzstein (2018) les proposent comme classifications générales des approches que les chercheurs adoptent pour étudier les choix malavisés. Jusqu’à présent, la majeure partie de la littérature empirique ne fait aucune distinction entre la friction et les lacunes mentales. Il existe plusieurs façons de distinguer la véritable demande pour un produit et la courbe de la demande avec friction et/ou avec des lacunes mentales. Une première stratégie empirique consiste à estimer une courbe de la demande pour les experts et une autre courbe de la demande pour les non-experts, en s’appuyant sur l’hypothèse que la première représente la courbe de la demande observée dans un mode rationnel, sans frictions pour les experts et les non-experts, sous réserve de certaines données observables (voir Bronnenberg et al., 2015 ). Une seconde approche consiste à utiliser des techniques d’enquête pour distinguer les consommateurs avertis des consommateurs non avertis, et identifier le fossé frictions/lacunes mentales. L’hypothèse sous-jacente est que les consommateurs avertis (selon l’enquête) prennent des décisions rationnelles et avisées dans le cadre d’un modèle néoclassique de l’utilité attendue (voir Handel et Kolstad, 2015 ).

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33 Guide de l'Économie Comportementale - 2018

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