La Presse Bisontine 66 - Mai 2006

L’ÉCONOMI E

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À Bâle, les franc-comtois étaient à la fête H ORLOGERIE Après le salon de Bâle

D ans le hall dédié à la montre, les plus grandes marques - de Chopard à Rolex - rivalisent de luxe et d’élégan- ce sur leurs stands, à grand renfort de boiserie ou de lignes épurées de designers modernes. Comme chaque année début avril, Bâle devient pendant une semaine le temple de l’hor- logerie mondiale. Un rendez- vous incontournable qui réunit toutes les plus grands noms du secteur, où le prestige et la cote d’une marque peuvent se faire et se défaire et où les affaires se concluent. “C’est un incontournable pour nous. En une semaine, nous réalisons tout simplement 50 % de notre chiffre d’affaires. À la fin de la foire, il y a parfois des entre- prises qui disparaissent. Vous jouez en partie votre année ici” , affirme Alain Silberstein, le créateur de montres bisontin. Le temple du luxe a sa hié- rarchie. Au rez-de-chaussée, les marques “de tradition avec une renommée mondiale” et celles des grands groupes de luxe où les Suisses trustent les

Temple du luxe pendant une semaine, la foire de Bâle, qui s’est achevée le 6 avril, est le rendez-vous incontournable des plus grandes marques de montres et de bijoux du monde. Pour les horlogers franc-com- tois, le cru 2006 a été plutôt satisfaisant.

stands les plus imposants. Au premier étage, les marques “de tradition horlogère et avec ima- ge” , issues de la mode. Alain Silberstein, lui, est par- mi les marques de renommée internationale, au rez-de- chaussée. Une boutique à l’ima- ge de ses montres, aux cou- leurs vives. Le salon de Bâle, pour le créateur, c’est “de la vente mais aussi de la com- munication. Toute la presse spécialisée et life style est là. Bâle pour lamontre, c’est l’équi- valent de la semaine de la mode à Paris pour la haute coutu- re.” En une semaine, le Bison- tin a vu défiler une quaran- taine de journalistes japonais, autant de russes. Un étage entier de son stand est réser- vé à ses seuls partenaires japo- nais. Et pour lui, le cru 2006 a été “un des meilleurs depuis des années. On renoue avec le dynamisme, il n’y a jamais eu autant d’intérêt pour l’artisa- nat français, je me suis rare- ment autant amusé que cette année” , affirme, sourire gour- treprises franc-comtoises à être présentes sur la foire de Bâle, largement dominée par les marques suisses. Un symbole de prestige, mais aussi un investissement important - un stand coûte de 4 à 40 millions de francs suisses. Et elles reviennent globalement satis- faites de leur semaine. “Cette année, les entreprises sont plu- tôt contentes, même s’il faut encore concrétiser les com- mandes prises en Suisse. Mais on vit une bonne orientation sur les marchés asiatiques, les Émirats arabes marchent aus- si très forts, les acheteurs d’Amérique latine qui avaient été absents l’année dernière mand, le créateur qui vend moins de 2 000 montres chaque année, principalement enAsie et en Russie. Péquignet, S.D.D.H., Ambre S.A… Elles sont une dizaine d’en-

Du 30 mars au 6 avril, le salon de l’horlogerie et de la bijouterie de Bâle regroupe 312 des marques de montres les plus prestigieuses du monde. Chaque année, le salon attire près de 85 000 visiteurs.

d’ailleurs très présents sur la foire. “Et en général, ils repré- sentent beaucoup” , affirme un horloger. Plus qu’enregistrer les com- mandes fermes, la foire sert aussi à situer la tendance, même si elle ne la révèle pas. “C’est un excellent indicateur. Le niveau de commande au salon nous sanctionne ou féli- cite nos dernières créations” , reprend Xavier Lasserre. Chez Michel Herbelin, autre marque du Haut-Doubs installée dans une boutique aux boiseries claires, la clientèle est diffé- rente. La marque, qui vise davantage les classes moyennes aisées, est présen- te seulement en Europe. “On progresse doucement, mais cela n’a rien à voir avec les taux de croissance que certains réali- sent en Asie. Les montres à plus de 100 000 euros, c’est un autre monde, même s’il est très pré- sent à Bâle” , affirme Patrick Zimmermann, directeur mar- keting de la marque. À Bâle, il enregistre peu de com- mandes. “C’est plus un lieu d’échange. Réussir Bâle, c’est comme réussir une soirée sym- pa entre amis. Après, c’est le marché qui décide. Et c’est de plus en plus difficile à prévoir” , reprend-il. Mais se félicite-t- il encore, “cette année, on a vu encore plus de détaillants que l’année dernière.” S.D.

sont de retour. Le salut pour l’horlogerie française passe par le développement de filiale à l’étranger” , note Patrice Bes- nard, délégué général de la chambre française de l’horlo- gerie et des microtechniques. En 2005, les exportations de montres ont ainsi bondi de plus de 13 %. “Bâle, c’est là, où tout le monde en profite pour pré- senter ses nouvelles collections. Et là, l’accueil a été bon” , note Philippe Barro, le gérant de

Chez Saint-Honoré, on se dit satisfait du salon 2006. “On a eu un nombre très important de nouveaux distri-

buteurs qui sont intéressés par la marque” , affirme le responsable export de la marque.

Régnier Paris, une entreprise basée à Charquemont et qui a entièrement revu sa collection depuis deux ans. Pour Saint-Honoré aussi, “les indica-

Des journalistes

Les manufacturiers exposent juste pour le prestige

russes et japonais.

teurs sont positifs” affirme Xavier Lasserre, responsable export de la marque, qui s’oc- cupe des marchés européens. “On a eu un nombre très impor- tant de nouveaux distributeurs qui sont intéressés par la marque, certains se sont même présentés spontanément” , affir- me-t-il. Depuis six mois, la marque, elle aussi implantée à Char- quemont dans le Haut-Doubs, a ouvert une filiale à Hong Kong, Dubaï et New York. Et se développe de plus en plus vers la Russie, “un marché neuf, où il y a encore de belles choses à faire.” Acheteurs russes et asiatiques sont

Pour les fabricants de bracelets, comme Sibra, Bâle est une question de prestige. Plus que de business.

F ace au prestigieux Hall 1 réservé aux montres, c’est presque un autre salon qui se déroule dans le Hall 3. Pas de luxe tapageur, ni de stands immenses, et des couloirs presque déserts. Ici, l’espace est consacré aux composants, fabricants de bra- celets de montres, de mécanismes ou de verres. “Pour nous, être à Bâle, c’est avant tout du prestige. Montrer que nous existons” , affirmeYves Marder, le directeur commercial de Gérard Bou- veret, une entreprise familiale implan- tée à Franois et qui fournit les brace- lets des montres de certaines marques de luxe. Car pas de commandes fabuleuses ici. “Nos clients rencontrent eux-mêmes leurs propres clients en face. Quand ils viennent, c’est plus pour demander des modifications dans les pro- ductions. Selon les retours qu’ils ont en discu-

tant avec leurs exportateurs” , explique Vincent Boirin, directeur commercial de Sibra, implan- té à Besançon. Mais le prestige du salon de Bâle a un coût, pour des retombées limitées. Conséquence, contrairement aux marques d’horlogerie, cer- tains ont préféré jeter l’éponge. C’est le cas de Perrin Créations. La société d’Orchamps-Vennes, qui fournit les bracelets de montres pour Blancpain, FranckMüller ou Pierre Kunst, ne fait plus le voyage suisse depuis plusieurs années déjà. “Ce n’est pas notre place. Et ne pas être à Bâle ne nous coûte pas pour autant des clients. C’est avant le salon que ceux-ci nous attendent. Là, il faut savoir être réactif, les accompagner dans le dévelop- pement de leurs nouveaux produits” , affirme le directeur général de Perrin Créations.

Un coût, pour des retombées limitées.

Pour le créateur bisontin Alain Silberstein, le salon de Bâle, “c’est de la vente mais aussi de la communication.”

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