La Presse Pontissalienne 229 - Novembre 2018

L’INTERVIEW DU MOIS

La Presse Pontissalienne n° 229 - Novembre 2018

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POLITIQUE

Annie Genevard

“L’esprit montagnard n’est vraiment pas un vain mot” Deux nouvelles casquettes pour la députée du Haut-Doubs qui s’est hissée première vice-présidente de

routier) utilisé notamment par les engins de travaux et de déneigement ont été évoquées ? A.G. : C’est un vrai souci pour les com- munes de montagne. Pour une com- mune comme l’Alpe-d’Huez, cette nou- velle fiscalité représente un coût supplémentaire de 300 000 euros par an ! On a réussi à repasser cette dis- position en commission à l’Assemblée nationale, mais elle a été finalement adoptée. Le Sénat va la rejeter, mais elle reviendra à l’Assemblée.A été tout de même exclue une partie du dénei- gement et du damage.Malgré tout, cet- te mesure fiscale aura forcément une incidence sur le coût des travaux pour les communes. L’A.N.E.M. a adopté une résolution à ce sujet lors de ce congrès. L.P.P. : Votre objectif pendant ces deux ans de présidence de l’A.N.E.M. ? A.G. : En tant que présidente, je veille- rai à ce que chaque budget, chaque pro- jet de loi de finances soit épluché sous l’angle montagnard. L’A.N.E.M. reste la seule instance en France qui fait exister le politique montagne dans les politiques publiques. Nous avons obte- nu également d’être consultés dans tous les schémas d’aménagement qui touchent de près ou de loin aux zones montagne. Ce sont des points qui ne sont peut-être pas visibles du grand public, mais qui sont stratégiques. L.P.P. : Il y a eu cependant un petit couac pen- dant le congrès sur la place attribuée à L.R.E.M. au sein du bureau de l’A.N.E.M. Ce sera fina- lement une vice-présidence. Patrick Genre s’est insurgé contre ces petites chamailleries politiciennes. A.G. : Nous avons en effet réitéré auprès de nos collègues de la majorité leur invitation à nous rejoindre dans une gouvernance tripartite, ce qui est tout à fait normal. L.R.E.M. réclamait le secrétariat général et n’a donc pas sou- haité désigner quelqu’un immédiate- ment. Cela devait être fait prochaine- ment. Patrick Genre a raison, cette association ne doit pas être perturbée par des considérations politiques, c’est dans l’intérêt de la montagne. L.P.P. : Vous avez coiffé récemment une deuxiè- me nouvelle casquette avec cette place de pre- mière vice-présidente de l’Assemblée natio- nale. Une vraie surprise pour vous ? A.G. : Complètement. Chaque groupe avait désigné ses candidats pour occu- per les six vice-présidences de l’As- semblée. Deux postes devaient revenir

L a Presse Pontissalienne : Vous avez été élue le 19 octobre à la tête de l’Asso- ciation nationale des élus de la mon- tagne (A.N.E.M.) pour un mandat de deux ans. Quel bilan tirez-vous du congrès annuel de l’A.N.E.M. qui s’est tenu à Morteau les 18 et 19 octobre ? Annie Genevard : Si j’en crois les messages reçus depuis par les congressistes, je peux dire que le bilan de ce congrès est très positif. Il y a toujours une espèce de magie au congrès de l’A.N.E.M. par- ce que pour tous ces élus de tous bords, il n’y a qu’un parti, c’est celui de lamon- tagne. L’esprit montagnard n’est vrai- ment pas un vain mot, on s’en est enco- re rendu compte cette fois-ci.De surcroît, ce congrès qui se déroulait dans le Haut- Doubs a permis à plus de 500 élus de toute la France de découvrir les beau- tés de notre région. Et sur le plan éco- nomique, ça a été aussi une belle opé- ration, pour les hébergeurs et pour les commerces. Un boucher de Morteau me disait qu’il n’avait jamais autant vendu de saucisses que ces deux jours- là ! L.P.P. : Ce congrès a-t-il permis de faire avan- cer la cause de la montagne, et sur quels points ? A.G. : Les élus de montagne sont tous confrontés au quotidien avec des pro- blèmes spécifiques dans leurs zones de montagne. L’accès aux soins, le haut débit, lemaintien des services à la popu- lation, le maintien des petites lignes ferroviaires, tout cela est très concret. Au cours de nos travaux, les élus de la montagne ont reçu le soutien de Sébas- tien Lecornu, le nouveau ministre en charge des Collectivités territoriales dont c’était le premier déplacement dans ses nouvelles fonctions. Il nous a notamment assuré qu’un siège sera attribué à l’A.N.E.M. au sein de la Confé- rence nationale des territoires, ce qui est une avancée majeure. On a assis- té également à des interventions de haute tenue. Philippe Wahl, le prési- dent du groupe La Poste, a notamment souligné que le vieillissement de la population est une chance pour la Fran- ce et qu’il est important d’anticiper ce phénomène en privilégiant le lien social et la proximité. De son côté, le prési- dent de l’A.R.C.E.P., le gendarme du numérique, Sébastien Soriano, a assu- ré que l’autorité de régulation sera très vigilante afin que les objectifs du “New Deal” du 14 janvier dernier pour la cou- verture numérique mobile et du dis- positif de couverture ciblée, soient res- pectés. Il a notamment reconnu que si de tels progrès avaient été réalisés, c’était en grande partie grâce à l’A.N.E.M. L.P.P. : D’autres questions concrètes comme la nouvelle fiscalité sur le G.N.R. (gasoil non l’Assemblée nationale et qui vient d’être élue présidente de l’Association nationale des élus de la montagne. Interview.

Annie Genevard lors du dernier congrès de l’Association nationale des élus de la montagne dont elle vient d’être élue présidente.

trop ignorés pendant la première année du mandat.J’attendsmain- tenant les preuves d’amour. L.P.P. : Soutenez-vous le pro- jet de réforme des institu- tions et notamment la bais- se de 30 % du nombre de parlementaires ? A.G. : Cette baisse était dans le programme de la droite. Le problème, c’est qu’Emmanuel Macron ajoute une part de 15 % de proportion- nelle. Résultat : on va aboutir, notamment en

contournement de Pontarlier n’est plus possible pour des questions budgétaires et environnementales.La solution actuel- le est donc d’améliorer le franchisse- ment de Pontarlier. On est désormais à la phase concrète des études pour les- quelles j’avais obtenu ce fameux finan- cement. Et si l’on en croit les calculs des cabinets d’études, l’économie de temps sera substantielle et ces amé- nagements résoudraient le bouchon. Le problème est que depuis trente ans la France a fait des choix qui ont péna- lisé les zones rurales. Il faut désormais rééquilibrer les choix budgétaires dans les futurs contrats de plan État-Région. Je l’ai répété récemment au nouveau préfet du Doubs. Jusqu’à maintenant, c’est un peu tout pour la plaine et rien pour la montagne. Maintenant, il faut continuer à maintenir la pression pour que soient réenclenchées les études sur les deux secteurs suivants : le tronçon LaMain-LaVrine, et lesTavins. Le pré- fet a sollicité à ma demande des cré- dits d’études au ministère. Il faut être sans cesse dans la revendication de le l’équité territoriale. Ceci dit, sans l’op- position des riverains à l’époque, la des- cente des Tavins serait un problème déjà réglé. L’argent est reparti sur la voie des Mercureaux à Besançon.Mais on ne refait pas l’histoire… L.P.B. : En parlant de Besançon, des rumeurs récurrentes vous voient comme la candidate idéale pour la droite aux prochaines munici- pales à Besançon… A.G. : Je ne sais pas d’où vient cette rumeur qui m’est en effet revenue aux oreilles plusieurs fois, mais je tiens à mettre les choses au clair : je n’ai pas quitté ma mairie de Morteau pour reprendre un autre mandat municipal. C’est clair et net. De plus, je suis très attachée à mon mandat national. Pour Besançon, il faut un Bisontin. n

taine d’années, je pense que c’est une bonne chose. L.P.P. : Qu’est-ce que ce poste vous apporte en plus ? A.G. : Matériellement, rien, j’ai toujours le même bureau et les mêmes moyens d’exercer ma fonction, et je continue- rai à siéger deux à trois fois par semai- ne au perchoir. Je peux juste désormais signer quelques documents à la place du président Richard Ferrand et pro- tocolairement, c’est moi qui peux repré- senter le président quand il n’est pas là, pour accueillir des délégations étran- gères par exemple. Je l’ai fait récem- ment avec l’héritier de l’Empereur du Japon. Ce poste de première vice-pré- sidente est aussi à mon sens une bel- le reconnaissance pour notre territoi- re du Haut-Doubs. L.P.P. : Et la prochaine fois, ce sera la prési- dence de l’Assemblée ? A.G. : Pour ça, il y a encore quelques petits détails à régler… (rires). Mais ça ne me ferait pas peur. Je n’ai jamais fait de plan de carrière, je vis les choses comme elles se présentent. J’ai tou- jours pris avec bonheur ce qui m’arri- vait. L.P.P. : Un mot plus politique sur le récent remaniement ? A.G. : Ce qui est un peu étrange, c’est qu’Emmanuel Macron dit qu’il a enten- du les Français mais en même temps, il réaffirme qu’il ne changera rien ! Sur le remaniement, il a fait sortir des gens de terrain comme Jacques Mézard. Quant à Christophe Castaner à l’Inté- rieur, il doit maintenant faire ses preuves. C’est d’abord un fidèle du pré- sident. Ceci dit, la reconfiguration du ministère de l’Espace rural et de l’Amé- nagement du territoire confié à Jac- queline Gourault traduit bien la prise de conscience que les territoires ont été

“Tout pour la plaine et rien pour la montagne.”

zone montagne, à une disparition de 40%des circonscriptions.Dans leDoubs, on passerait par exemple de 5 à 3 et ma circonscription deviendrait de loin la plus étendue, avec plus de 230 com- munes. Comment je fais le jour où la circonscription couvre la moitié du département ? C’est une perte éviden- te de proximité. Et contrairement à ce qu’on entend parfois, la France n’est pas un pays “surparlementarisé”. Il y a par exemple beaucoupmoins de dépu- tés qu’au Danemark si on rapporte leur nombre à la population du pays. Les Français considèrent qu’il y a trop de parlementaires mais quand les gens réaliseront que concrètement leur dépu- té sera moins présent, ils vont peut- être changer d’avis. Avec cette réfor- me, une nouvelle fois, les territoires urbains seront proportionnellement mieux représentés que les secteurs ruraux. L.P.P. : Un sujet d’actualité plus “Haut-Doubs” : la R.N. 57. Que pensez-vous du plan présen- té par les services de l’État pour le franchis- sement de Pontarlier ? A.G. : On sait d’abord que le grand

à L.R., deux autres à L.R.E.M., un au MoDem et un à l’U.D.I. Je ne pensais pas que l’on pouvait rayer des noms et panacher et c’est ce qui s’est passé. Finalement, c’est celui qui “prend le moins de balles”, dont le nom est le moins rayé, qui sort en tête. Pour moi, ça a donc été une surprise totale, mais j’y vois quand même un petit succès d’estime. C’est la première fois qu’il y a un premier vice-pré- sident d’opposition depuis une cinquan-

“Présidente de l’Assemblée, ça ne ferait pas peur.”

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