Agricultrices d'ici

« Un métier en évolution et un milieu plus ouvert qu’autrefois »

Dans son laboratoire de transformation des noisettes ou à la bergerie, Emily Auroux met l’accent sur les valeurs d’une agriculture complice de la nature.

On ne peut pas vraiment dire qu’Emily fait partie des « hors cadre familial » . Ses grands-parents étaient agriculteurs dans le village où elle est aujourd’hui elle-même exploitante. « Mais j’ai vécu durant seize ans à Bordeaux et mon monde s’est écroulé lorsque mon père a décidé de reprendre la propriété , se souvient-elle. Je détestais la campagne ! Tous mes amis étaient en ville. L’intégration aura été compliquée. » Après un bac ES, la « néo-rurale » repart dans la capitale aquitaine, en fac de sociologie, pour préparer une licence. « Je n’y étais pas heureuse : je voulais rentrer “chez moi”, à Boisse. Il faut dire aussi que j’y avais rencontré Fabrice, installé quant à lui depuis 1999. » D’abord salariée dans l’exploitation paternelle, Emily décroche ensuite un contrat à la sûreté de l’aéroport de Bergerac ; elle restera sur le tarmac durant huit ans. Toutefois, avec la naissance des enfants en 2002 et 2005, les horaires ne sont plus tenables. C’est à cette époque que l’exploitation de Fabrice entame sa conversion en bio. « Si, avant, l’agriculture ne m’intéressait pas du tout, elle prenait une dimension environnementale digne de créer un environnement

sûr pour mes enfants. Nous avons réfléchi à la manière de rendre les activités viables à deux : un troupeau de 50 brebis charmoises est venu s’ajouter aux vignes, aux céréales et aux noisetiers. » C’est surtout cette dernière production qui va devenir le domaine de prédilection d’Emily, avec la création d’un atelier de transformation d’où sortent des parfums gourmands et des gâteaux, des pâtes à tartiner, des huiles, etc., mis en vente en boutiques de producteurs. D’autre part, elle garde un œil observateur sur le troupeau, soigné aux huiles essentielles. « L’agriculture évolue beaucoup , apprécie la jeune femme, qui aime se détendre en pratiquant la boxe de loisirs et la danse africaine. Le milieu devient plus ouvert. C’est intéressant de se poser et de réfléchir, de voir comment on peut faire autrement. Je considère qu’il faut travailler avec la nature, pas contre elle – en acceptant plus de travail, l’herbe, les dégâts, etc. – et agir en conséquence. Au final, c’est réconfortant et valorisant de sortir d’un circuit conventionnel que l’on ne peut pas maîtriser. »

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