Journal C'est à dire 225 - Octobre 2016

V A L D E M O R T E A U

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Morteau Le parcours du combattant pour recruter un boucher Artisan boucher à Morteau, Alain Vernerey a mis huit mois pour trouver le salarié qui lui manquait. Huit mois de galères et d’entretiens surréalistes. Témoignage.

I l a fallu huit mois à Alain et Séverine Vernerey pour recruter un boucher-ven- deur. “Il commence cette semaine” annonce le couple d’ar- tisans qui espère avoir enfin trouvé le collaborateur qui lui manquait pour compléter l’équi- pe de la boucherie. Les fêtes de Noël approchent. Traditionnel- lement, c’est une période de for- te activité. “En ce qui me concer- ne, c’est six heures de sommeil en quatre nuits” annonce Alain Vernerey. L’arrivée de ce nou- veau salarié tombe donc à point nommé. Il était temps ! Car pour recruter la bonne personne, ce fut un véritable parcours du combattant. “Pour trouver un boucher qualifié qui se sent concerné par la santé de l’en- treprise, il faut chercher long- temps” explique le profession- nel qui sait de quoi il parle. Au printemps dernier, Alain Ver- nerey a commencé par s’adres- ser à Pôle Emploi. “Nous avons appris qu’il y avait 1 500 can- didats bouchers sur le marché de l’emploi. Au regard de ce chiffre, on a d’abord pensé que le recrutement ne serait pas trop

difficile.” Le couple a vite déchanté. Il n’a pas vu l’ombre d’un candidat qui correspondait au profil recherché. “Alors on a testé Le bon coin et une agen- ce intérim.” L’annonce a fini par circuler, et des personnes à la recherche d’un travail ont déposé leur can- didature. Mais pas une ne cor- respondait au poste. “Nous avons à peu près tout eu, du mécani- cien qui voulait travailler en boucherie au thésard en psy- chologie qui cherchait à se recon- vertir. Il aimait man- ger et à ce titre, il était persuadé de fai- re un bon boucher” sourit Alain Verne- rey qui a rappelé à ses interlocuteurs que boucher est un métier qui demande un savoir- faire. Des bouchers de métier juste- ment, il en a reçu des huit der- niers mois. La plupart d’entre eux s’est présentée avec des demandes surréalistes. “Une dizaine de professionnels sont venus me proposer de travailler quelques heures par semaine

à la boucherie, en échange de quoi je devais les rémunérer au black. Je les ai éconduits en leur expliquant que je ne mangeais pas de ce pain-là. J’ai également eu le cas d’un boucher de métier qui était au R.S.A. Il voulait que je le paye à l’heure afin qu’il puisse continuer à percevoir l’ai- de sociale, alors que je lui pro- posais un C.D.I. avec des heures supplémentaires rémunérées. C’est difficile à entendre pour quelqu’un comme moi qui est à la boucherie à 5 heures du matin.”

“Il aimait manger et était persuadé de faire un bon boucher.”

L’histoire de ce recru- tement serait risible si elle n’était pas la traduction du cliva- ge qui existe entre les besoins du mar- ché de l’emploi d’un

Alain Vernerey dénonce la politique de formation des jeunes qui depuis trente ans a consisté à dénigrer les métiers manuels qui embauchent aujourd’hui.

côté, et de l’autre le système de formation et d’accompagnement des demandeurs d’emploi. Alain Vernerey tire la sonnette d’alar- me et alerte les pouvoirs publics. “On dit ici que nos difficultés de recrutement sont liées à la proxi- mité de la Suisse. Mais cela n’ex- plique pas tout. Je pense que l’on paie le résultat d’une politique

mené à la déconsidération pro- gressive des professions arti- sanales comme celle de boucher. Le mal est fait. Il faudra mal- heureusement du temps pour que l’on vante à nouveau la noblesse de ces métiers au ministère de l’Éducation Natio- nale. n T.C.

de formation menée depuis les années quatre-vingt et qui a consisté à amener 80 % des élèves au Bac et à dénigrer les Bacs professionnels. Quand j’étais apprenti boucher, nous étions 40 en deuxième année. L’année der- nière, les C.A.P. étaient à peine une quinzaine. On a fait beau- coup de mal aux métiers

manuels à force de leur casser du sucre sur le dos” se désole l’artisan. Il redoute qu’à ce ryth- me, des entreprises comme la sienne finissent par ne plus pou- voir trouver de personnel. Un comble dans le contexte actuel où les pouvoirs publics cher- chent à lutter contre le chôma- ge. Cette politique, selon lui, a

Jusqu’au 15 décembre 2016

Le PERP : moins d’impôts aujourd’hui, plus de revenus à la retraite demain.

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