PEPS MARS

se faire plaisir 14

Rencontre avec… Valeria Bruni Tedeschi «Lavierecèledesmoments incroyables»

Actrice, scénariste, réalisatrice, elle nous enchante depuis des années sur scène comme à l’écran. Son dernier lm, Les Estivants 1 , à peine sorti en salle, Valeria Bruni Tedeschi enchaîne les projets. Après le tournage de Seules les bêtes, de DominiqueMoll, elle remonte sur les planches dans La Trilogie de la vengeance ². Entretien avec une artiste auxmultiples talents. Propos recueillis par Marie-Christine Luton

lamême solitude. Lorsque je travaille à un scénario, je cherche ces empreintes digitales, cette solitude particulière d’un personnage. Lorsque je les ai trou- vées, jeme dis que ça va aller : tout n’est peut-être pas là, mais j’ai la matière pour développer un personnage car j’ai compris sa solitude. Même si après, à l’écran, on ne la voitmême pas. Vous parlez d’âge également dans vos lms, serait-ce une question qui vous préoccupe ? Évidemment. D’ailleurs dans Les Estivants, en dehors de ma fille, il n’y a pas de gens jeunes. Que regrettez-vous de vos 20 ans ? Dem’être sentie coupable. Et les années passant, c’est un sentiment qui a disparu ? Il n’a pas disparu, mais il s’est amoindri. Et je trouve que c’est dommage de se gâcher la jeunesse avec la culpabilité. J'ai trouvé une façon de faire. C’est comme quelqu’un qui fait la cuisine et doit servir à table en même temps. Lorsque j’ai réalisémonpremier film, j’ai voulu jouer parce que je pensais que je ne savais rien faire d’autre. Je me suis dit qu’en jouant même un tout petit peu, Est-ce di cile d’être à la fois devant et derrière la caméra ?

même si elle n’avait pas très envie d’être actrice. Mais c’est une intimité, une expérience à vivre. Après, cela me permettait de la garder sur le tournage alors que d’habitude on est séparé. Là, je l’avais sous le coude, j’avais même une institutrice particulière puisqu’elle ratait l’école. Tout cela m’arrangeait dans l’organisation. Non, je livre bataille contre les écrans. Mais de temps en temps, on regarde un filmensemble. J’essaie surtout de lui mettre des livres dans lesmains. Quel genre demaman êtes-vous avec vos enfants ³ ? Plutôt maman poule. Un peu copine, mais surtout protectrice. Dans chacun des lms que vous réalisez, vous avez le chic pour mêler la tendresse, l’humour, le regard sur la société… Oui, c’est vrai, j’aime l’humour, j’aime la tendresse, et, quand on parle de l’indi- vidu, on parle forcément de la société. Je parle donc de tendresse, d’humour,mais aussi de violence et, surtout, de solitude. Parce que nous sommes tous seuls, mais c’est comme les empreintes digi- tales : jamais deux êtres humains n’ont Regardez-vous beaucoup de lms avec elle ?

Avec Les Estivants, vous racontez un nouveau chapitre de votre vie ? Non, pas exactement, je préfère par- ler d’autobiographie imaginaire. J’aime bien lesmots qui ne vont pas ensemble et je trouve que c’est une belle défini- tion, une expression intéressante. À la fois, c’est une autobiographie puisque nous prenons – avec Agnès de Sacy et Noémie Lvovsky avec lesquelles j’écrismes films – l’inspiration des gens autour de nous, de nos vies, mais c’est aussi une fiction puisque nous inven- tons, nous nous laissons complètement libres de faire totalement autre chose de la réalité que nous vivons. On retrouve votremère et ondécouvre votre lleOumy, uneactricenée ! Oui, elle est étonnante. Mais là encore, la mère de cette histoire n’est pas MA mère mais LA mère, de même pour ma fille. D’habitude, je n’écris pas pour quelqu’un mais en ce qui concerne ma mère, ma fille, même d’autres person- nages, cette fois-ci plus que dans les autres films, j’avais l’impression que c’était indispensable. À un moment donné, ma mère a failli ne pas le faire et c’était inenvisageable de l’imaginer sans ma mère. Et tourner ce film avec une autre petite fille qu’Oumy, je trou- vais que c’était extrêmement cruel

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