BVA_NUDGE_2018

Applications

D.R.I.V.E. : Cadre de travail pratique pour l’application des sciences du comportement à la stratégie

Torben Emmerling, Affective Advisory torben@affective-advisory.com

Introduction Les sciences du comportement ont pris depuis dix ans l’ampleur d’un phénomène mondial se répercutant largement sur les politiques publiques. Les Nudges Units se sont multipliées, instillant des insights comportementaux au cœur des gouvernements et des organismes publics du monde entier ( OCDE, 2017 ). En parallèle, un nombre croissant d’organisations privées font appel aux sciences du comportement, séduites par les résultats prometteurs des interventions comportementales dans le secteur public et par la mise en lumière de cette discipline après le prix Nobel d’économie décerné à Richard H. Thaler ( Gino, 2017 ). Encouragées par les enseignements des sciences comportementales sur l’engagement des clients, des collaborateurs et des citoyens, de plus en plus d’organisations cherchent à en tirer parti sur le plan stratégique ( Martin et Ferrere, 2017 ). Cette tendance généralisée se fonde sur l’idée que le comportement humain n’obéit pas aux hypothèses de rationalité (p. ex. préférences complètes et transitives) de la théorie économique standard ( DellaVigna, 2009 ; D. Kahneman, 20013 ; Kahneman et Tversky, 1979 ). Au contraire, l’être humain manifeste une « rationalité limitée » ( Daniel Kahneman, 2003 ; Simon, 1955 ) qui laisse la situation d’un individu ou d’un groupe influencer son comportement. ( Ariely et Jones, 2008 ; P. Dolan et al., 2012 ). Le processus décisionnel humain s’appuie essentiellement sur une dimension de jugement automatique, spontané, inconscient, affectif et associatif que Kahneman et al. (2011 ; 2002, 2005) désignent comme le « système 1 », plutôt que sur un traitement plus contrôlé, conscient, déductif, réfléchi et fondé sur des règles, ou « système 2 ». On voit donc que le comportement humain est souvent déclenché par des facteurs contextuels suscitant associations d’idées et émotions, par exemple des défauts, des messages saillants, des normes sociales, etc. ( P. Dolan et al., 2012 ; Morewedge et Kahneman, 2010 ). Les sciences du comportement reconnaissent et explorent précisément ce principe, recherchant systématiquement à influencer les comportements en sollicitant la dimension décisionnelle par des conceptions contextuelles ou des architectures de choix intentionnelles ( Richard H. Thaler et Sunstein, 2008 ). Les organisations qui prennent en considération l’aspect affectif du comportement humain pour établir leur stratégie et prendre des décisions peuvent espérer des solutions plus efficaces pour leurs groupes cibles internes et externes. Alors que les enseignements des sciences du comportement en matière de processus décisionnels humains et de méthodes à appliquer dans les secteurs public et privé pour inciter les individus à adopter certains comportements sont fortement

62 Guide de l'Économie Comportementale - 2018

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