Exemple de flipbook Territoire d'entrepreneurs

Je me souviens Je me souviens Je me souviens

L’aventure semblait folle «

© Thierry Béguin

« J’ai racheté en 1988 la boutique de pâtisse- rie-chocolaterie de mes parents avec son laboratoire, située rue Charles-de-Gaulle, à Roanne. J’avais une idée en tête qui représentait une innovation majeure autant qu’une passion : fabriquer mon propre choco- lat à partir de la fève de cacao. Je me disais qu’un maître-chocolatier devait maîtriser du début jusqu’à la fin la fabrication de son chocolat, ce qui est loin d’être le cas dans la profession : 99,9% des pâtis- siers-chocolatiers achètent des pains de chocolat de couverture à des industriels tels que Barry Callebaut ou Valrhona, puis les fondent et les retravaillent. Après un stage à l’Institut de recherche du café et du chocolat de Montpellier, le plus compliqué a été de trouver un torréfacteur, une éplucheuse de fèves et une raffineuse-concheuse adaptés aux quantités que je voulais produire. À la suite de longues recherches, j’ai acheté de très vieilles machines d’occasion en Belgique et en Italie que j’ai installées dans la cave sous le laboratoire. Mon père, qui était Meilleur Ouvrier de France, estimait que je me lançais dans une aven- ture complètement folle et doutait fortement de la FRANÇOIS PRALUS MAÎTRE CHOCOLATIER

qualité que j’allais obtenir. Après plusieurs essais peu convaincants, j’ai peu à peu réussi à maîtriser ma torréfaction, mon conchage et une recette. J’ai attendu que tout soit au point pour faire déguster mon cho- colat à mon père qui a été très satisfait. Et surtout soulagé ! Certains de mes confrères étaient aussi très sceptiques. Mais après quelques années, plusieurs d’entre eux m’ont acheté – et achètent toujours – ma couverture de chocolat, comme Pierre Hermé, Jean- Paul Hévin ou des restaurants trois étoiles (Troisgros, Pierre Gagnaire, Passédat, etc.). Avec les maisons Bernachon à Lyon et Bonnat à Voiron, nous sommes trois artisans chocolatiers en France à produire notre chocolat à partir de fèves de cacao. Mais il n’y a que moi qui possède aussi ma propre plantation de cacaotiers. Plus par passion que par besoin, j’ai acheté 17 hectares de forêt sur l’île de Nosy Be à Madagascar en 2004. Nous avons d’abord défriché puis créé une pépinière. J’ai récolté les pre- mières fèves en 2012. Aujourd’hui, j’en produis 1,5 tonne et j’en achète 35 autres sur l’île. J’ai dépensé beaucoup d’énergie sur ce projet, mais l’énergie se trouve facilement dès lors qu’elle permet de réaliser un rêve. »

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PROPOS RECUEILLIS PAR ANTOINE MASSON

PREMIER SEMESTRE 2016 - #03 - TERRITOIRE D’ENTREPRENEURS LOIRE HAUTE-LOIRE

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